Dans son nouveau roman Les Petites Musiques, Roland Buti met en scène un drame familial au cœur de l’industrie de fine mécanique vaudoise, montrant des personnages pris au piège par des dynamiques sociales et industrielles. La narration suit, sur plusieurs années, les membres d’une famille recomposée qui fait face à divers conflits et qui tente désespérément de rester intacte. Un enjeu central du récit se manifeste dans la manière dont les personnages négocient avec les conditions externes et les attentes internes à la famille, parfois en privilégiant une sphère et en négligeant l’autre. La grande précision avec laquelle le contexte politique et industriel vaudois du XXe siècle est abordé représente une force indéniable du texte : l’auteur – historien spécialiste de l’époque contemporaine – met son expertise du sujet au profit de son récit.
Alors que la combinaison des notions de recomposition familiale et de multiculturalité pourrait créer une certaine tension dans le récit, le roman ne met ces thèmes en lien que ponctuellement. Par conséquent, il ne permet pas une discussion approfondie sur l’importance relative de l’identité culturelle dans ces contextes. Loin d’être un cas isolé, cet effleurement se reproduit tout au long du roman avec une multitude de thèmes : la brièveté du texte indique sans doute que son auteur a fait le choix d’évoquer différentes thématiques, là où d’autres auraient voulu les traiter plus à fond.
Mélodie complexe en plusieurs mouvements, ce roman donne aussi à entendre une légère dissonance. En effet, à la façon dont les personnages veulent « vivre par petits bouts » (p. 174), le texte ne livre parfois que quelques morceaux d’un concert plus ample. Nous restons ainsi sur notre faim, après avoir espéré un peu plus de force dans la lecture d’un texte autrement agréable, riche et nuancé.