Comment les citoyen·ne·s et les décideurs peuvent maintenir, améliorer, réparer et nourrir la confiance envers la régulation et la gouvernance ?

Dans le cadre du projet Trust in Governance and Regulation in Europe (TiGRE) financé par l’UE, Martino Maggetti et Yannis Papadopoulos, tous deux Professeurs à l’Institut d’études politiques, coordonnent un consortium de 9 universités afin d’étudier les conditions et les effets de la confiance dans les régimes de régulation (https://www.tigre-project.eu/), en déployant une étude comparative à large échelle entre pays – Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, Israël, Norvège, Pays-Bas, Pologne, et Suisse – et domaines de politiques publiques – protection des données, finance, sécurité alimentaire.

L’équipe TiGRE a distingué deux niveaux d’observation. Le premier concerne la confiance accordée aux acteurs de la régulation par les personnes extérieures au régime, telles que les citoyens et les médias. Le second niveau analyse les relations de confiance entre les acteurs internes aux régimes: législateurs, exécutifs, régulateurs, tribunaux, intermédiaires, entreprises réglementées, et groupes d’intérêt. Plusieurs méthodes ont été utilisées pour parvenir à une compréhension globale de ces relations, notamment des enquêtes à grande échelle, des entretiens, des expériences, l’analyse des réseaux sociaux, des groupes de discussion et l’analyse du contenu des médias.

Les résultats empiriques indiquent des niveaux de confiance relativement élevés à l’égard des régimes de régulation et au sein de ceux-ci. Par exemple, les citoyen·ne·s ont tendance à percevoir les agences de régulation comme plutôt dignes de confiance. De même, la confiance entre les acteurs internes aux régimes reste, en moyenne, assez élevée dans tous les secteurs politiques et dans tous les pays. Toutefois, il n’est pas forcément souhaitable de maximiser la confiance du fait que la coexistence de la confiance et d’une certaine « méfiance fonctionnelle », et plus particulièrement l’attitude à « faire confiance mais vérifier », incitent les acteurs à se soucier de leurs performances.

L’équilibre entre la confiance et la vigilance permet de maintenir des régimes de régulation stables et efficaces. Une confiance aveugle pourrait être préjudiciable et conduire à la capture réglementaire, une théorie qui suggère que les agences de régulation peuvent finir par donner la priorité à des objectifs autres que l’intérêt public. D’autre part, une trop grande méfiance peut conduire à l’érosion de la légitimité du régime de régulation.

L’analyse TiGRE suggère qu’en cas de crises et scandales, les régulateurs ne sont pas impuissants mais peuvent choisir des stratégies appropriées pour maintenir ou améliorer la confiance dans les régimes de régulation et la gouvernance démocratique. Plutôt que de garder le silence ou de rejeter la responsabilité sur autrui, il est plus efficace, en tant que stratégie de rétablissement de la confiance, que les agences répondent aux critiques concernant l’échec de la régulation en admettant le problème, en expliquant ses causes, en s’excusant de leur responsabilité et en essayant d’apprendre de leurs erreurs. La conception institutionnelle des régimes de régulation peut aussi être revue et améliorée, en ce qui concerne quatre qualités démocratiques majeures : la participation, l’inclusivité, la responsabilité, et la transparence.

Dans la suite de projet TiGRE, plusieurs initiatives sont prévues pour poursuivre cet agenda de recherche, comme par exemple la participation du Prof. Martino Maggetti au projet ERC RegTrust de David Levi-Faur, politologue et universitaire israélien spécialisé dans l’économie politique comparée et les politiques publiques, la réglementation et la gouvernance, affilié à l’Université hébraïque de Jérusalem.

Prof. Martino Maggetti, pour l’équipe TiGRE