Gabriele Rizzo, directeur de recherche au Swiss Center for Positive Futures et coauteur du livre «HR Futures 2030», a imaginé les figures mythologiques qui intègrent des degrés différents de technologie. Trouvez votre profil.
«Nous sommes à l’aube d’une révolution technologique qui modifiera fondamentalement notre façon de vivre, de travailler et d’entrer en relation avec les autres. Par son ampleur et son caractère contraignant, cette transformation ne ressemblera à rien de ce que l’humanité a connu auparavant », précise Gabriele Rizzo, coauteur avec Isabelle Chappuis du livre HR Futures 2030 et directeur de recherche au Swiss Center for Positive Futures, à l’UNIL.
«Au cours des vingt dernières années, nous avons assisté à une accélération technologique sans précédent, relève Gabriele Rizzo. Des progrès exponentiels ont été réalisés dans des domaines comme l’intelligence artificielle, la robotique, l’informatique, l’accès universel à des réseaux à large bande, l’impression 3D et la biologie, pour n’en citer que quelques-uns.»
«Si la technologie devient une caractéristique fondamentale de ce siècle, nous ne connaîtrons pas 100 ans de progrès au XXIe siècle, mais plutôt 20 000 ans de progrès», pronostique Gabriele Rizzo. Pour se représenter à quoi ressembleront les êtres ou les forces qui vont naître de cette révolution, le chercheur de l’UNIL a imaginé cinq profils, le demi-dieu, le centaure, le chevalier, le minotaure et le moine, qui montrent ce que nous pourrions devenir dans un futur proche, dopé par la technologie. À vous de trouver votre profil.
Le demi-dieu
Dans la mythologie classique, un demi-dieu est l’enfant d’une divinité et d’un humain. Au XXIe siècle, les super pouvoirs divins de cet être (accès, informations, données et connaissances infinies) lui viennent de l’intelligence artificielle.
Le demi-dieu représente un humain qui vit de l’intelligence artificielle (IA). Ce sont les individus les plus compétents et qui intègrent le mieux la technologie. Ils sont ouverts à la nouveauté et à l’expérimentation. Ils sont même capables d’élargir leur horizon quand ils sentent que leur partie machine les limite. Mais ces demi-dieux, énergiques et catalyseurs, ne conservent que des similitudes superficielles avec les humains. Ils peuvent manquer de sensibilité face à des problèmes humains que leur nature divine leur permet d’ignorer.
Le centaure
Moitié cheval et moitié humain, le centaure du XXIe siècle possède une intelligence biologique et une autre artificielle. La moitié humaine lui apporte le cerveau et le cœur, tandis que la moitié machine lui fournit sa force, sa vitesse et sa puissance. Les deux parties sont inséparables et se renforcent mutuellement.
Le centaure représente l’humain associé à l’intelligence artificielle, à des niveaux élevés de compréhension mutuelle. La machine sait ce dont son homologue humain a besoin et vice versa. Toutefois, le centaure a moins de pouvoirs que le demi-dieu et moins de possibilités d’atteindre un potentiel complet et écrasant. Inversement, il est plus compréhensif pour les questions humaines, par lesquelles il est touché en certaines occasions.
Le chevalier
Le chevalier du XXIe siècle représente le meilleur ce que l’humain peut accomplir sans partager son identité avec son homologue machine, il représente l’humain qui chevauche l’intelligence artificielle.
Le chevalier ne fusionne pas avec la technologie, comme le centaure, il ne s’y identifie pas comme le demi-dieu. Son processus de pensée ne dépend pas de sa contrepartie machinale, même s’il est capable de l’utiliser avec autant d’habileté que le chevalier maniait son épée. La connexion du chevalier avec la machine est bien moins naturelle qu’elle l’est pour le demi-dieu ou le centaure, mais il peut arriver à une belle maîtrise grâce à un entraînement intensif. En revanche, le chevalier fait naturellement preuve d’indépendance et de résistance, ce que le demi-dieu doit planifier.
Le minotaure
Chez le minotaure, c’est la partie machine qui est aux commandes. L’intelligence artificielle a pris le dessus et elle contrôle la conscience humaine. Chez lui, l’intelligence artificielle s’adapte et agit à une vitesse complètement différente.
Cette créature accède de manière immédiate et non filtrée à la vitesse et à la puissance brute de sa part machine. La part humaine apporte les sens et le bon sens à la machine.
Loin de l’empathie des humains, le minotaure fait preuve d’une capacité et d’un désir minimal d’expérimenter. Il accorde en revanche une grande importance aux détails, à l’ajustement des systèmes et à la mise au point de concepts. Et il est dépourvu de la violence du minotaure de l’âge grec, mais en a gardé sa force étonnante.
Le moine
Le moine du XXIe siècle n’est pas un ermite, bien au contraire. À la manière des moines Shaolin, il a développé une force physique et une force intérieure impressionnantes, doublées d’une résistance et d’un état d’esprit vaillant.
Ce moine est un fin connaisseur de la nature humaine et de ses performances, dont il est devenu un exemple vivant. Il trouve la plénitude en maintenant la machine à distance, en dehors de lui, jusqu’à se faire un devoir de ne pas interagir avec elle.
Son extraordinaire concentration sur les capacités humaines peut être une grande ressource pour les chevaliers et les centaures, qui, malgré une perception différente du monde, peuvent trouver une grande perspicacité dans la perception du moine, qui leur suggère des voies leur permettant d’évoluer.
Article principal: La technologie fera de nous des moines ou des demi-dieux