Violences machistes et médiation familiale en Catalogne et en Espagne. Enjeux de la mise en œuvre d’un cadre légal d’inspiration féministe
Diplômée en Sociologie par l’Université Autonome de Barcelone (UAB), titulaire d’un Master 2 Politiques sociales et Genre par l’Université Toulouse Jean Jaurès, Glòria Casas Vila a été chercheuse au sein du Centre Antígona sur les Femmes et le Droit à l’UAB (2008-2011). Ensuite elle a été assistante d’enseignement à l’Institut des Sciences Sociales de l’Université de Lausanne (2011-2018). Ses intérêts de recherche portent sur les théories féministes sur les violences envers les femmes, la parentalité et le divorce, la justice pénale et les politiques publiques sur la prostitution. Elle a défendu sa thèse le 14 décembre 2018, sous la direction de la Prof. Véronique Mottier (ISS).
Cette thèse porte sur les réponses politiques aux violences machistes et leur lien avec les réformes du Droit de la Famille, parmi lesquelles la médiation familiale, en Espagne et en Catalogne. Depuis plus d’une dizaine d’années, grâce au mouvement féministe, des lois spécifiques y considèrent les violences comme un problème lié aux discriminations que subissent les femmes. À partir d’une recherche combinant l’analyse de la littérature et de sources statistiques, une enquête par entretiens semi-dirigés et des observations directes, cette thèse porte plus spécifiquement sur l’interdiction de la médiation familiale en situation de violences machistes. Dans la première partie, cette thèse analyse les frames ou cadres de sens féministes sur les violences, et conceptualise les limites de la médiation à partir de ces théories-là. Dans la deuxième partie, la thèse analyse le parcours législatif sur les violences en Espagne pour souligner autant les avancées dans ce champ, après presque 40 ans de dictature franquiste, que les obstacles de traduction juridique des frames féministes (2005-2015). La troisième partie examine la mise en œuvre de la loi par des opérateurs socio-juridiques (médiateur/trices, psychologues, avocat·e·s et juges), et montre comment ces derniers font sens de la loi, et comment certain·e·s requalifient les violences machistes comme de simples conflits familiaux. À partir de l’observation directe de séances d’information à la médiation familiale intra-judiciaire, l’auteure montre comment les médiateurs ou médiatrices en viennent parfois à empêcher les femmes de parler des violences. Finalement, resserrant la focale d’analyse sur les expériences de femmes séparées avec enfants, l’enquête révèle la manière dont elles sont parfois revictimisées au cours de la médiation familiale. Cette thèse met en évidence le décalage entre des lois avant-gardistes d’inspiration féministe, et une application marquée par la violence institutionnelle, dans une société patriarcale formellement égalitaire et traversée par des politiques d’austérité.