La fin du monde et de l’humanité, essai de généalogie du discours écologique

Thèse soutenue par Icham-Stéphane Afeissa le 10 avril 2014, Institut de géographie et durabilité

Le discours écologique fait régulièrement l’objet d’une critique dénonçant son catastrophisme, son prophétisme noir et ses prédictions apocalyptiques. La référence à l’Apocalypse biblique y est effectivement présente, et fonctionne au reste dans les deux sens puisqu’il apparaît que les visions apocalyptiques contenues dans le Nouveau et dans l’Ancien Testaments faisaient déjà mention d’un certain nombre de désastres environnementaux au titre de signes avant-coureur de la catastrophe finale. L’interprétation écologique de l’apocalypse peut se comprendre aussi bien comme une interprétation de l’Apocalypse en termes des problèmes environnementaux que comme une interprétation des problèmes environnementaux en termes apocalyptiques. Mais la possibilité même d’un tel rapprochement, à ce jour, a toujours valu réfutation du discours écologique, ainsi fustigé pour ses outrances et son caractère anxiogène.

Nous nous proposons de prendre à la lettre le discours écologique, en examinant les emprunts (délibérés ou non) qu’il effectue à l’égard d’autres types de discours, sans réduire notre enquête à la seule Apocalypse biblique, mais en prenant en considération tous les discours qui se sont efforcés à un moment ou à autre de l’histoire des idées d’élaborer une représentation de la fin du monde et de l’humanité. Notre enquête se veut généalogique en ce sens où il s’agit pour nous de déconstruire le discours écologique en ses éléments constituants en plongeant dans l’intertexte qui le compose. Faire la généalogie du discours écologique ne signifie pas mettre au jour les antécédents historiques d’un tel discours, mais les équivalences discursives à la lumière desquelles il est possible de mieux en comprendre le fonctionnement.

Les objectifs que nous poursuivons en menant une telle enquête sont à la fois d’ordre descriptif et d’ordre normatif. Descriptif, en ce sens où il s’agit pour nous de comprendre de quelle manière nous pensons les problèmes soulevés par la crise environnementale en soumettant à analyse l’outillage mental dont nous nous servons ordinairement à cette fin. Normatif, en ce sens où nous voudrions montrer que la raison pour laquelle les problèmes écologiques sont parfois mal posés tient à ce qu’ils sont pensés en référence à d’autres problèmes élaborés dans d’autres cadres de pensée, de sorte que des transferts de schèmes discursifs se sont opérés d’un domaine de réflexion à un autre, conduisant à méconnaître la spécificité des problèmes posés par la crise environnementale.

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