C’est l’un des gagnants-surprises de la pandémie. L’ange gardien a été rappelé du fond des âges pour venir conjurer nos angoisses modernes. Pendant que le coronavirus bloquait les gens chez eux, les néoconfinés ont été nombreux à expliquer sur les réseaux sociaux qu’ils se sentaient protégés par leur intercesseur ailé. Rien d’inhabituel à cela, explique le professeur de l’UNIL David Hamidovic, dans ce numéro. À chaque fois que les peurs de l’apocalypse ont gagné en intensité dans l’Histoire, les humains se sont tournés en myriades vers ce lointain souvenir du paganisme.
L’ange gardien n’est pas le seul gagnant de la pandémie à planer dans cet Allez savoir ! Vous y trouverez encore l’ARN messager, cette nouvelle recette utilisée pour produire des vaccins révolutionnaires à une vitesse jamais vue, et qui pourrait constituer un tournant dans l’histoire de la médecine.
La dette est le troisième gagnant inattendu de la pandémie évoqué dans ces pages. Il y a quelques années encore, des institutions internationales tançaient la Grèce et l’Argentine parce qu’elles multipliaient les déficits. Cette époque est bien révolue, puisqu’on conjure désormais les États, les fourmis comme les cigales, à dépenser « quoi qu’il en coûte » pour sauver leurs économies. Le saut de l’ange.
Mais, si l’évocation des gagnants de la pandémie arrive comme un baume après des mois passés à entendre des nouvelles sinistres, ces éclaircies ne doivent pas dissimuler les innombrables perdants de la Covid-19. Ce d’autant plus que cette liste reste difficile à établir avec précision, parce que de nombreux destins sont encore en suspens.
Avec les secteurs de la restauration, de la culture et du sport, qui ont été largement évoqués, il faut penser aux étudiants, dont personne ne sait vraiment comment ils ont traversé ces nombreux mois de confinement. Surtout les plus fragiles, les derniers arrivés, ceux qui ne connaissaient pas encore la vie sur le campus.
Cette volée a été chassée des gymnases dans l’urgence de la mi-mars 2020, avant d’être renvoyée des amphithéâtres en octobre, pour tenter l’expérience forcée des études en télétravail permanent. Comment a-t-elle réussi dans cet exercice inédit qu’elle a testé avec une patience d’ange ? Les prochains mois nous diront si la génération de l’écran a fait preuve de résilience.
Ce qui est sûr, c’est qu’il faudra faire un retour d’expérience sans concession, dès que le calme reviendra. Il faudra dresser la liste complète des gagnants et des perdants de la pandémie, après ce crash-test psychique sans précédent, et probablement trouver des réparations pour de nombreux anges déchus. Cette analyse méticuleuse est indispensable au cas où, comme le pronostiquent certains chercheurs, l’épidémie de la Covid-19 en annonce d’autres. Dans cette hypothèse, la pandémie de 2020 deviendra utile si elle nous montre toutes les erreurs qu’il vaudrait mieux éviter à l’avenir. Même si, on le sait, qui fait l’ange fait souvent la bête.