Yoann Provenzano

Au-delà de la caricature

Ce qui le motive: provoquer le rire juste pour le rire. Il débute sur les réseaux sociaux et affine sa plume durant ses études à l’Unil. En 2019, le rigolo de la classe devenu humoriste sera sur scène en Suisse romande avant de brûler les planches à Paris avec un spectacle intitulé Vie. Retour sur ses années à l’Unil.

«Je revendique la légèreté. Il ne faut pas avoir fait 30 ans d’études pour comprendre ce que je fais. C’est voulu. Je veux provoquer le rire juste pour le rire.» L’humoriste Yoann Provenzano, 27 ans, c’est ce gars tout simple, à l’aise dans ses baskets blanches, casquette vissée sur la tête. Une véritable «mitraillette burlesque», comme l’avertit sa description Instagram (@mydudeness). Il est connu pour ses imitations de personnages, diffusées en vidéos sur les réseaux sociaux: MC Terkuit, l’Albanais qui fait du tuning auto, André Delacrottaz, le plouc à casquette PMU et accent plus que vaudois, ou encore la racaille sentimentale en survêt’. Il sévit aussi sur les ondes de Couleur 3, dans l’émission Les bras cassés, pour laquelle il narre, façon cocasse, des tranches de vie de jeune adulte lambda.

Assis sous un soleil timide sur l’un des bancs à côté de l’Amphimax, l’ancien étudiant en Lettres à l’Unil raconte : «À l’école, j’étais le rigolo que le prof aimait bien, fatigant à la longue mais sympa, qui faisait bien attention à ce que tout le monde entende ses gags.» Le passionné de foot a commencé à se faire connaître sur la Toile, avec ses vidéos d’imitations, réalisées pendant une année sabbatique en 2013 après le gymnase. Il n’a jamais suivi de cours de théâtre. Le gamin de Villeneuve s’est nourri des accents qu’il entendait dans le restaurant de son papa italien. «J’ai grandi au milieu de cette Suisse multiculturelle, que j’essaie de représenter dans mes vidéos», explique Yoann Provenzano, qui vit maintenant à Vevey.

Le jeune homme entame en 2014 un bachelor en Lettres à l’Unil, anglais et français, qu’il termine en 2017. «Comme j’étais en Lettres, j’avais du temps (rires)! Les cours de méthodologie m’ont appris à « bien travailler » et à être organisé. J’ai aussi pu affiner ma plume.» Il développe sa carrière d’humoriste pendant ses études et se fait un nom en terres vaudoises puis romandes. Premier sketch au Montreux Comedy Festival en 2015, interventions sur Rouge FM, premier spectacle Seul(s) dans ma tête en 2016, participation à l’émission Mauvaise langue de Thomas Wiesel, spots publicitaires… Les succès s’enchaînent.

Si Yoann Provenzano n’avait pas conquis le Web et les planches, il aurait fait prof. «Mon public n’aurait pas payé et aurait été obligé d’être là tous les matins», rit-il avant d’ajouter: «Je trouve que l’humour a une incroyable force pédagogique. Comme le prof, l’humoriste raconte les choses de la vie depuis une autre perspective.»

Le thème de perspective se retrouve dans le spectacle intitulé Vie qu’il est en train de préparer avec l’aide d’amis humoristes. Il le jouera sur les scènes romandes, et même parisiennes, dès septembre 2019. «Pendant une heure et demie, le public assistera à une vie condensée, avec ses étapes-phares de l’enfance à la vieillesse en passant par l’adolescence. Il n’y aura aucun artifice, aucun déguisement. Ce sera juste à travers le regard que je vais porter sur les choses de la vie que je vieillirai sur scène», explique l’humoriste, qui cherche à se distancier de ses personnages caricaturaux et à montrer qu’il a une plume. «Je ne veux pas rester catalogué comme le type qui imite bien l’Albanais.»

Yoann Provenzano lorgne du côté de Montréal. «Les mecs là-bas sont forts en stand-up. Si un jour j’arrive à me faire une place auprès de ces humoristes… Ce serait une victoire phé-no-mé-nale!», s’exclame le Veveysan. Sinon, il évoque la possibilité de revenir sur les bancs de l’Unil pour un Master en Lettres… dans un futur plus lointain que proche.


LES QUATRE QUESTIONS ALUMNIL

Votre lieu préféré à l’Université durant vos études?

J’adorais La Banane. Quand j’y allais, ça symbolisait que j’allais travailler et apprendre de nouvelles choses.

Le cours/séminaire où vous retourneriez demain?

Le dernier cours ou séminaire de l’année. J’y retournerais direct ! Si j’obtiens mes crédits à la fin, je le fais toute ma vie, même (rires).

Un conseil aux étudiants actuels?

Si la clé donnée par le prof pour Moodle ne fonctionne pas, c’est qu’il faut l’écrire en majuscules.

Votre devise préférée?

«Après la pluie, le beau temps.» On galère, on galère et à la fin, on voit le nuage qui se dégage. C’est simple mais vrai! Vous vous attendiez à un truc à la Paul Éluard, du style «Paris dans les années 30 ressemble à un lampadaire aigri qui ne s’illumine que lorsqu’on le lui demande»?

Témoignage à retrouver dans le n°71 d’Allez savoir!

Article de Noémie Matos
Photo: © Pierre-Antoine Grisoni/Strates