Un pont entre la Suisse et la Chine

Le tout jeune China Economics and Finance Center, fondé en 2018, propose des formations sur mesure aux dirigeants de grands groupes chinois et des coopérations en recherches aux universités chinoises. Rencontre avec sa directrice, la professeure Minyue Dong.

Minyue Dong. Directrice du China Economics and Finance Center et professeure associée au Département de comptabilité et contrôle (HEC). Nicole Chuard © UNIL

En septembre 2010, Minyue Dong, aujourd’hui professeure associée au Département de comptabilité et contrôle à la Faculté des HEC, recevait un livre des mains de Jean-Claude Badoux, l’ancien président de l’EPFL. Dans sa dédicace, celui-ci la félicite pour son «efficacité à construire des ponts solides entre la Chine et la Suisse». Voilà qui n’a fait que conforter l’intéressée dans un projet qui lui trottait dans la tête depuis une bonne dizaine d’années: «Les Chinois et les Suisses sont culturellement proches. Néanmoins, depuis la politique de réforme et l’ouverture en 1978, le modèle économique chinois a été fortement influencé par les États-Unis», explique-t-elle. Ainsi, lorsqu’il s’agit de se former dans ces domaines, les citoyens de l’empire du Milieu tendent à s’inspirer des pratiques étasuniennes. «Mais, aujourd’hui, les Chinois et les Suisses sont bien plus complémentaires en économie et en affaires.» C’est ce qui, en 2018, a poussé la professeure Dong et la Faculté des HEC à fonder le China Economics and Finance Center (CEFC). Elle s’est entourée d’une petite équipe de deux personnes qui, comme elle, connaissent les deux terrains sur le bout des ongles. 

Le CEFC vise à devenir une plateforme d’échanges et de coopérations entre les universités et entreprises chinoises et suisses. L’activité du centre se déroule sur trois axes. Le premier est la formation. Des cours sur mesure sont offerts à des entreprises chinoises, en collaboration avec la Formation Continue UNIL-EPFL. 

Découverte de l’économie suisse

Les participants – généralement des cadres dirigeants – ont une ou deux semaines selon le module choisi pour s’initier aux principaux aspects de l’économie suisse et pour apprendre la gestion d’entreprise. Ils sont par exemple encouragés à réfléchir à l’intégration du développement durable dans leur management. Si, à leur arrivée, nombre d’entre eux sont convaincus que l’économie helvète tourne en grande partie autour du chocolat, des montres et des couteaux suisses – au mieux cite-t-on Nestlé –, leur passage au CEFC les amène rapidement à changer d’avis: «Ils découvrent que le tissu économique de notre pays est principalement formé de PME», souligne la professeure Dong. Ils apprennent aussi que les Helvètes sont un peuple très innovant et que les banques sont compétentes sous bien d’autres aspects que ce qu’il reste du secret bancaire. Les intervenants des cours sont des spécialistes de l’UNIL, notamment de la Faculté des HEC et de l’EPFL, ainsi que des intervenants externes. Des visites d’entreprises complètent le cursus. Pas question de faire du tourisme: le Gouvernement chinois est intraitable sur le respect du programme, qu’il tient à valider avant le début de chaque session. 

Dans le cadre d’échanges, le CEFC soutient les étudiants chinois qui souhaitent effectuer un séjour d’étude en Suisse. À l’issue de leur formation, ils présentent un travail réalisé en groupe. «L’un de ceux-ci consistait par exemple à esquisser des produits adaptés aux jeunes générations asiatiques pour deux sociétés suisses, Reuge et Maurice Lacroix», explique Minyue Dong. La consigne a été transmise aux étudiants deux mois avant leur stage. Ils ont pu présenter le résultat de leurs réflexions aux entreprises, après l’avoir affiné au fil de ce qu’ils apprenaient sur place. «Une opération gagnant-gagnant, puisque les sociétés ont été très intéressées par ces travaux, en phase avec le marché chinois», relève Minyue Dong. Les étudiants suisses qui désirent poursuivre leur carrière en lien avec la Chine ne sont pas oubliés. Le CEFC organise à leur intention une formation intitulée «Attestation sur la Chine».

Deuxième axe d’activité du CEFC, la recherche. À terme, l’idée serait d’en faire profiter les chercheurs et les professeurs des deux pays, facilitant les échanges entre la Faculté des HEC, l’UNIL et les meilleures universités chinoises. «Nous essayons de créer un environnement interdisciplinaire qui aide les chercheurs des deux pays en finance, management et technologie à travailler conjointement et à mettre les résultats de leurs recherches en pratique», explique-t-elle. Des conférences et séminaires sur ces thèmes concernés figurent également à l’agenda du CEFC.

Troisième et dernier axe d’activité visé par le CEFC, l’entrepreneuriat. «Nous souhaiterions contribuer au dialogue entre entrepreneurs suisses et chinois en secondant les industries clés en Suisse dans la coopération avec les secteurs qui sont à promouvoir vigoureusement en Chine à l’heure actuelle, tels que healthcare, biopharma et nouvelles énergies. D’autre part, nous aimerions épauler les compagnies chinoises désireuses de s’étendre en Europe», précise-t-elle. 

Pour décrocher ses premiers contrats, Minyue Dong a fait appel à son réseau à Beijing. La grande banque ICBC fut l’une des premières à répondre «présente». Les participants sont rentrés enchantés de l’expérience et le bouche-à-oreille a fait son œuvre. Depuis, cinq programmes de formations bancaires ont eu lieu. Un essor dont Minyue Dong n’est pas peu fière. C’est que ses concurrentes s’appellent Yale, Harvard, Oxford ou, plus près de nous, IMD.

Mais comment le tout jeune CEFC parvient-il à se distinguer d’aussi prestigieux adversaires? «D’abord, la Suisse incarne la réussite aux yeux des Chinois, grâce à sa qualité de vie élevée, son système politique stable, son souci de protéger l’environnement et son système éducatif solide.» À ceci s’ajoute le fait que les relations sino-suisses traversent une véritable période de lune de miel. 

Ensuite, grâce à leurs compétences académiques et leur compréhension de la culture chinoise, Minyue Dong et son équipe trouvent les réponses les mieux adaptées aux besoins de leurs partenaires chinois. Enfin, grâce à ses liens avec l’UNIL et l’EPFL, le CEFC dispose d’experts dans des domaines de pointe: finance, économie, gestion, biotechnologie, ou encore intelligence artificielle. Une combinaison de facteurs unique dans le secteur public suisse. /

unil.ch/cefc

Accompagner les demandes de réassignation sexuelle

Située au carrefour de la médecine, des sciences humaines et sociales, la dysphorie de genre soulève beaucoup de questions, qu’elles soient cliniques, épistémologiques ou éthiques. En augmentation ces dernières années, les demandes de réassignation sexuelle émanent en outre de personnes de plus en plus jeunes. 

La réassignation sexuelle implique différents corps de métier, du médecin de famille aux psychiatres, psychologues, infirmiers (scolaires également), endocrinologues ou pédiatres. Autant de praticiens qui ne sont pas forcément en mesure d’y répondre. C’est justement pour les y préparer que cette formation a été organisée par la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL ainsi que par les Services de psychiatrie de liaison et de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du CHUV. Elle se déroulera sur une journée, le 19 novembre, de 8 h à 18 h. Seul prérequis pour les 15 à 20 participants qui la suivront: s’intéresser à ces questions ou y être confronté. 

«Souvent, les soignants ne sont pas à l’aise avec ces personnes, car ils ignorent en quoi consiste leur parcours», souligne Dana Pamfile, cheffe de clinique adjointe du Service de psychiatrie de liaison. Rien d’étonnant à cela, puisque les évolutions ont été nombreuses ces dernières années dans le domaine, tant au plan social que médical.

Le but de cette journée est donc de proposer une vue d’ensemble des différentes étapes que traversent les personnes souhaitant une réassignation sexuelle, de l’émergence du vécu d’incongruence de genre à la fin des traitements, ainsi que des outils pour faire face à leurs demandes et besoins particuliers. 

«La matinée, centrée sur la clinique adulte, abordera la question sous l’angle de l’évaluation et de l’accompagnement psychiatriques. Des échanges et la présentation de deux situations cliniques complèteront les apports théoriques», résume Dana Pamfile. L’après-midi, consacré aux enfants et aux adolescents, inclut également l’analyse d’un cas clinique. «Traitements hormonaux et chirurgicaux ainsi que les aspects administratifs, juridiques et assécurologiques figurent au programme et un représentant du milieu associatif présentera l’offre d’aide que proposent les associationsde personnes concernées», souligne la docteure Pamfile. 

Les interventions seront assurées par des spécialistes universitaires; la responsabilité académique étant portée par Friedrich Stiefel, professeur et chef du Service de psychiatrie de liaison au CHUV et par Kerstin von Plessen, professeure et cheffe du Service universitaire de psychiatrie  de l’enfant et de l’adolescent (SUPEA). 

En fin de journée, les participants devraient disposer de connaissances leur permettant de poursuivre une réflexion sur leur pratique clinique pour mieux rencontrer et orienter les personnes présentant une dysphorie de genre./SU

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