«Le tram est la condition sine qua non de la marche à pied!» Avec Jean-Bernard Racine, professeur honoraire de l’Université de Lausanne (UNIL), on tire le fil du tram et toute la pelote de la ville se dévide.
Voici ce grand connaisseur et défricheur de la géographie des cités qui se fait arpenteur des quartiers pour plaider inlassablement en faveur d’une «renaissance du goût de la ville», où la culture jouerait un grand rôle, avec des nouvelles valeurs urbaines qui apparaissent et qui ne sont pas (encore!) portées aux bilans comptables des pertes et pro- «Le tram permet une renaissance du goût de la ville» fits. Comme le «bonheur de l’aléatoire et de l’inattendu» sur le trajet d’un piéton ou d’un cycliste, en tout cas d’un adepte de la mobilité douce.
Tout un écheveau de réflexions concrètes – pourquoi, à Paris, les stations de métro sont-elles distantes de 500 mètres, alors qu’à Toronto, par exemple, 1500 mètres les séparent, et quelles sont les leçons à tirer de cette différence? – qui finissent par orienter une réflexion fondamentale.
Aujourd’hui, dans une perspective où le tram a évidemment toute sa place, l’enjeu principal, pour Jean-Bernard Racine, c’est l’émergence, à l’échelle de l’agglomération, d’une «nouvelle urbanité ». Il n’y a plus d’un côté «une ville dense et diverse» et de l’autre «une sorte d’urbain informe où tout est séparé et étalé».
C’est l’apparition d’un modèle de ville où des centres périphériques se développent en réseau («aréolaire»); ils sont «reliés par des corridors urbains desservis par des transports publics performants », ils peuvent acquérir, par exemple, une certaine autonomie culturelle et devenir attractifs pour toute une population qui ne se reconnaissait pas, jusque-là, dans la périphérie classique. La métamorphose de la ville contemporaine est à ce prix.
Laurent Bonnard