Flora Bayard

Sociologie des céramistes d’art en France.
L’invention d’un groupe socio-professionnel : pratiques et manières d’être

Flora Bajard est titulaire d’un master en sociologie politique et expertises culturelles ainsi que du diplôme de Sciences Po, tous deux obtenus à l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse. Elle a réalisé sa thèse sous la direction de M. Marc Perrenoud (ISS, LABSO), et est actuellement attachée temporaire d’enseignement et de recherche à l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse.

Cette thèse voudrait expliquer l’émergence et l’autonomisation d’un groupe professionnel récent en France, celui des céramistes d’art, « inventé » au milieu du XXe siècle et qui s’est largement développé après 1968. Il s’agit d’analyser l’apparition d’un groupe social dans la division du travail, puis sa capacité à assurer les moyens de sa reproduction et de sa pérennisation, tant par l’étude de ses dynamiques internes que par ses rapports à l’hors-groupe. Or, la thèse a montré que les normes professionnelles – émergentes, codifiées, transmises, défendues ou contestées – constituent à la fois le liant du groupe et le révélateur de ses transformations, clivages internes et modes d’institutionnalisation. Cette recherche prend ainsi pour objet la professionnalisation de cet espace du travail artistique peu légitime culturellement, et les obstacles à celle-ci (définition des frontières, contrôle des pratiques).

Dans cette optique, la recherche restitue la diversité des dimensions du métier en combinant travail et hors-travail : sociogenèse, rapport des céramistes d’art au travail artistique et à la culture légitime, engagement dans les organisations professionnelles (associatives et syndicales), réception des politiques publiques qui concernent le secteur. La thèse réaffirme ainsi la centralité du travail comme espace au carrefour de plusieurs espaces sociaux et de plusieurs types d’investissements, c’est-à-dire comme un rapport social général et non comme enclave sociale que l’on pourrait appréhender par elle-même. Elle montre aussi que l’hybridité constitutive du métier, entre art et artisanat, constitue l’une des bases de sa professionnalisation : la contestation des principes et des critères de légitimité culturelle en sont les manifestations majeures. Enfin, l’étude de la politisation chez les différentes unités générationnelles qui composent le métier met en évidence la portée instituante de l’auto-organisation associative, ainsi que la présence en filigrane de l’État, par opposition ou par coopération. Tels sont les multiples fondements de cette professionnalisation multi-située.

Cette recherche repose essentiellement sur des observations – directes et participantes – dans les lieux de vie, de travail et de socialisation des céramistes d’art, ainsi que sur 62 entretiens semi-directifs. En plus de l’enquête ethnographique, la thèse s’appuie sur les résultats d’une enquête par questionnaire (218 répondants) et de la documentation professionnelle (archives syndicales, compte-rendu associatifs, supports de communication, etc.).