Persistance, contraintes et détournement de la division sexuelle du travail dans la sphère domestique. Une étude de cas dans les Alpes valaisannes.
Thierry Amrein est anthropologue social, titulaire d’un Master en lettres de l’Université de Fribourg (CH) consécutif à une recherche effectuée en Turquie. Ses intérêts de recherche portent principalement sur des questionnements liés au genre, surtout au sein de la sphère domestique. Il a aussi entrepris des enquêtes sur la migration et sur le développement durable local. Il enseigne à la HES-SO Valais sur ce dernier thème ainsi que sur la méthodologie de la recherche anthropologique. À ce jour, ses terrains de recherche se sont le plus souvent situés dans les vallées alpines. Il a soutenu sa thèse en sciences sociales le 3 mai 2019 sous la direction de Marta Roca i Escoda, Maître d’enseignement et de recherche (ISS).
Après un premier projet similaire dans le Val Maggia (Tessin), un ambitieux dispositif de formation expérimental d’une durée de deux ans spécifiquement conçu pour les femmes des vallées alpines et intitulé parcoursArianna a été implémenté en Valais, dans le Val d’Anniviers. Ses concepteurs et conceptrices partaient du constat que les femmes de ces régions dites périphériques étaient défavorisées en matière de formation et d’accès à l’emploi du fait de leur situation sociogéographique. L’objectif de cette formation d’une durée de deux ans était d’offrir in situ aux participantes les cours, les outils et le soutien nécessaires pour imaginer puis créer des microentreprises qui leur permettent de concilier charges familiales et travail professionnel tout en s’inscrivant dans le développement durable du territoire où elles vivent.
Envisageant ce dispositif comme révélateur potentiel de l’évolution des rapports sociaux de sexe dans la famille des participantes, la recherche de terrain dans le contexte décrit ci-dessus a pour objectif d’analyser, selon une perspective féministe s’inscrivant dans le domaine de l’anthropologie sociale, dans quelle mesure les contraintes imposées aux participantes par la division sexuelle du travail dans leur sphère domestique et l’articulation entre famille et formation/travail ne les empêchent pas de profiter pleinement de l’opportunité proposée dans leur vallée et de s’investir dans le développement d’un projet personnel original et rémunérateur destiné à “professionnaliser leurs compétences”. En inversant la perspective, la problématique porte également sur la capacité d’une action publique à s’immiscer dans l’espace domestique pour y modifier les normes liées aux rôles de genre et statuts de sexe. Pour ce faire, divers outils méthodologiques ont été mobilisés, tels qu’entretiens, observations, ou encore analyse des diverses publications et de la documentation en lien avec la formation.