Les vieilles pierres, les objets précieux, les bâtiments érigés en Suisse romande livrent leurs secrets à qui sait les regarder. Suivons le guide, Dave Lüthi, professeur en architecture et patrimoine à la Section d’histoire de l’art.
Il ne s’en cache pas mais ne s’en vante pas non plus, malgré la mode des transclasses (ou en raison de): Dave Lüthi est fils d’un chauffeur poids lourds et d’une travailleuse de l’horlogerie à La Chaux-de-Fonds. Il fut l’assistant du professeur Gaëtan Cassina, qu’il remplacera en 2009. «L’UNIL est désormais la seule université suisse à s’intéresser au patrimoine régional et national; il n’y a pas assez de relève dans ce domaine alors qu’il offre des possibilités de carrière nombreuses. Je peux par chance compter maintenant sur un maître-assistant pour assurer au mieux cette formation», souligne-t-il.
Il n’oublie jamais de placer ses propres étudiants en situation d’observer de près ou d’effectuer eux-mêmes des travaux associés à la restauration, à l’inventaire, à la rédaction, leur offrant ainsi l’occasion de se former sur le plan pratique et pas uniquement théorique. En ce moment, avec un groupe de jeunes en Master d’histoire de l’architecture et du patrimoine, il organise une exposition visible dès septembre 2023 au château de Waldegg, près de Soleure. Construite entre 1682 et 1686, cette résidence estivale d’inspiration franco-italienne n’a, selon lui, pas livré tous ses secrets mais on en connaît le commanditaire, un mercenaire du Roi Soleil, Johann Viktor de Besenval, grand voyageur européen ayant laissé un journal. Soleure abrite alors l’ambassade de France et Louis XIV a même offert à la ville une église jésuite dans le style de Rome (autre édifice étudié par Dave Lüthi). «Les abords de cette résidence sont magnifiques, avec notamment un jardin à la française, et le bâtiment lui-même ne ressemble à rien de connu. L’idée est de rassembler des objets du XVIIe siècle provenant de Waldegg ou d’autres lieux comme ces châteaux de plaisance qui remplacent alors en Suisse les anciens châteaux-forts. Il s’agira aussi d’aider les visiteurs à regarder le monument lui-même», décrit le spécialiste. Enfant, il voulait devenir «castellologue» et l’on peut dire qu’il y est parvenu, d’une manière plus scientifique et un peu moins médiatique que Stéphane Bern.
L’un de ses buts est d’amener les étudiantes et étudiants à voir les événements du passé d’une manière nuancée, à considérer par exemple les églises comme des édifices architecturaux et culturels majeurs de notre patrimoine. L’intérêt est là, il suffit de le cultiver et Dave Lüthi s’y emploie avec enthousiasme. Il a contribué à relancer l’intérêt des autorités et du public pour le château de La Sarraz, en dirigeant un inventaire du mobilier, de la porcelaine, des peintures, que l’on retrouve sur une base de données en ligne. Autre inventaire récent: celui des monuments funéraires de Suisse romande du XIVe au XVIIIe siècle, avec des textes rédigés par les étudiants et publiés dans les Cahiers d’archéologie romande.
Son champ d’expertise s’étend jusqu’au XXe siècle. Il travaille par exemple sur le patrimoine hôtelier alpin pour voir «comment l’architecture moderne s’est implantée dans les Alpes en Suisse et en France», esquisse-t-il.
Quand il voyage, c’est toujours avec le regard affûté du spécialiste, mais il se sent «plus détaché à Rome ou à Berlin qu’en Suisse». Mais pas moins admiratif. Depuis deux ans, il accorde à nouveau du temps à la musique; lui qui a chanté dans sa jeunesse retrouve une voix de contre-ténor grâce à un chœur qui prépare en ce moment un concert de chants de Noël baroques pour le mois de novembre. /
Une ville de goût
Brescia, où j’ai goûté à une cuisine italienne exceptionnelle, dans une ville époustouflante.
Une personne à sa table
J’aimerais bien manger avec Isabella Rossellini, qui s’est illustrée de manière fulgurante dans divers domaines.
Un goût de l’enfance
Le thon en boîte à la sauce blanche, qui me rappellera toujours les lundis à midi avec ma mère.