Monnaie, citoyenneté et globalisation financière. Les citoyens entre protection sociale et promesses de la capitalisation boursière
Après une licence en sciences politiques à l’Université de Lausanne et un Master en relations internationales à l’Université de Kent (UK), Virgile Perret a travaillé comme assistant à la Faculté des sciences politiques et sociales de l’UNIL. Sous la direction du Prof. P. de Senarclens, il a entrepris une thèse de doctorat, qu’il a poursuivie à l’étranger grâce à une bourse FNS de chercheur débutant. Il a obtenu le titre de docteur en science politique de l’Unil en 2012.
La monnaie a été étudiée dans ses rapports à l’ordre collectif par des économistes hétérodoxes, des sociologues et des historiens, mais elle n’est que rarement analysée sous l’angle de la citoyenneté. Notre thèse propose une réflexion théorique sur quatre types de fonctions (politique, symbolique, socioéconomique et psychoaffective) qui permettent à la monnaie de jouer un rôle de médiation de la citoyenneté. A partir d’une perspective qui combine les apports de l’économie politique internationale et de l’école de la régulation, nous montrons que cette médiation ne mobilise pas seulement des mécanismes sociopolitiques nationaux, mais aussi des mécanismes internationaux qui rétroagissent sur la sphère domestique des États et affectent leur capacité à définir leur régime de citoyenneté.
Cette relation est analysée dans le contexte de l’institutionnalisation du système monétaire international de Bretton Woods (1944) et du développement de la globalisation financière depuis les années 1970. Si la monnaie a été mise au service d’un principe de protection des droits sociaux des citoyens contre les pressions financières extérieures après la Seconde guerre mondiale, elle contribue aujourd’hui à l’ouverture de la sphère domestique des Etats aux flux de capitaux transnationaux et à la création d’un ordre politique et juridique favorable aux droits des investisseurs. Cette dynamique est impulsée par l’essor de nouveaux intermédiaires financiers et par l’émergence concomitante d’une nouvelle forme d’Etat, légitimée à partir d’un discours politique néolibéral insistant sur la quête de compétitivité, la réduction de la protection sociale et la responsabilisation individuelle. Elle se traduit par la privatisation des régimes de retraite et le développement des politiques d’éducation financière qui incitent les citoyens à se comporter en « preneurs de risques » actifs et responsables, assurant eux-mêmes leur sécurité économique à travers le placement de leur épargne retraite sur les marchés financiers. Nous soulignons toutefois les difficultés institutionnelles, cognitives et socioéconomiques qui rendent cette transformation de la citoyenneté problématique.