Inaugurée en mai dernier, la Maison de la Rivière de Tolochenaz accueille plusieurs chercheurs. Rencontres avec Pauline de Coulon, étudiante en biologie et Jean-François Rubin, directeur et privat-docent à l’UNIL. Complément à l’article paru dans Allez savoir ! 61, 24 septembre 2015.
«Là, ce sont des larves d’éphémères. Ici, ces petits crustacés, ce sont des gammares. Et là, des trichoptères.» Une dizaine de petits récipients transparents, posés sur la table, contiennent des minuscules animaux conservés dans l’alcool. Dans ce laboratoire lumineux, installé à la Maison de la Rivière de Tolochenaz, Pauline de Coulon mène son travail de master en Comportement, évolution et conservation. Ces bestioles qu’elle observe et recense proviennent d’un échantillon récolté à l’embouchure de la Venoge.
Le néophyte remarque que certains bocaux sont très pleins, et d’autres presque vides. «L’analyse des macro invertébrés donne des indications sur la pollution, indique l’étudiante. Certaines espèces plus sensibles, comme les plécoptères, se raréfient et disparaissent lorsque la qualité de l’eau baisse.» La biologiste utilise la méthode d’évaluation IBCH, mise au point par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV).
Au printemps dernier, Pauline de Coulon a effectué des prélèvements dans une quarantaine de cours d’eau vaudois, avec une technique qui rappelle celle des chercheurs d’or. Sur le terrain, elle a travaillé avec Aurélie Rubin, doctorante à l’Université de Berne. Cette dernière s’intéresse à l’impact des paramètres environnementaux sur la présence de la maladie rénale proliférative de la truite. Une fois l’analyse des macroinvertébrés terminée, des corrélations statistiques permettront de savoir si la qualité de l’eau a également un impact sur le fléau.
Après son bachelor en Biologie à l’Université de Fribourg, Pauline de Coulon souhaitait faire de la recherche appliquée sur les milieux aquatiques. Grâce au bouche à oreille, elle a appris que la Maison de la Rivière, pilotée par une Fondation, se prêtait bien à ce genre de travaux. Son travail de master est justement dirigé par Jean-François Rubin, privat-docent à l’UNIL et directeur du centre installé à Tolochenaz.
Inaugurée en mai 2015, la Maison rencontre déjà un grand succès de fréquentation auprès du grand public et des écoles. Lors de la visite d’Allez savoir !, des jeunes adolescents étaient plongés dans une activité autour du plancton. Les bâtiments flambant neufs accueillent également des chercheurs. «Nous proposons 15 places de travail et un laboratoire, explique Jean-François Rubin. La Maison de la Rivière est un poste avancé de l’UNIL et de la Haute Ecole hepia dans la nature !» Plus de 60 collaborations avec d’autres institutions de recherche (HES, universités suisses et étrangères, ainsi que le domaine des EPF), du niveau du bachelor à celui du doctorat, ont été recensées à fin 2014. Plusieurs formations continues y sont également dispensées.
Ce mélange entre curieux de tous âges et scientifiques est voulu et se voit. Alors que les écoliers gambadent alentour, Maud Liégeois (doctorante au Département d’écologie et évolution) et Luca Sciuchetti (en master) mènent leurs travaux sur les éphémères dans un canal dérivé du Boiron de Morges, qui coule non loin.
Pour qualifier les lieux, Jean-François Rubin n’aime pas tellement le mot «musée» et préfère parler de«centre d’interprétation du territoire. Nous établissons un lien entre l’Homme, la ville et la nature.» Pour lui, les patrimoines naturel et culturel se mêlent. C’est pour cela que les visiteurs peuvent voir une défense de mammouth trouvée tout près, une borne romaine, des truites et des brochets dans de grands aquariums, ainsi que le sous-marin F.-A. Forel.
Dans les prochains mois, des logements d’appoint pour les chercheurs, des locaux pour des jeunes entreprises ainsi que des locaux loués par le pêcheur bien connu Manu Torrent seront finalisés. La Maison de la Rivière prendra alors son rythme de croisière.