L’illusion ouvrière. Ordre et conflits moraux dans la représentation politique à l’Assemblée constituante de 1848 (France)
Tatiana Fauconnet, diplômée d’un master en Science Politique à Sciences Po Lyon et d’un master recherche en Histoire de la pensée politique à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon, a soutenu sa thèse de doctorat en science le 4 juin 2024 à l’Université de Lausanne sous la direction du Prof. Thomas Bouchet.
La participation des catégories sociales dites ouvrières à l’Assemblée constituante de 1848 est souvent envisagée depuis l’interprétation de Karl Marx formulée dans Les Luttes de classes en France (1850) comme l’échec du mouvement ouvrier dans l’obtention d’une représentation politique effective de ses intérêts. En sous-estimant les expériences subjectives de la représentation politique, l’interprétation marxiste projette une conception normative et essentialiste de l’activité politique des prétendus représentants ouvriers. Afin de nuancer cette perspective, la présente thèse s’appuie sur la théorie de la reconnaissance élaborée par Axel Honneth (1992). Mobilisant diverses sources archivistiques, la thèse propose d’observer la prétention à la représentation dite ouvrière par le biais de ceux qui s’en réclament, en interrogeant notamment les formes de sa légitimation à l’Assemblée constituante de 1848. L’illusion ouvrière, concept introduit dans cette thèse, permet de comprendre autrement la complexité des mondes sociaux en 1848 en décrivant comment certains individus s’approprient l’identité ouvrière à des fins politiques stratégiques. Plaçant les expériences subjectives au cœur de l’analyse, la thèse invite à questionner différemment l’ombre portée de la représentation politique et donne à voir une perspective critique sur la représentation politique catégorielle et ses aspirations à l’inclusion en 1848.