Amarynthos et la formation du paysage religieux de la cité d’Érétrie

Dégagement d’offrandes dans le temple d’Artémis à Amarynthos. Photo Thierry Theurillat.

Depuis les années 1980, plusieurs études dans les domaines de l’archéologie, de l’anthropologie, des sciences historiques et sociales ont montré le rôle central joué par les lieux de culte dans la formation et l’évolution des cités grecques. Dans le creuset des grands sanctuaires du monde grec, dont Delphes et Olympie sont emblématiques, l’identité des communautés s’est élaborée et a été sans cesse refaçonnée. Au cours de l’Âge du Fer, l’émergence des poleis et ethne s’accompagne du développement d’espaces sacrés qui structurent les territoires et y forment progressivement des pôles religieux. Ainsi, l’Héraion d’Argos et celui de Samos, ou encore les sanctuaires à Kalapodi et Eleusis – pour citer quelques exemples bien étudiés –, ont contribué à définir des identités politiques par le biais des pratiques cultuelles, à l’échelle régionale et suprarégionale.

La récente localisation du sanctuaire d’Artémis Amarysia à Amarynthos, à 11 km à l’est de la cité d’Érétrie, compte parmi les découvertes les plus importantes de ces dix dernières années en Grèce ; elle est certainement la plus spectaculaire à l’échelle de l’Eubée, depuis les trouvailles de Lefkandi. Situé à l’extrémité orientale de la plaine d’Érétrie, le site d’Amarynthos est progressivement devenu un centre religieux de la polis érétrienne, puis un lieu de culte commun à toutes les cités eubéennes. Quels ont été les mécanismes sociaux, religieux et politiques à l’origine de l’essor du sanctuaire d’Artémis Amarysia ? Quelles ont été les étapes marquantes du développement qui voit l’Artémision s’imposer au cœur de la cité et au-delà ? Comment le paysage religieux s’est-il progressivement façonné ?

Le projet vise à répondre à ces questions en étudiant les origines du site d’Amarynthos et son évolution sur la longue durée, sa position dans la géographie religieuse et politique de l’Eubée centrale, ainsi que les multiples facteurs qui ont favorisé son émergence comme l’un des principaux pôles sacrés de l’île. Il s’articule autour de trois axes de recherche :

  1. une prospection archéologique visant à restituer avec précision le paysage antique dans lequel Amarynthos s’insère ;
  2. un réexamen de l’importance régionale du site à l’époque préhistorique et de sa transformation entre la fin de l’Âge du Bronze et le début de l’Âge du Fer ;
  3. une fouille des vestiges d’époques géométrique et archaïque permettant de mieux appréhender les premiers temps du sanctuaire, complétée par une étude comparative des pratiques rituelles accomplies dans les lieux de culte érétriens.

Un des intérêts majeurs du projet consiste dans la multiplicité des approches, ainsi que dans la diversité des échelles prises en compte : il s’agit d’étudier l’Artémision d’Amarynthos sur le temps long et dans un contexte géographique large, afin de le replacer au mieux dans le paysage religieux eubéen.

Il est prévu de ponctuer ce programme par une série d’articles relatifs aux trois axes de recherche ; la publication d’une synthèse sur les cultes de la cité d’Érétrie clora le projet. En 2022, une table ronde internationale organisée à l’Université de Lausanne portera sur les rapports entre les sanctuaires, les communautés et leurs territoires dans la Grèce des périodes géométrique et archaïque.

Direction du projet
Sylvian Fachard, Professeur ordinaire, Institut d’archéologie et des sciences de l’Antiquité

Équipe de recherche
Thierry Theurillat, chargé de recherche UNIL, École suisse d’archéologie en Grèce
Samuel Verdan, chargé de recherche UNIL, École suisse d’archéologie en Grèce
Deux doctorant·e·s FNS
Deux post-doctorant·e·s FNS

Durée du projet
2021-2025