Thèse soutenue par Benjamin Lehmann, 1er mai 2019, Institut des dynamiques de la surface terrestre (IDYST)
Afin d’appréhender l’effet des variations climatiques sur les environnements alpins, il est nécessaire d’étudier le passé des systèmes montagneux. Depuis le dernier maximum glaciaire (LGM), il y a environ 20’000 ans, les glaciers alpins se sont retirés des régions de plaine et de leurs zones d’accumulation en altitude. Cette transition modifia considérablement la géographie alpine en alimentant de grands lac d’eau douce, en libérant de considérable quantité de sédiments et en exposant d’importantes étendues de surfaces rocheuses.
Pourtant, les reconstitutions des conditions environnementales depuis le LGM restent peu documentées. Une des principales limitations est le manque de contraintes temporelles précises dans la reconstruction des extensions glaciaires passées. Différentes méthodes géochronologiques ont été développées et appliquées pour dater les marqueurs géomorphologiques ou sédimentaires spécifiques de la dynamique des glaciers.
Récemment, la datation de l’exposition de surface par luminescence stimulée optiquement (OSL) a été développée, offrant l’occasion d’améliorer les reconstructions des extensions glaciaires passées. Cette méthode est basée sur la sensibilité du signal OSL des minéraux à la lumière. Lors d’une exposition le signal OSL est remis à zéro dans les premiers millimètres supérieurs de la surface rocheuse exposée.
Dans cette thèse, j’étudie le potentiel de la datation d’exposition de surface OSL à partir de polis glaciaires sur les flancs de la Mer de Glace, glacier emblématique du massif du Mont-Blanc. Je montre tout d’abord que cette méthode permet de reconstruire les épaisseurs passées du glacier depuis le Petit Âge Glaciaire, c’est à dire depuis la deuxième moitié du XIXe siècle. Je montre ensuite que sur de plus longues périodes, la méthode est sensible à l’érosion de surface. En la combinant avec une autre méthode de datation, la datation par cosmogénie nucléïde, je montre qu’il est possible de contraindre l’évolution de l’érosion de surface et des variations d’épaisseur du glacier depuis 20’000 ans.
En appliquant cette nouvelle approche sur des profiles verticaux de surfaces de roches moutonées sur les bords de la Mer de Glace, je démontre que l’intensité de l’érosion varie avec l’altitude. Plus les surfaces sont haute, plus l’érosion est faible. De plus, les résultats montrent des intensités d’érosion très fortes par rapport à ce qui est généralement admis dans ces environnements de montagnes. La distribution vertical et l’intensité des taux d’érosion pourraient la conséquence des facteurs morphomètrique et climatiques propres aux environnement de haute montagne, comme la pente des surfaces rocheuses ou la distribution du manteau neigeux. Enfin, les reconstitutions glaciaires suggèrent des scenarios d’amincissement glaciaire potentiellement rapide à la fin du dernier maximum glaciaire.