Tout comme la première, la deuxième conférence du cycle Moins, c’est mieux a dévoilé de nouveaux aspects sur la sobriété énergétique et a fait dialoguer de spécialistes du monde académique, et les acteurs et actrices du terrain sur les questions de l’énergie. De nouveau, quelques 200 participant·e·s ont pu écouter les différents points de cadrage sur la sobriété, en commençant par un mot d’introduction de Christian Petit, CEO de Romande Énergie, l’entreprise partenaire du cycle dans son ensemble.
Après un bref récapitulatif des ressources que la Suisse peut mobiliser pour augmenter sa production d’énergie et répondre au besoin d’électrification du pays avec des énergies renouvelables, la réponse à la question est venue seule : il faut d’abord et surtout réduire notre consommation. Malgré l’espoir porté dans l’innovation et l’efficacité technologique, nombre d’exemples ont démontré les limites de l’efficience, voir son incapacité à réduire nos émissions dû aux différents effets rebonds qu’elle produit. Dès lors, le dernier grand levier restant est la sobriété, proposant un changement des usages de l’énergie.
Christian Petit a ainsi déclaré que ces changements de mode de vie ne peuvent se faire que par l’articulation entre échelle individuelle et collective, l’individu ne pouvant diminuer qu’une faible part de son impact si des aménagements structurels ne sont pas mis en place à l’échelle d’un territoire. Il a aussi rappelé que nos sociétés sont fortement inégalitaires, et que l’impact environnemental est fortement corrélé à notre pouvoir d’achat, pointant la responsabilité des pays occidentaux, dit « développés », et des populations les plus riches au sein de ces pays ; déduisant ainsi la nécessité d’une juste répartition des richesses dans la transition.
Pour la première présentation de la soirée Sascha Nick, chercheur en transformation sociétale à l’EPFL, est tout d’abord revenu sur les grandes théories scientifiques pour comprendre et analyser les besoins humains. De la «Theory of Human Needs » de L. Doyal & I. Gough à la “Capability Approach” de A. Sen & M. Nussbaum, en passant par les Besoins Fondamentaux Humains de M. Max-Neef et les « Decent Living Standard » de N.D. Rao & J. Min, il a développé le cadre théorique permettant d’analyser correctement comment notre usage de l’énergie peut satisfaire ces besoins avec un minimum de ressource. Sans surprise la sobriété permet cela, Sascha en définit dans ce sens ses composantes essentielles :
- Utiliser moins, réduire le niveau d’activité, tout en assurant le bien-être humain.
- Des contraintes écologiques, pour garantir l’intégrité des écosystèmes
- Objectifs collectifs ou de toute la société, principes d’organisation, politiques publiques et actions
Il a ensuite révélé les résultats préliminaires de sa recherche montrant le potentiel de la sobriété en Suisse. Si les approches basées sur l’efficacité permettent au mieux de réduire les besoins énergétiques de moitié, la sobriété permettrait de la diviser par 6 et c’est en combinant les deux que nous pourrons la diminuer par 12. Sascha a alors fini présenter ses recherches, analysant les perceptions et représentations de la sobriété dans la population, et proposant des exemples concrets de mesures pouvant être mise en place.
Avec sa présentation, Sascha Nick interroge pourquoi la sobriété n’est pas déjà présente de partout dans nos sociétés si elle présente autant d’avantage ?
La réponse est sans appel.
Il avance alors la nécessité de réinventer les institutions permettant l’engagement de la population autour de ces grandes questions sociétales, par exemple, avec les assemblées citoyennes.
Barbara Nicoloso, directrice de l’association Virage Énergie qui accompagne les collectivités territoriales dans l’implémentation de la sobriété, a alors enchainé en reflétant à quel point nos sociétés sont dans un état d’ébriété énergétique, sous une forme d’addiction aux énergies fossiles. Il parait alors essentiel de redéfinir nos usages de l’énergie en les priorisant et en mettant en place les régulations adéquates pour les encadrer.
Après avoir défini la notion de sobriété et commenté comment elle se retrouve dans l’actualité, elle distingue la sobriété « urgente » répondant sur une temporalité courte aux contraintes géopolitiques ou naturelles de rupture d’approvisionnement en ressources, d’une sobriété systémique, répondant de manière globale aux enjeux climatiques, environnementaux et sociaux en engageant une évolution des normes et des modes vie collectifs.
Barbara concrétise alors cette notion, en présentant les différentes formes de sobriété permettant de construire un projet de société nous emmenant de notre ébriété actuelle à la sobriété. Après la présentation de quelques mesures phares qui sont déjà appliquées dans ce sens, elle porte une réflexion sur comment accompagner stratégiquement les territoires pour mettre en place ces politiques de sobriété, notamment en renseignant les co-bénéfices et l’acceptabilité sociale de ces approches.
La présentation se conclut alors sur l’importance des récits pour créer un imaginaire désirable de la sobriété qui saura emmener la population dans la construction d’un projet commun.
La soirée s’est terminée avec une table ronde rassemblant Christian Petit, nos deux intervenant·es, mais aussi David Moreau, directeur exécutif de négaWatt Suisse, qui a rejoint ce panel en présentant les activités de l’association. Ensembles, ils et elle ont abordé les questions sur les freins à la sobriété, comment la rendre désirable et équitable, ou encore son rapport avec les luttes de terrains.
Prochaines Étapes
Lors de cette deuxième conférence, le site du cycle Moins C’est Mieux a été dévoilé, avec les prochains évènements en soirée pour le semestre de printemps :
- Mardi 4 avril : un théâtre d’improvisation sur le thème de la sobriété énergétique au Plateau de La Grange. Retrouvez les inscriptions ici : https://events.unil.ch/e-ticket/register?event=192
- Mardi 16 mai : une projection de Film(s) autour de la thématique dans le Foyer de la Grange.
- Mardi 30 mai : une conférence sur la sociologie de la Sobriété de nouveau en Amphimax MAX-351.
Pour ne rien manquer de ces évènements, n’hésitez pas à vous abonner aux réseaux sociaux de la durabilité à l’UNIL ! Nous sommes sur Instagram, Facebook et Twitter, ou inscrivez-vous à la newsletter de la transition écologique et sociale UNIL.