Samuel Grandchamp

L’économiste du septième art

Samuel Grandchamp est un réalisateur genevois passionné de cinéma, dont le court-métrage Le Barrage a remporté le Léopard d’or du meilleur court-métrage suisse au Festival de Locarno en 2015. Formé à la NYU Tisch School of the Arts, il puise son inspiration dans un cinéma réaliste et intimiste, tout en mettant à profit son esprit analytique et entrepreneurial hérité de ses études en économie.

A l’heure où nous le rencontrons dans un café genevois, Samuel Grandchamp passe quelques jours dans sa ville natale pour réaliser un documentaire sur la musique baroque. «Nous avons suivi un orchestre préparant une tournée sur la Messe en si mineur de Bach.» La musique, il connaît bien. Certificat du Conservatoire en percussions, puis en batterie. Il touche à tout: classique, rock, jazz. Aujourd’hui, il s’adonne à la guitare. «C’est plus discret quand on vit au centre-ville de New York», concède, amusé, l’ancien étudiant en HEC.

C’est cependant une autre forme d’art qui porte désormais Samuel Grandchamp sur le devant de la scène: le cinéma. A 25 ans, le réalisateur a remporté le Léopard d’or du meilleur court-métrage suisse au Festival international de Locarno 2015. Son film, intitulé Le Barrage, relate le road trip d’un père et d’un fils, à la découverte de la Grande-Dixence. L’histoire d’une famille éclatée. Même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’une autobiographie, le jeune homme avoue, avec franchise, que le scénario fait écho aux relations parfois compliquées avec son propre père, cinéaste et photographe. Cette œuvre de fiction, une manière de renouer avec la figure paternelle à travers la passion partagée qu’est le cinéma.

Initié très jeune à la culture de l’image, le Genevois réalise le premier de ses quatre courts-métrages en 2009. Caméra au poing, le gymnasien dresse le portrait d’Arta-mis, haut lieu de la culture alternative alors en perdition. Le documentaire sera plusieurs fois primé. Malgré une maturité en physique et application des maths, Samuel Grandchamp n’embrassera pas la carrière d’astronaute dont il rêvait enfant. «Mon côté analytique vient de mon oncle, physicien de formation, dont je suis très proche.»

Il se lance dans des études en économie politique à l’UNIL. «En première année, c’était la guerre.» A chaque éclat de rire, sa tignasse hirsute virevolte. Il garde un excellent souvenir de son investissement au sein du comité des étudiants HEC. «J’ai adoré ajouter un côté associatif à ma vie estudiantine.» Mais le cinéma n’est jamais bien loin. C’est durant son séjour à Lausanne qu’il achève son second court-métrage, avant de partir terminer son bachelor à Barcelone. Diplôme en poche, il se lance à la conquête de New York, «un rêve de toujours». Il achève actuellement un master en réalisation à la NYU Tisch School of the Arts.

On le questionne sur son parcours atypique. «Si c’était à refaire, je ne changerais rien! HEC m’a permis d’acquérir une capacité entrepreneuriale essentielle dans le monde du cinéma. Réaliser un film, c’est comme créer une start-up.» Les mots sont posés et choisis, toujours. Ils contrastent parfois avec une gestuelle nerveuse.

Cette année, le cinéaste s’est vu décerner la Martin Scorsese Young Filmmakers Scholarship. Un honneur puisque le réalisateur de Taxi Driver et des Affranchis inspire tout particulièrement le jeune artiste. «Ces deux films sont de vrais chefs-d’œuvre, mais esthétiquement, je suis beaucoup plus proche des frères Dardenne. Leurs fictions s’apparentent presque à des documentaires.» Un cinéma réaliste et, surtout, intimiste, cher à Samuel Grandchamp. Son avenir, il l’imagine entre New York et la Suisse. Il prépare actuellement son premier long métrage, l’adaptation d’un livre d’un écrivain genevois.


LES QUATRE QUESTIONS ALUMNIL

Votre lieu préféré à l’Université durant vos études?

En tout cas pas la Banane (rires)! Si je devais retenir un lieu, ce serait le bureau du comité des étudiants HEC, à l’Internef. Nous y avons passé des soirées mémorables, c’était en quelque sorte notre QG. Je garde un excellent souvenir de mon activité au sein de cette association.

Le cours/séminaire où vous retourneriez demain?

J’ai adoré les cours d’Yves Pigneur qui proposait une approche très originale du Business Model et de l’entreprenariat. Il nous donnait vraiment envie de créer! J’appréciais aussi les cours d’économie politique, en particulier la macroéconomie.

Votre devise préférée?

«Il faut finir ce qu’on commence.» Même si le résultat n’est pas toujours utile ou s’apparente à un échec, le processus constitue toujours un apprentissage essentiel. Je suis convaincu qu’il faut aller au bout de ses initiatives. Au final, il y a forcément quelque chose de bon à prendre.

Un conseil aux étudiants actuels?

Il ne faut pas entrer dans le moule simplement pour se sentir en sécurité. Au risque de paraître un peu banal, je leur conseille vraiment de faire ce qu’ils aiment. C’est comme cela que l’on est heureux. Et c’est en étant heureux que l’on devient le meilleur dans ce que l’on entreprend.

Témoignage à retrouver dans le n°62 d’Allez savoir!

Article de Mélanie Affentranger
Photo: Photographié à New York où il vit actuellement.© Aline Paley