La reconnaissance des troubles musculo-squelettiques (TMS) comme maladies professionnelles : controverses sociales et trajectoires personnelles
Après des études de psychologie aux Universités de Genève et de Lausanne, Isabelle Probst a travaillé comme assistante à la Faculté des sciences politiques et sociales de l’UNIL, puis comme chargée de recherche à l’Ecole d’études sociales et pédagogiques de Lausanne. Elle a soutenu en 2012 sa thèse de doctorat en psychologie, effectuée sous la direction de la prof. Michèle Grossen. Actuellement au bénéfice d’une bourse de chercheuse débutant du FNS, elle est intégrée dans l’équipe “Clinique de l’activité” du Conservatoire national des arts et métiers de Paris et mène une recherche sur les conséquences des horaires atypiques sur la santé et l’articulation entre travail et famille.
Les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont actuellement considérés comme des problèmes majeurs de santé au travail, mais leur reconnaissance comme maladies professionnelles reste controversée. L’objectif central de cette thèse est de comprendre, dans une perspective de psychologie socio-culturelle intégrant certains apports de la sociologie interactionniste, les conséquences que cette situation peut avoir pour des travailleuses et travailleurs souffrant de ces affections. Au préalable, il s’agit de saisir comment se constituent les controverses sur les TMS et pourquoi ces derniers sont si rarement reconnus comme maladies professionnelles en Suisse. Les principales données sont constituées de documents institutionnels et d’entretiens avec des ouvrières et ouvriers atteints de TMS.
Les résultats montrent que les enjeux de la reconnaissance des maladies professionnelles ne se limitent pas aux prestations d’assurance et à la prise en charge des coûts engendrés par les maladies. En effet, la non-reconnaissance de ces maladies contribue à définir les TMS comme des problèmes personnels plutôt que professionnels, ce qui peut entraver les capacités des ouvrières et ouvriers à agir sur leurs conditions de travail. En outre, les explications qui circulent sur les TMS par le biais de discours institutionnels ou informels ont des conséquences sur la manière dont une personne appréhende sa propre maladie. Ces explications de la maladie peuvent être des outils de compréhension, mais aussi contribuer à définir l’identité de la personne malade. Dans ce cas, la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie touche aussi à des questions de reconnaissance sociale.