Tracking the Female Body: Femtech, Biosensors, and the Enactment of Computerized Fertility
Laetitia Della Bianca a défendu sa thèse le 5 septembre 2022, sous la direction du Prof. Francesco Panese, avec l’expertise des Prof. Delphine Gardey (histoire et sociologie, UNIGE), Prof. Maria del Rio Carral (psychologie de la santé, UNIL) et Prof. Tamar Sharon (éthique philosophique et philosophie politique, Radboud Univ., NL). Après l’obtention d’un Master en sciences sociales à l’Université de Lausanne en 2016, elle a été assistante diplômée à l’Unil, au sein de l’ISS (2016-2022), puis Maître de recherche et d’enseignement suppléante (2022). Depuis 2022, elle est responsable de recherche au ColLaboratoire, l’unité de recherche-action, collaborative et participative de la Direction de l’Unil.
Cette thèse développe une approche praxiographique pour questionner différents aspects associés à la construction de la « femme moderne » à travers des pratiques de suivi de la fertilité (Mol, 2002, p. 158). L’enquête suit un artefact – la fertilité informatisée – à travers différentes époques et espaces, dans des lieux où sa « naissance et sa disparition » sont contestées (Daston, 2000, p. ix). Un double argument émerge de cette enquête empirique : d’une part, les pratiques de suivi de la fertilité féminine via des biocapteurs informatisés sont intrinsèquement multiples (Mol, 2002, p. vii) ; d’autre part, les pratiques de suivi de la fertilité non seulement façonnent l’identité de sujets (des « femmes modernes ») mais aussi les conditions particulières d’acceptabilité des biocapteurs, profondément ancrées dans les contextes historiques et politiques dans lesquels ils évoluent. S’appuyant sur une recherche ethnographique menée entre 2017 et 2020 dans (et hors) d’une entreprise commercialisant un biocapteur de suivi du cycle menstruel, ce travail présente une analyse des relations complexes et parfois conflictuelles à travers lesquelles des biocapteurs de suivi du cycle menstruel sont « réalisés en pratique » (enacted) (Mol, 2002, p.vii). En suivant des biocapteurs dans différentes espaces et époques, cette thèse interroge la façon dont le suivi du corps féminin fertile émerge comme une version historiquement située de la féminité contemporaine. La thèse est organisée en quatre parties thématiques. Chaque partie concerne une dimension spécifique de la vie des biocapteurs de fertilité, à savoir leur distribution, promotion, utilisation et évaluation. La thèse contribue à la constitution d’une boîte à outils analytique visant à remettre en question des oppositions tendanciellement prises pour acquises dans la littérature sur la santé numérique et le self-tracking.