L’autonomie obligatoire. Analyse sociologique des dispositifs scolaires de l’autonomie
Actuellement collaboratrice scientifique à la Haute Ecole Pédagogique à Lausanne, Héloïse Durler est diplômée de l’Institut d’Etude Politique de Paris et titulaire d’un DEA en sociologie de l’Université René Descartes – Paris 5. Elle a travaillé en tant qu’assistante diplômée à l’Université de Lausanne de 2003 à 2008 et elle vient d’y soutenir une thèse dirigée par le Prof. André Petitat.
La thèse traite des injonctions à l’autonomie dans le champ scolaire et des pratiques destinées à favoriser son développement chez les élèves. Elle se base sur une enquête ethnographique réalisée dans une école primaire genevoise : celle-ci réunit des observations menées durant deux ans et demi dans des classes allant de la 2e enfantine à la 3e primaire (2P-5P, selon HARMOS), des entretiens avec des enseignants, des observations dans les familles ainsi que des entretiens avec des enfants et leurs parents. La recherche a permis de mettre en évidence le paradoxe auquel sont quotidiennement confrontés les enseignants qui doivent amener les élèves à découvrir et s’approprier les savoirs et les règles scolaires de manière autonome, tout en encadrant leurs pratiques afin que ceux-ci se conforment aux attentes de l’institution scolaire.
La notion de dispositif, en tant qu’échelle intermédiaire d’analyse (Bonnéry, 2009), rend possible l’articulation des niveaux macro- et micro-sociologique dans l’analyse des pratiques. L’analyse des dispositifs scolaires de l’autonomie considère la traduction de la norme d’autonomie et des injonctions institutionnelles dans les pratiques individuelles. L’autonomie est ici définie comme un principe de socialisation, sur le mode de l’engagement : les dispositifs scolaires de l’autonomie visent à amener les élèves à choisir, vouloir, aimer ce que l’institution scolaire leur demande. Cette analyse permet de dégager plusieurs types de dispositifs et surtout de mettre en lumière leurs contradictions internes, lorsque ne sont pas perçues ou partagées par les acteurs les attentes implicites ou explicites contenues dans les dispositifs. L’analyse des dispositifs porte également, dans une perspective plus interactionniste, sur les stratégies individuelles de gestion des contradictions et la retraduction des normes par les acteurs. Les dispositifs sont alors examinés sous l’angle des processus d’étiquetage réalisé par les enseignants et des formes de déviances qu’ils font apparaître chez les élèves et les parents.