Thèse soutenue par Valérian GEFFROY le 6 mars 2020, Institut de géographie et durabilité (IGD)
Parmi les développements contemporains des loisirs, on peut observer des personnes qui, régulièrement, voyagent hors de leurs espaces quotidiens pour aller pratiquer des sports de nature, dans des sites de pratique qui sont considérés comme valant le déplacement. Ce phénomène qu’on peut appeler tourisme sportif de nature, objet central de cette thèse, s’inscrit dans une série d’enjeux actuels importants pour l’étude des mobilités et pour la géographie : l’accroissement général des mobilités, leur forte valorisation sociale et culturelle, l’hybridation des loisirs avec les différents domaines de la vie, le fort investissement des espaces non urbains, dits « de nature », par les pratiques et les imaginaires de loisir.
Ce travail porte sur les spatialités, c’est-à-dire les rapports à l’espace, qui caractérisent la pratique du tourisme sportif de nature. La thèse pose à ces spatialités deux questions principales : comment elles contribuent à construire des liens sociaux, et comment elles sont appréciées par les pratiquant·e·s.
Le propos s’inscrit dans une géographie inspirée par les théories de la pratique, qui envisagent l’action humaine comme une coordination constante entre le monde matériel et son interprétation par les individus, et les faits sociaux comme un partage plus ou moins généralisé de schémas d’action et de compréhension.
L’analyse se fonde sur des enquêtes qualitatives auprès des personnes qui voyagent pour trois sports de nature, le parapente, le kayak de rivière et l’escalade sportive. 76 entretiens semi-directifs ont été ainsi menés, avec 110 personnes, dans cinq hauts lieux de ces différentes pratiques :
- En Grèce, Kalymnos,
- En France : le Verdon,
- Annecy,
- Saint-André-les-Alpes,
- Haute-Durance.
D’autres matériaux sont mobilisées, notamment un corpus de photographies collectées auprès des personnes interrogées.
Quatre aspects des spatialités du tourisme sportif de nature ressortent de l’analyse et sont discutés, autour des concepts centraux de communauté de pratique et d’engagement.
- Les circulations mondiales et les ancrages locaux des communautés touristico-sportives, d’abord, qui dessinent des réseaux de lieux sélectifs, des centralités spécialisées.
- Le partage de l’information géographique dans les sports de nature, ensuite, qui passe aujourd’hui notamment par des plates-formes en ligne, et entretient des langages géographiques adaptés aux modalités sportives de pratique des différents terrains.
- La relation corporelle et sensible au mouvement et à l’environnement « naturel » constitue le troisième thème développé : les pratiquant.e.s déploient une attitude immersive et active qui résume largement leur relation émotionnelle et affective aux espaces pratiqués, qui contribue à définir leur conception de la nature, et qui voit les espaces comme ensembles de prises à saisir pour un mouvement sportif maîtrisé.
- Enfin, est présentée la variabilité des engagements individuels dans la pratique de mobilité pour le sport, qui apparaît souvent comme une passion et peut aller, dans des cas relativement rares, jusqu’à déterminer un mode de vie. Ces différents aspects des spatialités touristico-sportives sont successivement discutés en fonction de leurs contributions aux théories de la pratique et à la géographie.
Accès au texte intégral
- Geffroy Valérian, Des spatialités qui engagent et qui lient : le tourisme sportif de nature et ses communautés de pratique, Université de Lausanne, 2020.