Thèse soutenue par Battista Matasci le 15 juillet 2015, Institut des sciences de la Terre (IGD)
Définir les zones qui sont théoriquement plus propices aux chutes de blocs peut être très utile pour simuler les trajectoires de propagation des blocs et pour réaliser des cartes de danger, qui constituent la base de l’aménagement du territoire dans les régions de montagne.
Les questions plus importantes à résoudre pour estimer le danger de chutes de blocs sont :
- Où se situent les sources plus probables pour les chutes de blocs et éboulement futurs ?
- Avec quelle fréquence vont se produire ces évènements ?
Avec ce travail nous avons essayé d’améliorer des méthodes existantes, pour pouvoir augmenter les possibilités de répondre à ces questions.
La caractérisation des roches et des fractures qui composent les parois rocheuses est une étape nécessaire pour évaluer les dangers naturels tels que chutes de blocs et glissements rocheux. En effet la possibilité de avoir des volumes de roche instables dans une pente dépend en grande partie de la composition de la roche et donc de ses caractéristiques mécaniques, comme la résistance à la déformation. Les valeurs d’orientation et d’espacement des fractures doivent aussi être prises en compte, car elles ont un effet important sur les propriétés mécaniques de la roche et car elles déterminent les types de mécanismes de rupture, comme par exemple le glissement sur un plan incliné.
Pour déterminer la composition de la roche et définir le réseau de fractures nous avons collecté des mesures sur le terrain, mais avons aussi profité de technologies de détection à distance comme le scanner laser terrestre. Cet appareil, appelé aussi LiDAR (Light Detection And Ranging) est composé d’un émetteur d’impulsions laser qui balaye la surface d’intérêt et d’un capteur. La distance de chaque point de mesure est calculée automatiquement en fonction du temps de trajet de l’impulsion laser qui voyage à la vitesse de la lumière. Ces informations de distance couplées aux valeurs des angles de prise de vue permettent de définir les coordonnées des points du modèle topographique de la surface scannée. Ces modèles de la topographie en 3D sont aussi appelés nuages de points. De plus le LiDAR enregistre aussi l’information concernant l’intensité du signal laser de retour, qui dépend de la distance de mesure et de la réflectivité du matériau.
Les avantages principaux du LiDAR sont :
- l’acquisition rapide de modèles numériques de la topographie très détaillés pour des parois verticales et inaccessibles,
- la possibilité d’effectuer des mesures précises des fractures,
- la possibilité de comparer des acquisitions réalisées à des moments différents pour pouvoir détecter des chutes de blocs ou des déformations,
- la possibilité de utiliser l’intensité du signal laser de retour pour définir le type de roche en surface.
En utilisant les informations sur la fracturation nous avons développé un modèle pour calculer les mécanismes de rupture directement sur les nuages de points pour pouvoir évaluer la susceptibilité au déclenchement de chutes de blocs à l’échelle de la paroi. Les zones sources de chutes de blocs les plus probables dans les parois granitiques de la vallée de Yosemite et du massif du Mont-Blanc ont été calculées et ensuite comparés aux inventaires des évènements passés pour vérifier les méthodes d’évaluation. D’autres modèles ont été appliqués à plusieurs cas d’étude (paroi ouest du Petit Dru, glissement rocheux de Preonzo,…) pour évaluer les effets sur la stabilité des parois de différents paramètres tels que : la taille et la densité des fractures, la résistance de la roche intacte, la présence de eau ou de glace dans les fissures, etc…
Les nuages de points obtenus avec le scanner laser terrestre ont été utilisés avec succès aussi pour produire des cartes des types de roches en 3D, en utilisant l’intensité du signal réfléchi. Une autre technique pour obtenir des cartes géologiques des zones verticales consiste à combiner un modèle topographique LiDAR avec une carte géologique en 2D. A El Capitan (Yosemite Valley) nous avons utilisé cette méthode pour obtenir une carte verticale des principales roches, que nous avons utilisé ensuite pour étudier les raisons d’une érosion préférentielle de certaines zones de la paroi. D’autres efforts pour quantifier le taux d’érosion ont été effectués au Monte Generoso (Ticino, Suisse) où nous avons essayé d’améliorer l’estimation de l’érosion au long terme en prenant en compte les volumes de blocs tombés en 40 ans mais aussi les volumes des compartiments rocheux instables.
L’intégration des résultats de ce travail, sur la fracturation et la composition des parois rocheuses, avec les méthodes existantes permet d’améliorer la prise en compte de l’aléa chute de pierres et éboulements et augmente les possibilités d’interprétation de l’évolution des parois rocheuses dans le temps.
Excellent article, je suis très sensible à ce genre d’infos