La transplantation d’organes entre rhétorique du don et vision biomédicale du corps. Une étude de la décision de don d’organes
Licenciée en psychologie depuis 2007, Francesca Bosisio a travaillé en qualité d’assistante de recherche et d’enseignement à l’Institut de Psychologie et à la Plateforme interdisciplinaire d’éthique (Ethos). Dans ce contexte, elle a développé un intérêt marqué pour les implications éthiques et sanitaires de l’utilisation de nouvelles technologies en médecine. Actuellement engagée comme collaboratrice scientifique à la Section bases scientifiques et juridiques de l’Office fédéral de la santé publique, elle a accepté un mandat de cheffe de projet au CHUV pour la mise en place et la coordination du nouveau TraumaNetwork romand.
Depuis les années 1990, on assiste à une augmentation du décalage entre le nombre de personnes inscrites en liste d’attente et le nombre d’organes disponibles à des fins de transplantation. C’est dans ce contexte que la réflexion autour de l’accroissement du nombre d’organes a fait de la transplantation un enjeu de santé publique et que de nombreuses enquêtes ont été adressées à la population civile dans le but d’étudier les réticences au don d’organes.
Cette recherche trouve son origine dans le constat que le développement de la médecine de transplantation est tributaire d’une vision mécaniciste du corps qui, bien que dominante, n’est pas consensuelle. L’adoption de la rhétorique du « don de vie » se heurte cependant à cette vision, en mettant l’accent sur l’aspect symbolique de l’acte de don d’organes.
Dans ce cadre, la thèse examine la manière dont les tensions qui traversent la discipline de la médecine de transplantation se répercutent sur la décision de don d’organes en prenant une position épistémologique subjectiviste-constructiviste. Nous avons étudié, d’une part, la décision de don d’organes considérée comme «un souhait possible pour le futur» et, d’autre part, les conditions concrètes qui ont conduit à une décision de don d’organes réelle dans le passé. Pour ce faire, les méthodes du questionnaire, de l’entretien semi-structuré et du groupe focalisé ont été utilisées.
Les données récoltées nous ont permis d’esquisser un modèle de la décision de don d’organes qui met en évidence le rôle des expériences dans la réflexion et l’importance de reconnaître l’existence d’un besoin pour la décision. Pour qu’une explicitation ait lieu, il faut en outre qu’une opportunité concrète se présente. Sur cette base, notre analyse souligne qu’une décision en faveur du don d’organes et son explicitation dépendent de la construction d’un lien de confiance entre les différents acteurs du don.