La vie cubaine du photographe Luc Chessex

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Chargé de cours à l’UNIL, Francis Mobio a réalisé un portrait du photographe Luc Chessex. Son film nous replonge dans le Cuba des années 60.

La révolution cubaine est en marche, 1961, le photographe vaudois Luc Chessex quitte Lausanne pour La Havane. Pendant près de quinze ans, il sera le témoin privilégié de l’évolution politique et sociale de l’île. En janvier 2013, il retourne à Cuba pour le vernissage d’une exposition de ses photos de l’époque, qu’il a offertes à un centre culturel de la capitale. Francis Mobio, chargé de cours en Anthropologie visuelle à l’UNIL, l’accompagne et réalise, caméra au point, un portrait du photographe: Mille trois cent vingt-cinq fois trente-six.

Mise en scène minimaliste
Les deux hommes font connaissance à l’Université de Lausanne, à l’occasion de la projection d’un autre documentaire de Francis Mobio. La suite, ils la construisent ensemble. Mille trois cent vingt-cinq fois trente-six ne correspond pas seulement au calcul qu’il faut effectuer pour obtenir le nombre de photos que Luc Chessex a réalisées à Cuba, «c’est également une véritable rencontre» entre deux hommes.

Fruit d’une démarche mi-ethnographique, mi-documentaire chère au réalisateur, le film n’a pas pour vocation de briller par son aspect technique. La mise en scène est minimaliste, ce qui ne fait que renforcer la relation qui unit Luc Chessex à ses interlocuteurs. Francis Mobio utilise sa caméra comme un outil permettant d’aller à la rencontre du photographe, «ne cherchant pas à faire un film sur lui, mais plutôt avec lui, en respectant sa relation à Cuba». Luc Chessex nous replonge dans sa vie des années 60. On y croise certains de ses amis, comme le photographe Enrique de la Uz qui, presque miraculeusement, a retrouvé sur les étals d’un marché l’appareil photo utilisé par Luc Chessex dans les années 60. Un modèle Alpa qu’il redécouvre non sans émotion, près de quarante ans après son départ de l’île. Des anecdotes avec Castro et des photos, oubliées dans un tiroir pendant des décennies, refont surface.

Le film regorge de conjonctions étonnantes puisque le Vaudois y retrouve, par hasard, ses compères de l’époque: Claude Champion et Jacques Pilet. Les trois acolytes évoquent un documentaire réalisé ensemble en 1980. Les deux films, Mille trois cent vingt-cinq fois trente-six et Quand il n’y a plus d’Eldorado, sont aujourd’hui réunis dans un coffret DVD: Por los caminos del mundo. / MA

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Issu d’un mémoire de master, le livre d’Alexandre Dafflon nous plonge dans un monde peu étudié, celui des jeunesses campagnardes. Cet assistant diplômé à la Faculté des sciences sociales et politiques s’est immergé depuis plusieurs années dans un milieu dont les fonctionnements échappent aux citadins. L’ouvrage est traversé par les parcours de vie de quatre membres de ces sociétés, aux profils très différents. Sans jugement de valeur, ni rien cacher de la question de l’alcool, le texte balaie un grand nombre d’idées reçues. / DS
Il faut bien que jeunesse se fasse! Ethnographie d’une société de jeunesse campagnarde. Par Alexandre Dafflon. L’Harmattan (2014), 258 p.

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L’ouvrage de Dominique Bourg, professeur à la Faculté des géosciences et de l’environnement, s’inscrit dans l’actualité des luttes, souvent violentes, qui se jouent en France autour du militantisme écologique. D’où vient-il? Quels courants de pensées le sous-tendent? Qu’est-ce que l’écologie politique? Du combat contre la pollution ou le nucléaire à l’opposition aux gaz et huiles de schiste ou aux OGM, l’ouvrage couvre une longue histoire. Il est enrichi d’incroyables documents, affiches, tracts et dessins, dont certains datent du XIXe siècle. / DS
Quand l’écologie politique s’affiche. 40 ans de militantisme graphique. Par Dominique Bourg. Plume de carotte (2014), 137 p.

