Thèse soutenue par Lucas Haldimann le 22 octobre 2021, Institut de géographie et durabilité (IGD)
La mobilité temporaire regroupe des séjours éducationnels, professionnels ou culturels, réalisés dans un pays différent ou dans une autre région linguistique, sans un objectif purement touristique. Ce type de mobilité revêt une signification particulière pour les jeunes et est vu par certaines populations comme un rite de transition à l’âge adulte. Toutefois, la diversité des séjours rend l’obtention de données fiables difficile et l’analyse de ce phénomène se concentre souvent sur des populations spécifiques. La thèse comble cette lacune en analysant les expériences et les intentions de (non-)mobilité temporaire à travers une large enquête sur des jeunes hommes suisses de 18 à 20 ans ainsi qu’un échantillon complémentaire de plus de 2000 jeunes femmes suisses.
La mobilité temporaire est un phénomène sélectif. Les jeunes provenant d’un milieu favorisé ont une plus grande probabilité de devenir mobile. Mais la situation familiale et l’éducation du jeune ont aussi une influence sur la probabilité de devenir mobile. L’analyse démontre aussi l’accumulation d’un capital de mobilité à travers le parcours de vie, formé au cours des diverses expériences de mobilités (déménagements, vacances, etc.) et facilitant de futurs séjours. Les femmes sont plus souvent mobiles que les hommes. Ces derniers partent plus souvent pour des raisons d’employabilité, et tendent à limiter les efforts pour partir en séjour. Les femmes valorisent plus souvent l’expérience en elle-même et mettent davantage en avant des motivations hédonistes, ainsi que l’envie d’acquérir de l’indépendance.
Les motivations à partir en séjour relèvent de trois types et dépendent du parcours de vie ainsi que du capital de mobilité accumulé. L’analyse met en évidence trois groupes de jeunes : les Curieux possèdent un fort capital de mobilité et partent plus souvent pour des raisons hédonistes (découvrir une culture, faire de nouvelles rencontres, etc.) ; les Professionnels cherchent à accumuler du capital de mobilité et répondent à des critères utilitaires (employabilité, connaissances linguistiques) ; enfin, les Pragmatiques possèdent moins de capital de mobilité et profitent de temps à disposition dans une période de transition pour partir dans une logique opportuniste.
Quatre groupes de jeunes non mobiles sont identifiés en fonction de leurs freins à la mobilité. Les jeunes du groupe des contraints font face à de nombreuses difficultés liées à leur classe sociale. Le deuxième groupe représente les jeunes en difficulté financière, qui sont fortement intéressés par la mobilité temporaire, mais font face à un manque de ressources financières. Le troisième groupe des ancrés privilégie son ancrage local et ses liens sociaux alors que le quatrième groupe, nommé les non-mobiles satisfaits, choisit la non-mobilité et ne possède pas de contraintes particulières.