Magmatisme tardif dans le Massif de l’Adamello, Italie: contraintes relatives à l’origine et la mise en place de filons dans la croûte supérieure

Titre original « Post-Plutonic magmatism : from the source to the emplacement of an upper crustal dyke swarm, Adamello Massif, Italy »

Thèse soutenue par Niklaus Hurlimann le 27 septembre 2013, Institut des sciences de la Terre (ISTE)

Les magmas issus des zones de subduction contribuent substantiellement à la formation de la croûte continentale. Les plutons tonalitiques et granitiques représentent, en effet, une partie importante de la croûte continentale.

Des magmas primaires produits dans le ‘mantle wedge’, partie du manteau se trouvant au-dessus de la plaque plongeante dans des zones de subduction, migrent à travers le manteau puis la croûte. Pendant ce transfert, le magma peut s’accumuler dans des réservoirs intermédiaires à différentes profondeurs. Le stockage de magma dans ces réservoirs engendre, d’une part, la différentiation des magmas par cristallisation fractionnée et, d’autre part, une fusion partielle la croûte continentale préexistante associée au transfert de la chaleur des magmas vers l’encaissant. Ces liquides magmatiques issus de la croûte peuvent, ensuite, se mélanger avec des magmas primaires. Le transport du magma dans la croûte implique notamment un flux de magma à travers différentes fractures recoupant les roches encaissantes élastiques. Au cours de ce processus de migration, des cumulats de cristaux ou des agrégats de cristaux encore non-solidifiés, peuvent être recyclés et reactivés pour être transportés à des niveaux supérieurs de la croûte.

Le terrain d’étude est situé dans le massif d’Adamello. Celui-ci est composé de plusieurs plutons mis en place entre 42 et 29 millions d’années. Dans une phase tardive de l’activité magmatique liée à ce batholite, une série de filons de composition variable allant de picrobasalte à des compositions dacitiques s’est mise en place dans la partie sud du massif. Deux modèles sont proposés, dans la littérature, pour expliquer la formation des magmas dacitiques caracterisés par des compositions peralumineux (i.e. à corindon normatif). Le premier modèle propose que ces magmas soient issus de la fusion de matériel mafique et pélitique présent dans la partie infépieur de la croûte, alors que le deuxième modèle suggère une évolution par cristallisation fractionnée à partir de liquides primaires issus du manteau. Un modèle de cristallisation fractionnée a pu être developpé pour expliquer l’évolution des filons de l’Adamello. Ce modèle explique la formation des filons dacitiques par la cristallisation fractionnée de 17% olivine, 2% spinelle riche en Cr, 18% clinopyroxène, 41% amphibole, 4% plagioclase et 0.1% magnétite à partir de liquide de compositions picrobasaltiques. Ce modèle prend en considération les contraintes pétrologiques déduites de l’observation des différents filons ainsi que du champ de stabilité des différentes phases en fonction de la température. Ces roches montrent une évolution géochimique similaire aux données expérimentales simulant la cristallisation fractionnée de magmas évoluant à des niveaux inférieurs de la croûte (7-10 kbar). Le modèle montre, en particulier, le rôle prépondérant de l’amphibole, phase qui contrôle en particulier le caractère peralumineux des magmas différenciés ainsi que leurs compositions en éléments en traces.

Des phénomènes de fusion partielle de l’encaissant tonalitique lors de la mise en place de filons mafiques sont observés sur le terrain. L’injection du magma basaltique chaud (~1050C) sous forme de filons rapprochés, augmente la surface du contact avec l’encaissante tonalitique. Une telle situation produit la fusion partielle des roches encaissantes nécessaire à l’incorporation d’enclaves mafiques observés au sein des tonalites. Pour comprendre les conditions nécessaires pour la fusion partielle des roches encaissantes, des modèles de conduction thermique pour une injection simultanée d’une série de filons ont été développés. Des données géochimiques sur les minéraux et sur les roches totales soulignent qu’au niveau supérieur de la croûte, l’assimilation sélective ou totale de l’encaissante tonalitique, modifie la composition du liquide primaire pour les éléments lithophiles tel que le Sr, Ba et Rb.

Un autre aspect important concernant la pétrologie des filons de l’Adamello est la présence d’enclaves feldsiques dans les filons les plus primitifs. Ces enclaves montrent, en particulier, des textures proches de celles rencontrées dans des plagiogranites océaniques ou dans des roches métamorphiques de haute pression/basse température. Ces enclaves contiennent du zircon et du rutile. La datations de ces zircons à l’aide du géochronomètre U-Pb indique un âge Crétacé inférieur. Cet âge est important, car aucune roche de cet âge n’a été considerée comme un assimilant potentiel pour des roches magmatiques d’âge Eocène à Oligocène dans les Alpes Sud Centrales.

La réparation spatiale des filons post-plutoniques dans des grands batholites tel que l’Adamello, est une caractéristique clé pour la compréhension des champs de contraintes lors du refroidissement du batholite. L’orientation des filons va, en particulier, indiquer la contrainte minimale au sein des roches encaissante. La mise en place de la série de filon recoupant la partie Sud du massif de l’Adamello, est associée à un décrochement sénestre, décrochement que l’on peut lier aux contraintes tectoniques régionales auxquelles s’ajoutent l’effet de la dilatation produite par la mise en place du batholite lui-même. Ce décrochement sénestre produit une segmentation en échelon des filons.

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