Les chemins de la conversion
La conversion? Un thème d’actualité, mais délicat. Et qui peut très vite s’enliser dans le bourbier des malentendus et des préjugés. Roberto Simona l’aborde avec délicatesse, et avec le recul que lui permettent sa formation de politologue et son expérience professionnelle dans l’humanitaire – notamment dans des organisations caritatives chrétiennes opérant en divers points du globe. C’est sur la Suisse, toutefois, que se focalise Conversions religieuses et liberté, un ouvrage issu de sa thèse de doctorat et qui se propose de comparer des parcours qui mènent aussi bien à l’islam qu’au christianisme, en l’occurrence le catholicisme et l’évangélisme. Roberto Simona ne se contente pas de témoignages existants. Au gré d’une quête patiente, et de longue haleine, il est allé à la rencontre d’une quarantaine de convertis pour évoquer leur choix et l’impact qu’elle eut sur leur existence. Comme il le souligne, «la démarche ne se termine pas avec la conversion, parce que la personne doit continuer à faire face à des défis pour changer ou progresser dans certains choix liés à sa conversion».
Pourquoi décide-t-on de changer de religion? Les raisons sont multiples, complexes. Parmi elles figurent la remise en question d’un monde insatisfaisant, le constat de rapports sociaux trop contraignants ou d’un manque de cohérence entre ce qui est prêché par l’Église et la vie quotidienne des fidèles. L’auteur relève également que «la conversion vers une autre religion ne nécessite pas que la personne croie en Dieu». Il conclut en rappelant qu’un «parcours de conversion se construit avec tout le vécu d’une personne» et que ce choix participe du droit et de la liberté de conscience inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. / Mireille Descombes
Sébastien Guex, historien militant
Mener de front un engagement marxiste militant et une carrière de professeur ordinaire d’Histoire contemporaine à l’Université de Lausanne, tel est le pari, peu fréquent, relevé par le Vaudois Sébastien Guex. À l’occasion de son départ à la retraite, ses collègues et amis lui offrent, en guise de remerciements, un volume de textes proposant «une saisie rétrospective et critique» de son travail riche et foisonnant. Parmi les champs les plus représentatifs de son parcours, la politique monétaire et financière de la Suisse, la question du secret bancaire et de la place financière, l’impérialisme helvétique. D’autres sections de l’ouvrage soulignent son intérêt pour la pauvreté, les prisons, enfin pour le rôle joué par notre pays dans l’évolution du marché mondial de l’art depuis la fin des années 60. Ce recueil de textes s’ouvre en outre par un long entretien avec Sébastien Guex. Il y évoque une «famille extraordinairement dysfonctionnelle» qui explique notamment son engagement politique, l’importance qu’eut pour lui la guerre du Vietnam, son adhésion, très tôt, à l’organisation de jeunesse de la Ligue marxiste révolutionnaire, les gens et les livres qui l’ont marqué. Bref, un récit de vie passionnant… et plein d’humour. / MD
D’une langue à l’autre
La traduction d’une œuvre littéraire, poétique ou philosophique facilite sa dissémination sous d’autres latitudes. Mais cette transmission peut posséder un parfum d’adaptation, voire de manipulation, ce qui n’est pas sans impact sur sa réception auprès de nouveaux lectorats. Ce numéro de la revue Études de lettres est consacré à cette question, considérée sous des angles disciplinaires différents, de la Renaissance à nos jours. La question de la réaction de l’auteur au sujet de la traduction de ses propres textes est abordée avec l’exemple de Salomé d’Oscar Wilde (1891). Comme ce dernier a écrit la pièce en français, sa traduction (puis ses retraductions au fil des ans) vers la langue maternelle de l’écrivain, par d’autres personnes, n’a pas été une mince affaire. Ces enjeux subtils sont mis en lumière dans l’une des contributions par Juliette Loesch, chercheuse en Section d’anglais à la Faculté des lettres de l’UNIL. / DS