Hazbi Avdiji

L’expertx en diversité et inclusion

Docteurx en systèmes d’information (HEC), expertx en diversité et inclusion et spécialiste en gestion d’entreprise, Hazbi Avdiji est sur tous les fronts! Aujourd’hui, ses engagements professionnels vont de l’enseignement dans les écoles de gestion de la région lausannoise à des mandats de conseil et de formation en entreprise. Ses activités ont pour point commun son intérêt pour les questions de diversité et de discrimination d’une part, et pour la responsabilité des entreprises de l’autre. Des thèmes qui, souligne-t-iel, «me tiennent à cœur, correspondent à mes valeurs et s’inscrivent, heureusement, dans les objectifs des Nations-Unies visant à répondre aux besoins des populations et de la planète».

Doctorantx, activiste et artiste

Tout au long de son parcours, les orientations militantes et académiques prises par Hazbi sont marquées par ses questionnements identitaires, ellui qui se définit aujourd’hui comme «unx transfuge de classe, issux de la migration et queer».

Au moment d’entreprendre des études, Hazbi opte pour un Bachelor en management, un choix motivé par le fait qu’iel vient d’un milieu modeste et vise alors une formation qui lui assurera un emploi ainsi qu’une bonne rémunération. Iel poursuit ensuite avec un master en systèmes d’information à la fin duquel iel se voit proposer de faire un doctorat. Iel hésite: «Je savais qu’après le doctorat, il n’y avait pas forcément beaucoup de portes qui s’ouvraient. J’avais conscience que c’était un environnement compétitif et que le professorat n’était pas du tout assuré derrière. Et je ne voyais pas comment valoriser un doctorat par ailleurs. Lors de mes stages en entreprise, j’avais entendu ces rumeurs de couloir selon lesquelles il vaudrait mieux avoir un master et cinq ans d’expérience qu’un master et cinq ans de doctorat».

Après en avoir longuement discuté, avec sa future directrice de thèse et avec les membres de son entourage, Hazbi décide finalement de se lancer: «C’est surtout une discussion avec une personne de l’entreprise où j’étais alors en stage qui m’a permis de me décider. Elle avait regretté de ne pas avoir fait de doctorat, et comme c’était une personne pour qui j’avais beaucoup de respect, cela a contribué à me convaincre. Et je n’ai pas regretté!».

Actifx depuis longtemps déjà dans les milieux associatifs et culturels queer, Hazbi saisit l’occasion de son doctorat pour faire connaître son activisme dans son environnement académique: «Mes études et mes activités militantes et artistiques étaient deux choses que je gardais très séparées. J’utilisais même des alias ou ce type de choses. Et ce n’est que lors de mon doctorat que j’ai décidé de parler de ces activités à ma directrice de thèse et mes collègues. C’est aussi à ce moment que je suis devenux unx interlocuteurx de référence pour les questions queer et que j’ai connu un certain retentissement médiatique. Je me suis dit qu’il fallait être honnête si mes collègues tombaient sur mes interventions dans les médias. Et de fait, par la suite plusieurs sont venu·es me dire ‘Super ton interview !’. Cela m’a apporté une légitimité et m’a permis de combiner les deux mondes, d’être la même personne partout».

Créer ses propres opportunités en freelance

Après son doctorat, Hazbi entame un postdoc en Suisse alémanique, «un peu parce qu’il n’y avait rien d’autre sur la table, et parce que j’avais très envie d’habiter à Zurich», dit-iel. Mais iel ne poursuivra pas longtemps dans cette voie: «Il n’y avait pas assez d’opportunités. C’est un peu comme acheter un ticket d’Euromillion et se projeter avec tout cet argent. C’était de ce tordre-là. Et je ne voulais pas partir de Suisse pour le professorat. J’avais beaucoup trop de choses à vivre avec des personnes ici. Et puis, je n’étais pas agrippéx au schéma ‘je fais mon doctorat, puis mon postdoc, puis mon tenure-track pour espérer être professeurx ordinaire à 40 ans’. Ce n’était qu’un chemin possible parmi d’autres».

De retour à Lausanne, Hazbi ambitionne de valoriser son doctorat et son expérience d’activiste pour se lancer dans des projets qui lui tiennent à cœur, mais cette fois en étant rémunéréx: «Je connaissais plusieurs personnes qui avaient un doctorat et travaillaient dans le consulting, dans le conseil. Et je me suis dit que c’était quelque chose que je pouvais faire si je quittais le milieu académique».

