Professeur à la Faculté des HEC (UNIL), Jeffrey S. Petty et ses co-auteurs Marc Gruber, EPFL, et Dietmar Harhoff, Max Planck Institute, vont profiter d’un accès unique à des données de transactions d’une société capital-risque pour identifier les facteurs qui ont permis d’obtenir plus facilement un financement.
L’enjeu
Avec des milliards de dollars en jeu, la recherche de la prochaine start-up licorne fait l’objet d’une concurrence féroce. Pourtant, sur les milliers de propositions commerciales que reçoivent les sociétés de capital-risque, seul 1% d’entre elles obtiennent un financement. Pour les entrepreneur·euse·s, le défi consiste à savoir comment améliorer les chances de leur proposition commerciale d’attirer les investisseur·euse·s. Dans le même temps, les sociétés de capital-risque doivent optimiser leurs processus d’analyse et d’évaluation des offres pour s’assurer qu’elles ne passent pas à côté du prochain Google ou Tesla.
Pour quelle raison est-ce important
L’un des principaux obstacles lorsque l’on étudie la manière dont les sociétés de capital-risque traitent les offres commerciales est l’accès aux données. C’est là où la recherche du Prof. Jeffrey Petty se distingue. Il a pu consulter les archives d’une société de capital-risque, ce qui lui a permis d’examiner dans les moindres détails le registre des offres soumises à la société, soit 2’508 processus de sélection des investissements. Lui et son équipe ont ainsi pu identifier un certain nombre de facteurs qui semblent influer sur la progression d’une proposition dans l’entonnoir du flux d’opérations.
Que dit notre professeur à HEC Lausanne
Jeffrey Petty propose quelques idées clés aux entrepreneurs. Tout d’abord, la source de référence est importante. C’est en soumettant une proposition d’investissement par l’intermédiaire d’un·e insider que l’on a le plus de chances d’avancer dans le pipeline. L’on entend par insider les commanditaires qui ont investi dans le fonds, les sociétés de capital-risque qu’ils connaissent, ou les entrepreneurs qui ont déjà attiré des investissements. « Si une proposition vient d’une recommandation, en particulier d’un insider, ils vont lui accorder un peu de temps, juste par courtoisie professionnelle », explique M. Petty. « Il s’agit donc de cibler et de trouver ces contacts. ».
Lorsque vous envoyez une proposition à une société de capital-risque, sachez à qui vous l’adressez et adaptez votre offre en conséquence. Comme le fait remarquer Jeffrey Petty, les sociétés de capital-risque accordent la priorité à différents facteurs lorsqu’elles évaluent une offre: l’une peut s’intéresser plutôt à l’importance de l’équipe, l’autre peut se concentrer sur l’idée de business. « Ne vous contentez pas d’envoyer votre proposition à une société, mais envoyez-la à un contact spécifique de cette société », explique M. Petty. « Renseignez-vous pour savoir si cette société travaille sur des opérations et de quel type. Essayez d’obtenir un maximum d’informations sur cette société de capital-risque et ses décideur·euse·s. ».
Les intermédiaires, comme les courtiers et les banques, ont leur place dans l’écosystème du capital-risque. Mais en tant que voie d’accès à l’investissement en capital-risque, les résultats de la recherche suggèrent que le modèle de soumission d’un intermédiaire n’offre aucun avantage par rapport à une soumission directe de l’entrepreneur·euse et qu’il est beaucoup moins efficace que de passer par un insider.
Un autre point, selon le Prof. Petty, est l’importance du moment. L’investissement d’un fonds de capital-risque est un processus dynamique. Plus il y a d’investissements, moins il y a d’argent disponible pour l’investissement, moins il y a de temps pour l’évaluation de nouvelles offres. Les sociétés de capital-risque consacrent plus de temps aux entreprises de leur portefeuille, tandis que les types d’entreprises dans lesquelles elles souhaitent investir deviennent plus spécifiques. Il est préférable que les entrepreneurs soumettent leur offre commerciale au début du cycle de vie d’un fonds et que les sociétés de capital-risque, qui ont alloué la majeure partie d’un fonds et tentent de réaliser les dernières transactions, se concentrent sur leur réseau d’insiders.
Conclusion
L’étude montre qu’une analyse approfondie des registres de transactions des sociétés de capital-risque peut améliorer la capacité de l’entreprise à trouver les meilleures transactions pour le portefeuille et à utiliser le plus efficacement possible le temps des sociétés de capital-risque. Elle leur permet d’identifier les opportunités manquées qui se sont avérées rentables par la suite et d’ajuster les processus internes afin de maximiser le taux de réussite. Dans une entreprise d’un milliard de dollars, le temps consacré à ce type d’analyse n’est qu’un faible prix à payer pour les bénéfices potentiels.
Pour les entrepreneur·euse·s, les données relatives à l’agenda des transactions révèlent comment ils·elles peuvent augmenter les chances d’obtenir un investissement en leur faveur.
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