Ethnographie de la construction sociale et politique de deux problèmes publics environnementaux dans la haute Vallée de l’Arve : des changements climatiques à la pollution de l’air
Thèse soutenue par Alexandre Savioz, le 23 septembre 2021, Institut de géographie et durabilité (IGD)
La Vallée de l’Arve est un territoire qui s’étend des hauteurs de la Vallée de Chamonix à la ville de Genève, et se situe dans le département de la Haute-Savoie (74). Séparée en différents secteurs, mon enquête s’est focalisée sur la haute Vallée de l’Arve, composée de deux collectivités territoriales, la Communauté de Communes du Pays du Mont-Blanc, et la Communauté de Communes de la Vallée de Chamonix-Mont-Blanc.
Suivant une approche socio-anthropologique, les premiers pas de cette recherche ambitionnaient d’interroger l’appréhension des habitants d’un territoire touristique de montagne confronté aux changements climatiques. Cependant, cette enquête a ensuite été réorientée par l’épreuve du terrain vers des questionnements intégrant la thématique de la qualité de l’air.
Cette thèse propose ainsi de s’intéresser à la manière dont deux enjeux environnementaux sont appréhendés dans la région en tant que problème de société, les changements climatiques et la pollution de l’air. Son objectif est de rendre compte de la complexité de ces thématiques à travers l’expérience des populations locales en suivant leur itinéraire respectif et leur appropriation ou non par des mouvements sociaux.
Bien que les controverses liées aux changements climatiques soient omniprésentes à l’échelle nationale et internationale, le phénomène demeure difficile à appréhender à l’échelle locale, même lorsqu’il renvoie à des réalités pourtant bien tangibles, comme c’est le cas dans la région étudiée avec notamment le recul des glaciers. En effet, les sensibilités environnementales se polarisent davantage autour des problématiques liées à qualité de l’air, qui constituent un enjeu majeur de santé publique et qui relèvent d’un ancrage historique de plusieurs décennies de luttes collectives, préexistant aux débats liés aux enjeux climatiques dans la région. Les nombreux liens, amalgames, rapprochements, glissements et confusions rencontrés au cours de l’enquête entre ces deux thématiques témoignent d’une compréhension des enjeux climatiques à partir de référentiels connus, qui s’inscrivent dans l’histoire collective des acteurs investis.
Afin d’aborder ces enjeux, cette recherche emprunte à la perspective sociologique constructiviste des « problèmes publics », qui postule que ceux-ci sont construits à travers un processus de problématisation de la réalité. Dans ce processus, les mobilisations citoyennes jouent un rôle fondamental. De fait, cette recherche se focalise sur la genèse et sur les motivations de mouvements sociaux qui sont apparus dès la fin des années 1980 dans la haute Vallée de l’Arve, reformulant leurs revendications à travers différentes formes argumentatives et différentes stratégies.