Johanna Hornung

Nous vous avions brièvement présenté son parcours en août dernier lors de sa nomination à l’Institut d’études politiques. Comment se sont depuis développés ses travaux de recherche ? Interview avec Johanna Hornung, Professeure assistante en prétitularisation conditionnelle en politiques publiques.

Quel est le parcours qui vous a amené à devenir chercheuse ?

J’ai d’abord suivi une formation de traductrice et d’assistante en affaires européennes, dont l’aspect international m’a passionnée. Parallèlement, mon intérêt pour une meilleure compréhension des phénomènes sociaux et politiques s’est développé. J’ai donc commencé des études interdisciplinaires en Sciences Sociales Intégrées à l’Université technique Carolo-Wilhelmina de Brunswick. Avant de commencer un poste d’assistante-étudiante en 2014, je n’avais aucune idée des opportunités qui existaient pour travailler en tant que chercheuse. C’est grâce à mon implication à l’Institut de Politique Comparée et d’Analyse des Politiques Publiques sous la direction de Nils Bandelow, ainsi qu’aux possibilités de participer à des conférences et d’avoir un aperçu du travail de recherche, que j’ai eu envie de poursuivre une carrière universitaire. Mon goût pour les échanges internationaux m’a conduit à entreprendre un  master de recherche en sciences politiques à l’Université Pompeu Fabra à Barcelone. De retour en Allemagne, j’ai terminé un doctorat en sciences politiques sous la direction de Reimut Zohlnhöfer, qui m’a également ouvert de nombreuses perspectives scientifiques. A l’Université technique Carolo-Wilhelmina de Brunswick, j’ai également découvert la joie d’enseigner et de transmettre des connaissances à des étudiant·es, en donnant mes premiers cours.

En 2021, grâce à Fritz Sager, j’ai rejoint la communauté scientifique en Suisse en tant que chercheuse postdoctorale. Depuis, je ne me vois plus travailler ailleurs.  Je suis ravie d’être engagée à l’Université de Lausanne, notamment parce qu’elle est l’une des meilleures institutions de recherche en politiques publiques.

Quels sont les axes de recherche que vous privilégiez actuellement ?

 Je m’intéresse à une compréhension globale du processus politique, en mettant l’accent sur les acteurs et sur la manière dont ils·elles se comportent dans des structures et institutions données. Dans ce contexte, les explications psychologiques des préférences et du comportement des acteurs qui participent de manière déterminante à ces processus, ainsi que l’influence de la science et des expert·es sur ces processus me passionnent tout particulièrement. Je m’intéresse aux raisons pour lesquelles certains problèmes sociaux sont perçus dans l’agenda public et politique au détriment d’autres, et pourquoi certaines mesures politiques sont prises pour les résoudre plutôt que d’autres.J’aimerais également mieux comprendre comment les politiques publiques sont conçues et mises en œuvre, et quel est leur impact sur la société et la vie sociale, notamment en termes d’acceptation et de résolution des problèmes sociaux. Actuellement, je me concentre d’abord sur les crises passées et futures de la politique de santé à l’intersection de l’environnement et des transports, en mettant particulièrement l’accent sur les questions suivantes : Comment expliquer les différences de gestion de crise entre les pays lors de la pandémie de COVID-19, et quelle a été leur influence sur l’intégration de la science dans la politique ? Quelles leçons pouvons-nous tirer pour les futures crises de santé publique, notamment dans le domaine de l’antibiorésistance ? Comment pouvons-nous mieux comprendre les facteurs qui influencent l’acceptation et le respect des mesures politiques au niveau individuel ? La science a-t-elle un rôle à jouer à cet égard ? Quel rôle jouent les idéologies, les identités sociales et les intérêts dans la coopération entre les acteurs publics et la société civile ?

Quelles difficultés avez-vous éprouvées dans le travail de recherche, et comment les avez-vous surmontées ?

Mon enthousiasme pour des sujets variés rend parfois difficile le fait de refuser des projets, même lorsqu’ils s’éloignent de mon domaine de spécialité.  Cela m’a permis d’explorer des thèmes enrichissants, mais m’a aussi coûté beaucoup d’énergie. Avec le temps, j’ai appris qu’il y a plus d’opportunités de recherches enrichissantes que de temps disponible, et qu’il est nécessaire de prioriser certains projets, même si cela signifie devoir en décliner d’autres.  L’apprentissage du français est un autre défi depuis mon arrivée à Lausanne. Cependant, je considère cela comme une opportunité de m’immerger dans une nouvelle culture et langue. 

Qu’attendez-vous de vos recherches ?

Je souhaite mieux comprendre les motivations des acteurs impliqués dans les processus politiques, ainsi que leur comportement et leurs préférences, afin d’accroître les connaissances théoriques et empiriques à ce sujet. Mon objectif est aussi de découvrir comment parvenir à des discussions plus ciblées, identifier des solutions consensuelles aux problèmes sociaux, surmonter les conflits et prendre des décisions satisfaisantes pour toutes les parties concernées. Compte tenu de l’influence des processus politiques sur la cohabitation sociale, il est important pour moi d’identifier les mécanismes en jeu et de les intégrer dans un dialogue avec la société afin de promouvoir la stabilité sociale, la tolérance et l’acceptation.

Qui serez-vous dans 10 ans en une phrase ?

J’espère être un bon exemple de chercheuse empathique et passionnée, engagée et dévouée pour la communauté scientifique, ses collègues et ses étudiant·es, et qui ne se laisse pas décourager par les obstacles potentiels. J’espère aussi rester la personne joyeuse et épanouie que je suis aujourd’hui, et qui a la capacité de transmettre cette joie aux autres et surtout à son entourage le plus proche.