La revue Monuments vaudois s’intéresse cette année aux «Parcours d’architectes». Des trajectoires singulières qui ont marqué le visage du canton.
Le «style Zorro», ça vous dit quel-que chose? Et la villa urbaine, qui connut son heure de gloire à Lausanne au tournant du XXe siècle? Savez-vous, par ailleurs, à quoi ressemblait la restauration architecturale à la même époque? Pour en savoir plus, plongez-vous dans le nouveau numéro de la revue Monuments vaudois consacrée aux «Parcours d’architectes». Rédigés par une poignée de chercheurs passionnés aux approches très diverses, une demi-douzaine d’articles proposent de «remettre les acteurs de l’architecture au centre de la réflexion», s’intéressant autant à leur démarche et leurs préoccupations qu’à leurs réalisations.
C’est sur les traces de René Deléchat, né en 1899 à Bex, que nous convie Dave Lüthi, professeur associé en histoire de l’architecture et du patrimoine à l’UNIL. Quasi inconnu tant du grand public que des spécialistes, Deléchat – qui s’est notamment formé en France – s’avère particulièrement représentatif de «l’éclectisme qui caractérise l’architecture de l’entre-deux-guerres». Plusieurs de ses projets de concours, non primés peut-être en raison de leur audace, témoignent de son intérêt pour la modernité et de sa large connaissance de l’architecture de son temps. C’est toutefois dans un régionalisme, parfois qualifié de moderne, qu’il s’est concrètement illustré. Multipliant les expériences stylistiques et typologiques, il s’est essentiellement consacré à la construction de villas, individuelles ou locatives, et de chalets de vacances, tirant notamment ses références de l’architecture traditionnelle basque ou provençale. Allant plus loin, il s’est même aventuré dans ce que Dave Lüthi nomme le «style Zorro», avec la construction, à Noville, d’une maison dont le vocabulaire semble clairement inspiré par les haciendas ibériques et sud-américaines.
Avec Mona Joseph, photographe et étudiante en histoire de l’art, on s’intéresse ensuite à Louis Bezencenet (1843-1922) et à ses villas urbaines. De petits immeubles d’habitation, de trois à cinq niveaux, implantés en ordre non contigu et qui marquent encore aujourd’hui la physionomie de Lausanne. Autre parcours, analysé cette fois-ci par l’historienne de l’art et de l’architecture Ludivine Proserpi: celle de Frédéric Gilliard (1884-1967), protagoniste majeur parmi les architectes restaurateurs de monuments historiques durant l’entre-deux-guerres. Véritable homme-orchestre sur les chantiers, Gilliard s’est surtout occupé du patrimoine religieux. Son importance tient aussi au fait qu’il a assorti son activité d’une réflexion théorique et critique. Son but: revaloriser les monuments dans leur dimension artistique et lutter contre les dérives muséifiantes de l’ «archéologomanie».
Notice sur Labelettres (Faculté des lettres)