Entre incertitudes et reconnaissances : Se construire avec le syndrome de Gilles de la Tourette
Stéphanie Lauvergeon est psychologue au Service de Psychiatrie et Psychothérapie pour Enfants et Adolescents de l’hôpital du Valais. Elle a auparavant occupé un poste d’assistante diplômée en psychosociologie clinique à l’Université de Lausanne, puis de responsable de recherche à l’Institut Universitaire de Médecine Sociale et Préventive (CHUV). Elle a soutenu sa thèse en juin 2016, sous la direction de la Prof. Michèle Grossen (IP).
L’objectif de ce travail est de comprendre comment des personnes atteintes du syndrome de Gilles de la Tourette (SGT) peuvent vivre avec un tel syndrome et construire leur identité. Le SGT est défini comme un trouble neurologique relativement rare caractérisé par des tics moteurs et vocaux souvent associés à d’autres symptômes (tels les troubles de l’attention), variables d’un individu à l’autre et au cours du développement d’un individu. L’origine du syndrome est incertaine et il n’y a pas de traitement curatif.
Afin d’appréhender les problèmes rencontrés par les personnes atteintes ainsi que leurs ressources, nous nous intéressons à leurs représentations du SGT et à leur parcours de vie, de même qu’au soutien social fourni par les associations de malades. Pour cela, nous avons effectué un travail ethnographique dans une association et mené des entretiens auprès de personnes atteintes. Nos données ont ensuite été analysées à la lumière de la littérature médicale sur le SGT et de la psychologie de la santé, que nous avons complétées par une perspective psychosociale et discursive.
Nos résultats montrent que les incertitudes médico-scientifiques entourant le SGT n’empêchent pas les personnes atteintes de lui donner un sens et participent même à la construction de leurs représentations. Ces représentations varient chez une même personne et visent une double reconnaissance : celle de la personne et celle de la maladie. Cette double reconnaissance est recherchée par les personnes atteintes à cause du regard stigmatisant d’autrui qui les pousse à développer des stratégies pour contrôler leur syndrome. A un niveau collectif, elles adhèrent à une association de malades. Si l’association paraît leur apporter une aide effective, nos résultats montrent qu’elle participe aussi à la construction d’une identité tant sociale qu’individuelle, en permettant la comparaison à un autre semblable.