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Très bien illustré, cet ouvrage collectif narre de manière détaillée l’histoire de l’église de Romainmôtier. Il traite aussi bien de la sculpture monumentale que des décors peints. Outre la présentation des résultats des recherches archéologiques, ce livre retrace en particulier les restaurations qui ont eu lieu tout au long du XXe siècle, et des nombreuses questions que ces interventions successives posent aux spécialistes, surtout lorsque l’on parle d’un bâtiment aussi admiré et aimé. / DS
Romainmôtier restaurée – 1991-2001. Par Brigitte Pradervand, Nicolas Schätti (dir.). Cahiers d’archéologie romande 145 (2014), 221 p.

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Le pionnier Rodolphe Archibald Reiss, fondateur de l’Institut de police scientifique de l’Université de Lausanne en 1909, constitue le fil rouge de cet ouvrage au graphisme soigné. Son travail sur plusieurs crimes et attentats commis dans le canton de Vaud au début du XXe siècle est détaillé, documents, expertises et photographies à l’appui. Spécialiste du domaine, l’historien Nicolas Quinche retrace ainsi la naissance de la police scientifique, et plus largement celle de l’identification par les traces.Une lecture passionnante. / DS
Experts du crime sur les bords du Léman. Par Nicolas Quinche. Nouvelles Editions (2014), 349 p.

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L’Expo 64 fait l’objet d’un ouvrage collectif, auxquels participent de nombreux chercheurs de l’UNIL. Né d’un colloque, mais très accessible, le texte couvre l’ensemble d’un «champ de tensions» qui n’a de loin pas été exempt de controverses: du pavillon hérissé de pointes installé par l’armée aux dispositifs cinématographiques, sans oublier un délicieux article sur les liens entre les Radicaux et l’Expo ou les aspects architecturaux et artistiques. Une iconographie souvent étonnante complète ce livre. / DS
Revisiter l’Expo 64. Par Olivier Lugon et François Vallotton (dir.). Presses polytechniques et universitaires romandes (2014), 438 p.

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Saint-Maurice célébrée

C’est l’établissement religieux le plus ancien d’Europe à être toujours en activité et il fête cette année ses 1500 ans. L’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune a été fondée en 515 et n’a, depuis, jamais fermé ses portes. Parmi les manifestations organisées pour célébrer son anniversaire, un livre à paraître ce printemps retrace la riche histoire du lieu. Dirigé par les chercheurs Bernard Andenmatten (UNIL), Laurent Ripart (Université de Savoie) et Pierre-Alain Mariaux (Université de Neuchâtel), l’ouvrage se compose de deux tomes, le premier consacré à l’histoire, l’archéologie et l’architecture de l’abbaye, le second à son trésor sacré.

«Ces dernières années, d’importantes recherches menées sur place ont permis de reconsidérer le passé de l’abbaye», explique Bernard Andenmatten, professeur à la section d’Histoire. Les archives ont ainsi fait l’objet d’un reclassement et d’une numérisation durant quinze ans, de nouvelles fouilles ont été organisées sur le site archéologique et le trésor lui-même est particulièrement étudié.

Constitué de reliques conservées dans d’admirables pièces d’orfèvrerie, c’est en effet «ce trésor qui fait principalement la renommée de l’abbaye de Saint-Maurice, ajoute le professeur Andenmatten. De nombreux visiteurs y faisaient halte sur la route de l’Italie, en passant par le Grand Saint-Bernard ou le Simplon.»

L’abbaye a néanmoins failli disparaître vers 1800. Mais la fondation du collège de Saint-Maurice l’a sauvée. «Une institution catholique au niveau intellectuellement élevé qui avait pour objectif de former l’élite valaisanne.» Le collège est encore aujourd’hui dirigé par des chanoines. L’ouvrage qui lui est consacré vise d’ailleurs «à ne pas mettre en évidence uniquement l’époque médiévale, mais toutes les périodes», précise Bernard Andenmatten. Avec notamment des contributions de l’historien de l’art Dave Lüthi, qui évoque les transformations architecturales aux XIXe et XXe siècles, et de Mgr Roduit lui-même, abbé de Saint-Maurice, auteur d’une postface faisant le point sur l’histoire récente de l’abbaye.

Le 18 avril prochain, un colloque autour de la laïcité sera organisé. Historiens et philosophes seront réunis pour dresser un état des lieux des relations entre l’Eglise et l’Etat en Suisse romande et évoquer le retour de la religion dans la société laïque. / CK

L’ABBAYE DE SAINT-MAURICE D’AGAUNE 515-2015. Deux volumes. Sous la direction de Bernard Andenmatten, Laurent Ripart et Pierre-Alain Mariaux. Editions Infolio (parution Pâques 2015).

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