Dans un passionnant essai historique, David Hamidovic interroge avec brio «L’insoutenable divinité des anges». A découvrir de toute urgence!
Un titre accrocheur! Un thème passionnant. On se précipite! A raison. L’insoutenable divinité des anges de David Hamidovic tient ses promesses. Titulaire de la chaire de Littérature apocryphe juive et histoire du judaïsme dans l’Antiquité à l’Université de Lausanne, l’auteur possède, outre un indéniable talent de pédagogue, une plume alerte qui ne craint ni les métaphores décalées ni les clins d’œil. Nourri par une érudition jubilante et qui jamais n’écrase le lecteur, son essai historique s’attache, en quelque 360 pages, à retracer le «déploiement des anges» depuis les origines, il y a plus de 4000 ans, jusqu’à l’époque moderne. Et ce en passant par le judaïsme, le christianisme et l’islam.
Mais qu’est-ce qu’un ange et à quoi ça sert? C’est bien sûr la question piège tant la réponse est complexe, dépendant des époques et des contextes. Avec un fil rouge toutefois, une donnée récurrente: les anges semblent toujours en lien avec le divin. David Hamidovic situe l’émergence de ces êtres célestes dans les cultures du Proche-Orient, plus particulièrement en Mésopotamie, avant le premier millénaire précédant notre ère. D’anges, ils n’ont toutefois «pas le nom et encore moins l’apparence ailée qui les symboliseront plus tard dans l’art occidental?. Ils exercent d’abord très peu de fonctions, leur tâche consistant essentiellement à porter des messages entre les dieux.
Avec l’émergence du monothéisme, leur statut évolue inévitablement. Les anges sont adaptés au contexte juif, ils deviennent en quelque sorte «des fonctionnaires de Dieu». A la fois émanations, envoyés et manifestations de la puissance divine sur terre, ils n’ont toujours pas d’ailes et ressemblent simplement à des hommes, ce qui leur permet d’entrer aisément en contact avec les humains.
Nouvelle métamorphose, au tournant de notre ère. L’histoire des anges s’accélère. Leurs fonctions s’élargissent, ils se multiplient. Ils n’ont désormais plus une apparence humaine et endossent des caractéristiques surnaturelles comme l’éclair ou la neige. De plus en plus, ils sont nommés, leurs noms signifiant tout à la fois leur mission et leur essence divine, une véritable «carte de visite», résume l’auteur. Et après une dernière partie consacrée «Aux temps de la méfiance, de la défiance et du carcan», dans laquelle il se penche notamment sur l’angélologie en islam, David Hamidovic conclut par cette perspective optimiste: «Les anges ne sont pas que des êtres célestes en rapport avec Dieu, ils sont les messagers actuels entre les cultures juive, chrétienne et musulmane». / Mireille Descombes