Joël Vacheron

Déregarder l’imagerie spatiale : une étude critique des fondations coloniales de l’exploration du cosmos.

Après des études en sciences sociales à l’Université de Lausanne, Joël Vacheron a été assistant d’enseignement pour le cours de sociologie de l’image du Professeur Jean-Pierre Keller de 1999 à 2004. Il a ensuite étudié au Goldsmiths’ College à Londres, où il a travaillé de nombreuses années en tant que journaliste culturel. Depuis 2013, il enseigne les études culturelles au département de communication visuelle de l’ECAL/HES-SO. Joël Vacheron a défendu sa thèse en sciences sociales le 6 février 2024, sous la direction du Prof. Panese (ISS).

« Nothing is less rational, finally, than the pretension that a specific cosmic vision of a particular ethnicity should be taken as universal rationality », affirme Anibal Quijano. Dans le même esprit, cette recherche défend l’hypothèse que l’expansionnisme spatial a universalisé une vision de la Terre et du cosmos — ce que nous appelons cosmovision—qui n’est pas universellement partagée. Les images produites dans le cadre du programme spatial américain à partir de la Seconde Guerre mondiale—en particulier The Blue Marble ou Earthrise—constituent des emblèmes globaux de cette perspective sur le monde assemblée, perçue et cadrée à travers les yeux d’un Homo modernus (S. Wynter). Comme au temps des premières explorations transatlantiques, de l’essor de la machine à vapeur ou de la conquête de l’Ouest, l’exploration et l’exploitation matérielle de l’espace extra-atmosphérique continuent à être envisagées comme une évolution «naturelle» menée au nom de toute l’humanité. À partir d’une méthodologie originale inspirée par les études visuelles et les études décoloniales, l’objectif de cette recherche vise à démontrer pourquoi l’expansionnisme spatial est indissociable des programmes écocidaires et génocidaires menés au moment de l’avènement des marchés globalisés. « Déregarder » l’imagerie spatiale est un préalable nécessaire pour construire des cadres d’interprétations et des récits dépassant une vision cosmique « qui pérennise la colonialité dans le monde postcolonial » (Niang et Suaudeau).