Storage Hydropower in a Changing Climate: Understanding, Predicting, and Mitigating Thermal Impacts on Rivers

riviere

Thèse en géographie, soutenue le 31 octobre 2025 par David Dorthe, rattaché à l’Institut des dynamiques de la surface terrestre (IDYST) de la FGSE.

Les rivières et les écosystèmes qui en dépendent subissent de plus en plus les effets combinés du changement climatique et de l’exploitation hydroélectrique. Dans les cours d’eau régulés par des barrages, l’eau prélevée ou stockée réduit le débit naturel s ur certains tronçons, les rendant plus sensibles aux températures extrêmes. Les lâchers d’eau liés à la production d’électricité peuvent provoquer des variations soudaines de courant (éclusées ou hydropeaking) et de température (éclusées thermiques ou thermopeaking), susceptibles de perturber la faune aquatique.

Pour limiter ces impacts, plusieurs solutions existent. L’augmentation du débit résiduel consiste à maintenir en permanence une quantité minimale d’eau dans la rivière pour protéger les habitats aquatiques et atténuer l’effet des éclusées. Les bassins de régulation sont des retenues qui stockent temporairement l’eau afin de lisser les variations de débit et de température. Les galeries de dérivation sont des tunnels ou canaux permettant de détourner une partie de l’eau des éclusées vers un autre tronçon de rivière moins sensible aux variations ou vers un lac. Ces modifications coûtent cher et demandent du temps pour être mises en place ; elles doivent ensuite rester efficaces à long terme dans un climat en évolution, où le régime thermique des rivières change. Jusqu’ici, ces mesures sont surtout conçues pour réduire les variations d’écoulement (vitesse, hauteur d’eau), mais leurs effets sur la température sont rarement évalués.

L’étude s’est concentrée sur un tronçon de la Sarine, en Suisse, pour évaluer l’efficacité de différentes mesures d’atténuation dans un contexte de réchauffement climatique. Pour cela, il fallait d’abord disposer d’un modèle numérique capable de reproduire fidèlement les variatio ns de température de l’eau sur ce tronçon, afin de pouvoir ensuite simuler et tester différents scénarios. Le modèle calcule la température de l’eau sur la base des conditions météorologiques, de la production hydroélectrique, mais aussi sur des éléments comme l’effet d’ombrage de la végétation ou les échanges de chaleur entre l’eau et les sédiments. Pour vérifier la fiabilité du modèle, des mesures de température ont été réalisées durant plusieurs années : les comparaisons montrent que le modèle a reproduit les valeurs observées avec une erreur moyenne faible, comprise entre 0,4 et 0,8 °C. Ce modèle validé a ensuite servi à simuler l’évolution future de la rivière selon plusieurs scénarios climatiques, puis à tester l’impact de différents aménagements.

Les résultats montrent que pour des scénarios de changement climatique marqué, la température moyenne annuelle de l’eau pourrait augmenter jusqu’à 4 °C d’ici la fin du siècle. Dans ce cas, la température dépasserait 15 °C pendant 6 mois de l’année (contre environ un mois en moyenne actuellement), entraînant stress thermique et des conditions propices à la prolifération de maladies chez les poissons. Les effets ne sont pas identiques partout : les tronçons à faible débit sont particulièrement vulnérables, tandis qu’en aval, les lâchers d’eau depuis le fond des retenues peuvent modérer les températures extrêmes. Contrairement aux rivières naturelles, où les plus fortes hausses surviennent en été, elles pourraient ici se produire en automne et en hiver, du fait de la capacité des réservoirs à conserver la chaleur plus longtemps (inertie thermique).

Trois mesures d’atténuation ont été testées : augmentation du débit résiduel, bassin de régulation et galerie de dérivation. L’augmentation du débit résiduel a donné les meilleurs résultats, réduisant la durée des périodes chaudes et l’amplitude des variations de température. Les bassins de régulation atténuent les variations à court terme, mais ont peu d’effet sur la tendance générale. Les galeries de dérivation apportent peu de bénéfices et peuvent parfois aggraver la situation en réduisant le débit dans certaines zones, ce qui favorise des températures plus extrêmes.

Ces résultats montrent qu’il est important de prendre en compte la température de l’eau dans l’évaluation des impacts et des mesures liées aux barrages. Bien gérés, ceux -ci peuvent atténuer certaines hausses de température, par exemple en relâchant de l’eau froide stockée en profondeur, mais ils peuvent aussi amplifier les effets du réchauffement. Disposer d’outils fiables pour anticiper les conditions futures permet de concevoir des stratégies mieux adaptées pour préserver la vie aquatique face aux défis climatiques. 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *