La biologiste Cleo Bertelsmeier établit un lien entre la pandémie actuelle et la crise écologique.
Inutile d’élaborer des théories du complot pour expliquer l’origine de la Covid-19. «L’émergence d’un nouveau virus n’a rien d’étonnant en soi», souligne la professeure Cleo Bertelsmeier, chercheuse au Département d’écologie et d’évolution de l’UNIL. Elle est l’une des 120 scientifiques signataires d’une Opinion parue dans Le Temps, en mai dernier, qui font le lien entre la pandémie et la crise écologique. Comme ses collègues, elle constate que «notre mode de vie actuel contribue à l’émergence de ce genre de maladies».
L’empreinte de l’homme sur la nature
Les zoonoses naissent des contacts entre humains et animaux sauvages, soit directement, soit par l’intermédiaire d’animaux domestiques eux-mêmes contaminés. Si le phénomène s‘intensifie, c’est notamment à cause «de la fragmentation des habitats des espèces concernées». L’écologue met aussi en cause «l’intensification des élevages qui augmente la probabilité de transmission du virus, d’autant que la faible diversité génétique dans les grandes fermes rend les animaux plus sensibles aux maladies».
À cela s’ajoute, selon elle, l’extinction des grands prédateurs. «Leur élimination ne conduit pas seulement à la réduction de la biodiversité des espèces. Elle permet aussi à leurs proies, par exemple les rongeurs, de se multiplier. Là encore, cela favorise la transmission des pathogènes.» Quant au changement climatique, «il favorise le déplacement d’espèces vers des régions tempérées». Lorsque de nouvelles infections émergent, elles donnent de plus en plus rapidement naissance à des épidémies qui se transforment aussitôt en pandémies en raison de «la mondialisation et de la globalisation des transports et des échanges de marchandises».
La professeure sait de quoi elle parle, elle qui étudie l’impact de ces phénomènes sur la dispersion des insectes invasifs à travers la planète. «Les insectes ne sont pas les seuls en cause. Les échanges concernent aussi de nombreuses espèces animales et végétales, ainsi que les humains», dit-elle en évoquant, à titre d’exemple, les foules de personnes qui se côtoient dans les grands aéroports.
Une priorité politique
Si l’on veut limiter l’émergence de nouvelles épidémies et pandémies dans le futur, «il faut agir sur ces différents facteurs», souligne Cleo Bertelsmeier. «Lorsqu’il y a une crise, comme celle de la Covid-19, on réagit dans l’urgence. Il serait temps que le changement climatique et la préservation de l’environnement soient classés parmi les priorités dans les agendas politiques.» Afin de ne pas seulement gérer le présent, mais de se préoccuper aussi de l’avenir.
Article principal: La moitié des maladies infectieuses sont d’origine animale.