Finir sa thèse : un entretien avec Christina Györkös et Sophie Perdrix
Christina Györkös et Sophie Perdrix sont toutes deux doctorantes à l’Institut de Psychologie. Elles font leur thèse sous la direction du Prof. Jérôme Rossier et sont rattachées au Laboratoire de Psychologie du Développement, du Conseil et de l’Intervention (LabDCI). Hélène Carole Mbatsogo Edoa, représentante du corps intermédiaire au sein de la Commission de la Recherche de la Faculté, les a rencontrées pour les interroger sur un sujet délicat : la fin de la thèse…
CG : Ma thèse s’intitule « Relations of the job?demands?control?support model of job strain with personality attributes : A cross?national study in Switzerland and South Africa ». Elle est financée depuis 2010 par un fonds de la Confédération dans le cadre d’une collaboration avec l’Afrique du Sud. Le financement se terminera en 2013. J’ai quelques tâches d’assistanat en parallèle, mais très peu. Je me consacre actuellement à la rédaction de ma thèse et de deux articles.
SP : Je suis assistante diplômée à l’Institut de Psychologie. J’ai d’abord été engagée comme doctorante FNS en 2008 sur un projet de recherche concernant les impacts du processus de consultation psychologique en orientation sur différents facteurs cognitifs et émotionnels, tels que la difficulté à faire un choix.
A quel moment envisage-t-on la fin de la thèse ?
CG : A deux moments : au tout début, de façon assez générale et dans la dernière année, de façon plus concrète. Lors d’une réunion avec mon directeur de thèse, au tournant de ma dernière année de thèse, nous avons discuté de ma table des matières, des dates de la première version de ma thèse, de la version finale, de la soutenance. Je savais alors que je m’acheminais vers la fin d’une longue et laborieuse aventure.
SP : Envisager la fin de la thèse, c’est, je pense, planifier une date de restitution. En ce qui me concerne, la fin de mon contrat m’a contrainte à envisager concrètement la fin de ma thèse. Tout d’abord, planifier la restitution du manuscrit m’a paru irréel, puis j’ai pu intégrer petit à petit cette nouvelle identité de doctorante en fin de thèse.
Comment s’organise la fin de la thèse ?
CG : Gérer mon temps de façon optimale est devenu une priorité. Mon truc, c’est de tenir une liste mensuelle, hebdomadaire et parfois même quotidienne des « choses à faire ». Quand une tâche est faite, c’est un réel plaisir que de la biffer de la liste !
SP : Le processus de fin de thèse connaît ses hauts et ses bas. Cette phase est passablement déstabilisante, mais elle est aussi passionnante puisqu’elle me permet véritablement de m’approprier la thématique. La découverte de l’enseignement grâce à l’assistanat, a enrichi ma réflexion car les thèmes d’enseignement sont proches de ma thèse.
Quels sont les impératifs ?
CG : La fin de la thèse, c’est le plus gros morceau du travail d’un(e) doctorant(e), à mon avis. C’est le moment de « livrer la marchandise » ! Trouver le juste milieu entre atteindre ses objectifs, organiser convenablement son temps et tenir compte de ses ressources est une négociation presque quotidienne.
SP : Recentrer ses activités sur la rédaction de sa thèse est central. J’avais conservé une petite pratique du conseil en orientation mais j’y ai mis fin pour rédiger ma thèse.
Quelles sont les inquiétudes ?
CG : Une inquiétude fréquente, c’est de viser un travail parfait, mais c’est contre-productif et je fonctionne mieux en m’imposant des objectifs. Par exemple, je me dis : « D’ici deux semaines, je termine le chapitre X et je fais les analyses relatives à mes deux premières hypothèses ». Le but n’est donc pas de faire un travail impeccable, mais de le faire !
SP : Le doute d’être un jour capable de mettre un point final, l’angoisse d’un certain perfectionnisme doctoral, etc. La liste des obstacles que l’on ressent comme tels est longue !
Sur quoi peut-on s’appuyer pour finir sa thèse ?
CG : Je m’appuie sur mon directeur de thèse, mes collègues, mentors, amis et ma famille. Il faut aussi être indulgent avec soi-même, respecter ses propres limites et se donner du temps de se ressourcer. Le sport et le théâtre me permettent également de lâcher prise et gérer le stress.
SP : Je m’appuie sur mes collègues et mes proches qui connaissent la difficulté d’un tel travail. Un élément clé pour moi a aussi été de bénéficier de l’expérience de chercheurs internationaux. Le directeur de thèse est évidemment également un point d’appui important.
Quelles sont les questions et réflexions liées à l’après-thèse ?
CG : Lorsqu’on travaille sur sa thèse, on doit être dans le présent. C’est pourquoi j’ai de la peine à me projeter dans le futur. J’évite donc de trop y penser avant de soumettre la première version de ma thèse, prévue pour juillet. Je me sentirai alors disponible pour aborder cette question et commencerai des recherches d’emploi. Par ailleurs, il y a le problème lié à mon statut d’étrangère puisque je suis canadienne. L’après-thèse signifie aussi pour moi réfléchir à l’endroit où je veux travailler.
SP : Planifier l’après-thèse me semble être un élément clé de cette transition. C’est aussi ce qui rend la fin de thèse très difficile car il faut à la fois terminer une période de vie et en construire une nouvelle. Formée comme psychologue conseillère en orientation, je pense que confronter théorie et pratique est une priorité, mais j’ai d’autres projets personnels et professionnels, et je me demande comment valoriser mon doctorat après la thèse.