Normes et valeurs de la dette publique : une crise française en débat (1787-1791)
Après des études de philosophie et de sciences politiques à Aix-en-Provence, Pierre de Saint-Phalle a enseigné à Paris au sein d’établissements privés du supérieur durant une dizaine d’années. À la suite d’un Master de philosophie à Paris-I en 2015, orientation recherche, il devient assistant-diplômé de la Prof. Biancamaria Fontana puis du Prof. Thomas Bouchet, professeur·e·s d’histoire des idées politiques à l’Institut d’études politiques, membres du Centre Walras-Pareto. Il a soutenu sa thèse, réalisée sous la direction de la Prof. Biancamaria Fontana, le 5 février 2021.
Recherche en histoire de la pensée politique et en philosophie économique, la thèse contribue à l’étude de la dette publique en tant qu’institution sociale et politique. L’analyse historique de la crise de la dette publique française entre 1787 et 1791 permet le test d’un ensemble de propositions théoriques sur l’évolution institutionnelle en général, et l’évolution de cet objet en particulier.
L’insurrection de juin 1789, puis la reconstruction du réseau de normes étatiques, reposèrent en partie sur la défense du « crédit public » et des créanciers de l’État, soit de la valeur financière des promesses étatiques et des intérêts des détenteurs de dette devenue alors pleinement publique. La thèse revient systématiquement à la fois sur les enjeux sociaux, les théories et les institutions de la dette entre 1720 et 1787, entre 1787 et 1789 puis entre 1789 et 1791 afin de contextualiser et suivre au plus près la crise en développement. La défense de l’inscription des valeurs « égalité » et « ordre social » s’appuya en pratique sur la défense des intérêts des créanciers, catégories qui recouvraient une grande hétérogénéité à la fois sociale et politique, des domestiques et artisans jusqu’aux grands argentiers de l’Ancien Régime.
La thèse analyse également les pamphlets de cinq auteurs (1787-1789) ainsi que l’intégralité des débats de l’Assemblée Nationale Constituante portant sur les problèmes budgétaires et monétaires entre juin et décembre 1789. La dette nationale a été considérée comme « sacrée » dès le serment du jeu de Paumes. La constitution de 1791 interdit à quiconque d’en empêcher le paiement. La thèse propose une description des liens entre valeurs, normes et institutions de la dette, modèle théorique transposable à toute étude de l’évolution institutionnelle. La méthode de recoupement des trois pratiques discursives (normative, normatrice et positive) est ici testée afin de décrire l’évolution dynamique d’une institution en lien avec l’ordre social, politique et financier moderne.