Mais se lancer dans un tel projet ne va pas de soi et il faut commencer par surmonter ses propres craintes: «Ça ne sert à rien de se poser toujours la même question: est-ce que je vais réussir à trouver un emploi ou non ? Il ne faut pas se créer des angoisses avant l’heure. Il vaut mieux se dire: maintenant je me lance, et on verra bien. C’est quelque chose que j’ai appris pendant mon doctorat. C’est inutile de faire un plan trop précis, car on ne peut pas tout prévoir.

Il faut commencer petit, expérimenter et avancer par étapes. Ça m’a beaucoup aidé de voir les choses comme ça, d’avancer sur une semaine, puis sur un mois, sans me projeter trop loin. Et puis, la spiritualité et un accompagnement thérapeutique sont aussi des ressources utiles dans les moments difficiles».

Engagéx dans l’aventure, Hazbi décroche ses premiers mandats de consultant. Mais l’épidémie de Covid-19 interrompt brutalement son élan et iel se retrouve temporairement au chômage. Une période à nouveau difficile, se souvient Hazbi, mais dont iel ressort «tel un phénix qui renaît de ses cendres»: «Suite au déconfinement, il y a eu un intérêt grandissant des entreprises pour les questions d’inclusion et d’exclusion sociale. Ça a fait un boom, au point que j’avais même trop de travail, et c’est encore le cas maintenant!».

Hazbi développe ses activités à travers ses propres démarches et grâce à son réseau associatif: «J’ai toqué aux portes des écoles de gestion et tout le monde a répondu positivement. Mon expérience dans le travail associatif et le fait que j’avais un doctorat m’ont permis d’être reconnux comme une personne compétente pour enseigner sur ces sujets. Et en parallèle, j’ai obtenu de nombreux mandats avec des entreprises grâce au bouche-à-oreille. Je connaissais beaucoup d’associations et celles-ci renvoyaient vers moi les entreprises qui les contactaient».

Vers une vie professionnelle plus stable

S’iel en apprécie la variété, Hazbi souligne que le caractère imprévisible et à court-terme de ses différents engagements lui pèse: «C’est tout par vagues. Quand il y a un creux, c’est la peur complète de ne plus avoir de revenu et que tout va s’arrêter. Et à d’autres moments, il y a vraiment trop. J’ai de temps en temps un projet sur le plus long terme auprès d’entreprises ayant une volonté stratégique d’être plus inclusives. Mais le plus souvent, je suis mandatéx pour des interventions ponctuelles, régler une situation, assurer une médiation, donner une formation au personnel des ressources humaines».

C’est pourquoi Hazbi aspire aujourd’hui à réduire la part de ses activités d’indépendant afin d’occuper en parallèle une position stabilisée en lien avec ses domaines d’expertise. Son autre objectif professionnel à court terme consiste à recentrer ses activités autour de la formation, en entreprise et dans les écoles de gestion, mais en y ajoutant un troisième public: celui des écoliers et écolières, également concerné·es par les enjeux de diversité et inclusion.

Les compétences acquises dans le cadre du doctorat et leur utilité actuelle

La maîtrise de l’information
Je sais où aller chercher l’information, comment la vérifier ou l’infirmer, comment réfléchir. Thèse, antithèse, synthèse, le doctorat permet d’appliquer ça de manière très compétente. Autour de moi, quand des personnes sont un peu déconcertées, je peux fournir des références et faire des résumés, et le faire de manière rapide. C’est très utile dans le contexte actuel, avec toutes ces fakenews, théories du complot et propagande en ligne.

L’esprit critique
Comprendre, quand on aborde un sujet, comment il a été construit, quelle est son histoire, comment le déconstruire et comment le penser différemment, est une compétence importante dans mon travail actuel. J’ai développé mon esprit critique aussi bien dans le cadre de mon doctorat, qui s’inscrivait dans des approches critiques, que dans celui de mes engagements en tant qu’activiste.

Les compétences pédagogiques
J’ai suivi des cours de vulgarisation scientifique. Cela m’a donné des outils pédagogiques que j’utilise encore et dont certains sont même devenus des automatismes. Se mettre à la place de l’autre, prendre conscience du vocabulaire et des concepts que la personne possède et adapter les informations à son bagage, ce sont des choses que j’applique dans toutes mes activités, y compris lors des formations en entreprise.

Lausanne, le 28 juin 2023

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Photo: © Hazbi Avdiji, Géopolis, UNIL. © Shervine Nafissi.