Social Mobility in 20th Century Switzerland
Après avoir fait un master sur les méthodologies d’enquêtes pour les sciences sociales à l’Université de Lille 1 et avoir notamment travaillé à Paris et Londres en tant que chargée d’études, Julie Falcon est devenue assistante à l’UNIL au Centre de recherche sur les parcours de vie et inégalités (LINES), où elle a réalisé sa thèse et collaboré à l’enseignement de stratégies de recherche en sciences sociales. Elle vient d’obtenir une bourse FNS early post-doc mobility pour le projet « Individual and societal returns to Vocational Education and Training in a changing world: A stepping stone or a trap? » qu’elle réalisera à l’Université de Stanford et au Social Science Research Center Berlin (WZB) en 2014-2015.
L’étude de la mobilité sociale permet d’évaluer dans quelle mesure une société donnée est « ouverte ». S’intéresser à cette question est particulièrement crucial dans nos sociétés démocratiques, où il est attendu que la place des individus ne soit plus déterminée à la naissance, mais plutôt par les qualités individuelles. La présente étude examine cette question dans le cadre de la Suisse, un pays aux caractéristiques institutionnelles spécifiques, de par le lien étroit que son système éducatif entretient avec le marché du travail.
A travers une analyse empirique détaillée, fondée sur des analyses statistiques robustes menées à partir d’un jeu de données unique construit sur-mesure, je démontre que la société suisse n’est pas devenue plus ouverte au cours du XXe siècle. Même si certaines barrières ont perdu de l’importance, dans son ensemble, la société suisse est restée extrêmement rigide. En particulier, parce qu’il oriente très tôt les individus dans des filières fortement segmentées, son système éducatif n’atténue pas les différences entre milieux sociaux. Ainsi, la Suisse se trouve dans une configuration singulière : la place d’un individu dans la société est hautement déterminée, d’une part, par son niveau d’étude et, d’autre part, par son origine sociale. En d’autres termes, la Suisse apparaît comme une sorte de « méritocratie non-méritocratique ».