Les destins de l’héritage traumatique au cœur du processus de parentalité : à propos de la transmission entre les générations chez les descendants d’exilés politiques chiliens vivant en Suisse.
Manon Bourguignon est titulaire d’un master de Psychologie clinique et Psychopathologie de l’Université Libre de Bruxelles. Elle a effectué son doctorat de 2014 à 2020 à l’Institut de Psychologie de l’Université de Lausanne. Par ailleurs, elle travaille à l’Aronde, un espace de prévention et d’accueil Enfants-Parents au sein de la Maison de l’Enfance, à la Vallée de la Jeunesse. Son travail de thèse vise à promouvoir une psychanalyse au service des Droits Humains. Manon Bourguignon a soutenu sa thèse le 7 octobre 2020 sous la direction de la MER Muriel Katz-Gilbert (IP) et la co-direction de la Prof. Marcela Cornejo de l’Universidad Catolica de Chile à Santiago, au Chili.
Suite aux violences collectives qui ont marqué le XXe siècle, de nombreuses études en psychologie se sont centrées sur la transmission du traumatisme. L’originalité de notre recherche est d’explorer la dynamique de la transmission du traumatisme à travers le prisme du processus de parentalité. Notre objectif est d’explorer l’impact des remaniements identificatoires suscités par la parentalité sur la transmission psychique à la génération suivante ; et ce dans un contexte particulier, à savoir celui de la situation d’exil et de l’héritage d’un traumatisme collectif.
Le terrain de recherche porte sur la dictature civile-militaire au Chili (1973-1990). Pour répondre à notre objectif, nous avons rencontré douze participants, descendants d’exilés politiques chiliens dont les enfants grandissent en Suisse. Le dispositif méthodologique qualitatif se compose de trois entretiens en individuel accompagné d’instruments et d’un guide d’entretien semi-directif. Une double logique analytique – singulière et transversale – a été privilégiée au moyen d’analyses thématique et interprétative.
Les principaux résultats de la recherche éclairent la complexité de la dynamique de la transmission des repères identificatoires dans le contexte de l’exil. Nous observons que la parentalité est un processus propice aux remaniements des contrats narcissiques. Les traces traumatiques de l’histoire familiale et collective ont des répercussions sur le processus de parentalité. Nous proposons une typologie pour illustrer les différents destins de l’héritage traumatique. Trois types de processus de parentalité sont mis en évidence selon la teneur des remaniements identificatoires : souple, labile et rigide.
Afin de mettre l’accent sur le caractère dynamique de la parentalité, nous avons développé la notion de parentescence qui rend compte de la complexité des processus psychiques impliqués avant même la naissance d’un enfant. Cette recherche ouvre des perspectives cliniques et socio-politiques relatives à la fois à la prise en charge des enfants issus de la migration et à l’expérience du devenir parent.