Isabelle Liardet

Isabelle Liardet

Isabelle Liardet, l’esthétique du geste

À la plus grande surprise de ses parents non-sportifs, la Payernoise d’origine s’est toujours émancipée dans le mouvement. Après un brillant cursus en latin, histoire ancienne et sports, l’enseignante de vocation est aujourd’hui professeure de sports au sein de l’Institut des sciences du sport de l’Université de Lausanne (ISSUL) et membre de la direction du service Sport Santé de l’Unil et de l’EPFL. Retour sur le parcours d’une hyperactive.

Il y a ce débit de parole; fluide, rapide, énergétique. Il aurait pu traduire cette anxiété chez celles et ceux qui vont à confesse chez le journaliste. Isabelle Liardet, maître de sports au sein de l’Institut des sciences du sport de l’Université de Lausanne (ISSUL) et membre de la direction du service Sport Santé de l’Unil et de l’EPFL semble n’avoir peur de rien. Si sa voix s’emballe, c’est pour mieux canaliser une personnalité hyperactive, entière et volontaire, dont le bien-être se niche dans le mouvement. C’est d’ailleurs lui qui l’a façonnée depuis petite.

Pour cette Payernoise d’origine, qui a grandi à Crissier, les premiers souvenirs respirent d’ailleurs l’extérieur. Son quartier en bordure de forêt devient son terrain de jeu: «Je sortais tout le temps, j’aimais beaucoup bouger.» À la plus grande surprise de ses parents, «qui ne sont pas du tout sportifs», Isabelle Liardet s’émancipe dans la démultiplication des activités physiques; du ski de piste comme de fond lors de vacances dans le chalet familial de La Lécherette, de la randonnée, du kitesurf et de l’escalade. Pourtant, la vocation sportive est venue sur le tard.

Car c’est d’abord dans des études de latin, au collège de Chavannes-près-Renens qu’Isabelle Liardet s’illustre. Son frère est un doué matheux. Elle brille de son côté dans les textes anciens. C’est au cours de cette scolarité studieuse et sans problème qu’Isabelle Liardet découvre la danse. Une discipline qui la marque, tant «elle allie l’esthétique du geste à la performance sportive.» Isabelle Liardet poursuit son cursus sans fautes au Gymnase du Bugnon. Puis c’est le grand saut sur les bancs de l’Université de Lausanne.

En débarquant sur le campus de Dorigny, Isabelle Liardet se cherche. Ou plus précisément, elle ne cherche rien: «Tout était ouvert et tout m’intéressait.» Elle démarre ainsi par une première année en anglais et en HEC, avant de retrouver ses premiers amours; le latin et l’histoire ancienne: «J’aimais bien l’articulation de ces deux branches. J’ai pris beaucoup de plaisir dans ces études, sans plan de carrière.» Cette dernière se dessine pourtant. En parallèle de ses études, Isabelle Liardet effectue des remplacements dans l’enseignement. Elle découvre aussi la faculté des Sports de l’Unil et sa formation.

Sa demi-licence en poche (Bachelor), Isabelle Liardet se lance dans ce cursus. Elle termine 2e à l’issue d’un concours d’entrée très sélectif et figure parmi les 30 élu·es de cette formation très axée sur la pratique des sports: «Il n’y avait pas tout le pan sociologique du sport comme aujourd’hui, se rappelle Isabelle Liardet. Elle se souvient «d’une année fabuleuse au sein de la grande famille des sportifs.» À l’issue de cette formation, Isabelle Liardet enseigne le sport, le latin et l’histoire ancienne au Secondaire I. Elle poursuit en parallèle la rédaction de son mémoire en Lettres sur la position sociale de la femme au IIIe siècle.

À quelques semaines de terminer son travail universitaire, Isabelle Liardet s’inscrit à l’École pédagogique (ex-Haute-école pédagogique). Nous sommes au printemps. Elle apprend dans l’intervalle qu’elle a un poste d’enseignante au mois d’août, au collège de Villamont, à Lausanne: «Que cela soit pour le latin, le sport ou l’histoire, j’ai adoré enseigner à des élèves dans des situations très variées.» En 1998, après trois ans d’enseignement, Isabelle Liardet se consacre pourtant à sa vie privée. Elle se marie et fait deux enfants, mais ne met pas pour autant sa carrière professionnelle en stand-by puisqu’elle démarre l’enseignement du ski à l’ISSUL.

C’est au début des années  2000 qu’Isabelle Liardet signe son grand retour dans l’enseignement. Cette fois, au Gymnase Auguste-Piccard, qui compte des classes d’élites. Elle se sent comme un poisson dans l’eau durant près d’une décennie. Mais un ami, Pierre Pfefferlé, connu sur les bancs de la HEP et qui travaillait au service des sports universitaires, lui fait des appels du pied en 2013 pour devenir maître de sports à l’Unil et à l’EPFL. Elle hésite, puis se lance et ne regrette rien: «Mon métier me plaît beaucoup, même si je suis assez peu sur le terrain. Je garde tout de même 4h d’enseignement. Je me suis formée au yoga. Je l’enseigne toujours. Ainsi que le ski et l’escalade. Je suis également responsable de certaines disciplines comme l’aviron ou l’escrime. C’est davantage une fonction de manager qui veille à ce que l’offre de cours soit adéquate.» Une autre manière de vivre le sport.

Lausanne, le 15 septembre 2025

Article de Mehdi Atmani
Portrait dIsabelle Liardet © Felix Imhof