Une école de terrain transdisciplinaire pour comprendre comment les activités humaines passées façonnent encore la biodiversité des écosystèmes du Gabon

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Gretchen Walters, Institut de géographie et durabilité

Gretchen Walters a récemment rejoint des collègues au Gabon à Doumé pour étudier et enseigner comment les activités humaines passées influencent encore la biodiversité dans les zones gabonaises qui peuvent sembler « naturelles ». Cette recherche vise à mieux gérer et protéger la biodiversité en tenant compte des pratiques culturelles et historiques.

Un article rédigé par Gretchen Walters, traduit depuis l’anglais par Deepl.

Lorsqu’on observe les forêts et les savanes depuis un avion ou un drone, les vastes écosystèmes semblent presque uniformes et naturels. Mais si l’on sait lire le paysage, c’est une toute autre histoire : l’écosystème porte les marques de son histoire dans sa flore, sa faune, son sol et ses habitants. 

L’étude de la biodiversité prend tout son sens lorsqu’elle réunit différentes disciplines et parties prenantes pour en comprendre les enjeux. En juin et juillet 2025, le professeur Gretchen Walters a enseigné à l’école de terrain ECOTROP au Gabon à des étudiants et des professionnels de l’agence des parcs nationaux, en collaboration avec des enseignants du Gabon, de France, du Royaume-Uni, des États-Unis, du Swaziland et de Grèce. L’objectif était de mener des recherches avec des étudiants et d’enseigner des outils et des méthodologies qui permettraient de comprendre la biodiversité des anciens villages du Gabon qui sont dispersés dans la forêt.

Une trentaine de participants1 et professeurs de l’Université Omar Bongo (UOB, avec laquelle l’UNIL a un accord), de l’Université des sciences et techniques de Masuku (USTM), de l’Agence des parcs nationaux du Gabon et de cinq universités américaines, sont partis ensemble à la découverte.

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Image prise par drone du village de Doumé. Photo : D. Mouketou-Tarazewicz.

Pendant trois semaines, nous avons étudié la biodiversité d’anciens sites villageois au Gabon, autour du village de Doumé, en collaboration avec des membres des ethnies Kota, Adouma, Bongo et Awandji, qui vivent depuis plusieurs centaines d’années dans cette mosaïque forêt-savane au bord du fleuve Ogooué.

Prof. Gretchen Walters
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Village de Doumé, Gabon.

Les forêts gabonaises étaient auparavant très peuplées, les villages et leurs territoires associés occupant de vastes étendues. Cependant, pendant la colonisation par la France, les villages ont été forcés de se déplacer le long des routes, dans ce qu’on appelle le « Regroupement », un processus qui s’est déroulé de 1919 aux années 1970. Cette politique coloniale de grande envergure a déplacé des villages, mais n’a pas modifié l’utilisation des terres. Les gens reviennent régulièrement dans ces anciens villages, qui font toujours partie des territoires de chasse des villages et restent importants pour des raisons culturelles. Cependant, la plupart des recherches ne tiennent pas compte de ces parties de l’écosystème et tendent à se concentrer sur des endroits qui semblent avoir moins d’influence humaine. Cette école de terrain et le projet connexe FNS sur l’histoire des forêts visent donc à combler ces lacunes importantes et à rendre compte de la manière dont les hommes ont façonné l’écosystème au fil du temps.

Dans ECOTROP, les participants deviennent membres d’un des « ateliers » thématiques suivants : archéologie, pédologie, botanique, zoologie (oiseaux et mammifères) et cartographie participative historique. Chaque atelier est dirigé par un chercheur, et les résultats de chaque atelier contribuent à répondre à nos questions de recherche sur la compréhension du rôle de l’homme dans la modification des sols et de la biodiversité. En utilisant une variété de méthodes, chaque atelier documente la biodiversité, l’histoire sociale et les sols d’un ancien village et d’un site comparatif voisin qui n’a jamais eu de village ou de champ agricole.  La contribution de l’UNIL à l’école de terrain est d’apporter une approche d’anthropologie environnementale en utilisant des méthodes transdisciplinaires, qui collaborent avec des experts des quatre groupes ethniques de Doumé. Alors que l’école de terrain est financée en partie par une subvention de la National Science Foundation des Etats-Unis, la participation de l’UNIL provient d’un projet frère, financé par le FNS, qui se concentre également sur la compréhension des héritages de l’utilisation passée des terres forestières.

Cette année, nous nous sommes concentrés sur les anciens villages de Mabouli et Manenga, tandis que l’équipe d’archéologie a travaillé dans la grotte voisine de Youmbidi. Chaque équipe travaille avec des membres de la communauté, mais dans le cas de la cartographie historique participative, ces membres de la communauté deviennent des experts avec lesquels nous travaillons, puisque nous documentons l’histoire de leurs villages.

Pendant notre travail sur le terrain, notre travail a été documenté par Victor Amman, un diplômé de l’UNIL qui crée des documentaires scientifiques. Nous attendons avec impatience de voir son film au début de l’année prochaine !

Une fois nos recherches terminées, nous présentons nos résultats aux membres de la communauté de Doumé et de la ville voisine de Lastoursville. Il s’agit d’une étape importante pour que les participants apprennent à communiquer leurs résultats au grand public et, surtout, pour que les communautés d’accueil comprennent ce que nous avons fait. Nous nous réjouissons de travailler à nouveau avec eux l’année prochaine.

ECOTROP est une école de recherche sur le terrain qui se tient au Gabon et au Cameroun depuis 2011.

Le consortium est dirigé par l’Agence des parcs nationaux du Gabon en partenariat avec l’USTM et l’UOB, ainsi que de nombreuses autres universités en dehors du Gabon, mais notamment l’Université de la Nouvelle-Orléans et l’Institut de Recherche pour le Développement de France. L’école de terrain est largement financée par une subvention de la National Science Foundation des Etats-Unis à l’Université de la Nouvelle-Orléans,  TOTAL Gabon et par le Ministère des Affaires Etrangères français. L’UNIL est devenu un partenaire du Consortium ECOTROP en 2025, et participe à ECOTROP dans le cadre d’un projet FNS plus large sur un sujet connexe au Gabon. 

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Entretien à Doumé village, atelier de cartographie participative historique. Photo : B. Ngonda Makita

  1. Les participants sont appelés « apprenants » car ils peuvent être des étudiants universitaires ou des professionnels de l’agence des parcs nationaux. ↩︎

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