Deux présidents à l’UNIL

Les coulisses d’un événement hors du commun

ÉCLAIRAGES

Le 16 novembre 2023, l’UNIL accueillait les Présidents Emmanuel Macron et Alain Berset pour une rencontre hors du commun avec la communauté universitaire. 

Fabrice Ducrest © UNIL

Fabrice Ducrest © UNIL

ÉCLAIRAGES

Le 16 novembre 2023, l’UNIL accueillait les Présidents Alain Berset et Emmanuel Macron pour une rencontre hors du commun avec la communauté universitaire.

Les coulisses de l’événement

Cédric Garrofé fait partie des organisateurs de l’événement à Unicom. Il raconte que la venue d’Emmanuel Macron, à l’invitation du Président Alain Berset, fut communiquée seulement trois semaines avant. Le Recteur Frédéric Herman s’était engagé à faire visiter la Fondation Jean Monnet pour l’Europe aux deux présidents et à leur offrir une discussion avec la communauté universitaire, en particulier estudiantine. Il fallait l’organiser !

Une semaine passe encore avant la confirmation de l’événement par les équipes concernées à Berne et Paris, à grands renforts de courriels arrivant matin et soir, avec une très forte implication des services de la présidence française. «J’étais dans un train quand j’ai appris que nous devions lancer les inscriptions et organiser ce sommet présidentiel en 15 jours, définir son déroulement et le faire accepter par Berne et Paris, en assurer la sécurité et garantir la présence du public jusqu’à 1400 étudiants et membres du personnel de l’UNIL et de l’EPFL», relate Cédric Garrofé. Gardé secret, le projet Nemo, du nom du chien d’Emmanuel Macron, pouvait décoller grâce à «la mobilisation de nos équipes».

Si Emmanuel Macron a pu féliciter les services de l’UNIL, serrer des mains en toute décontraction et repartir avec son livre en cadeau (Benjamin Constant, par le professeur Léonard Burnand), tout n’était pas joué d’avance et le travail en amont fut intense. «Nous avons reçu la visite des deux équipes présidentielles, très soucieuses de la sécurité», indique Cédric Garrofé. Inspection des locaux, chiens renifleurs, plusieurs parcours élaborés au choix pour parvenir sans risque au bâtiment Amphimax depuis la Fondation Jean Monnet, rien n’a été négligé.

«Le père arrive…»

Côté inscriptions, c’est le succès immédiat : «Lors d’une première vague, nous avons invité les étudiants et les billets sont partis en 10 minutes, au point que le serveur a sauté», raconte Cédric Garrofé. Les professeurs ainsi que le personnel administratif et technique ont reçu le courriel d’inscription dans un second temps et, là encore, succès fulgurant puisque les places se sont arrachées en seulement quatre minutes ! Les déçus ont tout tenté pour décrocher un sésame (850 mails ont été envoyés aux organisateurs), mais les inscriptions du projet Nemo étaient bouclées pour cet événement qui avait gagné en hauteur sous l’intitulé «Parlons Europe».

Quelques hésitations de dernière minute ont dû encore être prises en compte. Tout au long de l’événement, la sécurité a représenté un élément clé tant pour l’UNIL que pour les équipes présidentielles. «On entendait les gardes du corps d’Emmanuel Macron se lancer des indications au sujet des mouvements du PR, autrement dit le Président de la République, et ces deux lettres nous parvenaient comme le son du mot père», se souvient Cédric Garrofé.

Dans la salle se tenaient des étudiantes et étudiants attentifs et conscients de participer à un événement exceptionnel. «Nous avons reçu sur le moment même 750 questions par téléphone ou directement au micro.» Le Président Macron a eu son dialogue et son immersion dans une institution helvétique de formation et de savoir de premier plan. Le Recteur Frédéric Herman s’est réjoui de cette occasion et a félicité, lui aussi, toutes les personnes impliquées à l’UNIL. – NR

Parlons Europe !

Le Président Macron a décrit une Europe aux prises avec «une multicrise qui attaque ses fondements mêmes, la paix, la prospérité et l’esprit démocratique». Loin d’un retour « catastrophique » aux nationalismes, il a insisté sur «l’unité, la souveraineté et la démocratie ». Il a défendu une Communauté politique européenne (CPE) pour combler «les trous de l’UE» en réunissant les Britanniques post-Brexit, la Suisse, les Balkans occidentaux, certains pays nordiques hors UE, l’Ukraine et la Moldavie… Il s’agit de créer ainsi une «unité politique» pour répondre aux défis climatique, migratoire, sécuritaire, énergétique. Via la CPE, l’élargissement de l’UE à certains pays pour «ne pas laisser d’autres puissances pousser leurs agendas et nous diviser», et la création d’accords de coopération scientifique, économique…

«La responsabilité de ma génération envers la vôtre»

S’agissant de la souveraineté, il a souligné «la responsabilité de ma génération envers la vôtre» et la nécessité de fonder une «opinion publique européenne» capable de se prononcer pour ne pas dépendre trop étroitement du gaz russe, par exemple, de composants technologiques chinois, d’équipements américains. La grande menace selon lui : «Être un continent qui apprend, innove et construit moins que les Américains et les Chinois.» C’est pourquoi il faut «assumer d’investir massivement dans le savoir et les arts» et cultiver notre indépendance scientifique, culturelle, technologique et militaire. Autrement «vous aurez des dirigeants qui débattent entre Européens, mais qui ne seront pas totalement maîtres chez eux (…) et vous deviendrez des dirigeants qui seront peut-être des commentateurs du monde mais pas des décideurs».

L’esprit des Lumières

Troisième point, la démocratie : «L’esprit des Lumières est une coproduction franco-suisse», a-t-il lancé, défendant la nécessité de refonder le rapport entre l’information et la formation de l’opinion publique. Il a dénoncé «la propagande de puissances autoritaires» et pointé «l’IA capable de créer des contenus totalement faux», soulignant le problème de n’avoir qu’une intelligence artificielle entièrement fondée sur des modèles anglo-saxons, de même que des plateformes et des réseaux sociaux formés sur «des algorithmes déloyaux qui ne font pas l’objet d’un dialogue démocratique». Il a conclu son discours concis sur la « nécessité de retrouver une vitalité démocratique, en particulier face à toutes ces innovations technologiques». – NR