Thèse soutenue le 14 juillet 2014 par Andrea Ferrari, Institut des sciences de la Terre
Les écoulements à deux phases (eau, air) ou plus au travers d’un milieu poreux jouent un rôle essentiel dans un grand nombre de processus en lien avec l’énergie ou la protection de l’environnement. En Suisse, plus de 80% de l’eau potable consommée provient des eaux souterraines. Cette ressource est vulnérable et menacée par un grand nombre d’activités anthropiques. Les phytosanitaires utilisés dans l’agriculture, ainsi que les déchets nucléaires peuvent percoler vers la subsurface, parfois sous forme non aqueuse, et contaminer les eaux souterraines. Dans les processus de piégeage et stockage du carbone (PSC), le dioxyde de carbone produit par la combustion des énergies fossiles est récupéré et injecté dans des formations géologiques profondes pour atténuer les émissions de gaz à effet de serre.
Il existe toutefois un risque substantiel de fuite du dioxyde de carbone stocké qui pourrait alors atteindre et acidifier les aquifères proches de la surface. Les écoulements polyphoniques sont également importants dans le contexte des déchets nucléaires ou pour les opérations de récupération améliorée du pétrole, lorsque la production de pétrole est augmentée par l’injection d’un autre fluide (typiquement de l’eau ou du gaz) pour mobiliser le pétrole dans le réservoir. Toutes ces applications ne constituent que quelques exemples des processus pour lesquels une compréhension approfondie des mécanismes qui contrôlent les écoulements de plusieurs fluides non miscibles dans un matériel poreux est requise.
La modélisation et la prédiction des écoulements de fluides et du transport de contaminants dans la subsurface constituent un défi. Dans les exemples mentionnés précédemment, deux phases non miscibles ou plus se déplacent simultanément dans une matrice poreuse. Un traitement particulier de l’interface entre les fluides dans une géométrie des pores complexe est donc nécessaire. Pour développer des modèles conceptuels et numériques appropriés il est indispensable d’avoir une très bonne compréhension des différents processus physiques, chimiques et biologiques et ceci pour un large éventail d’échelles temporelles et spatiales. Bien que les processus pertinents aient lieu à l’échelle du pore, les applications pratiques requièrent des prédictions à l’échelle du terrain. De ce fait il faut introduire des relations appropriées entre les modèles aux deux échelles. Ces relations doivent décrire les effets des mécanismes à l’échelle du pore sur les quantités à l’échelle du terrain. La compréhension des mécanismes à l’échelle du pore est essentielle pour transposer les écoulements polyphoniques dans les milieux poreux vers de plus grandes échelles et établir des modèles ainsi que des prédictions fiables à l’échelle du terrain.
Le principal objectif de cette thèse est d’utiliser un modèle rigoureux à l’échelle du pore pour améliorer la compréhension des processus physiques qui gouvernent les écoulements polyphasiques dans les milieux poreux. Nous avons validé le model numérique et montré qu’il reproduit des expériences de laboratoire dans des micromodèles. Nous avons ensuite utilisé l’approche proposée pour établir les limites d’application des modèles qui existent à l’échelle du terrain et pour établir les relations constitutives de ces modèles en moyennant les résultats obtenus à l’échelle du pore. Nous montrons que certains des phénomènes souvent négligés à l’échelle du pore, doivent être pris en compte car ils contribuent à la distribution finale du fluide dans le milieu et ont des conséquences à l’échelle du terrain.
Cette thèse fournie une analyse détaillée des écoulements polyphasiques à l’échelle du pore et démontre que les informations obtenues à partir des observations à cette échelle peuvent être utilisées pour tester la validité des modèles et améliorent notre compréhension des processus à l’échelle du terrain.