Depuis son enfance, Alexandre Roulin est passionné par l’effraie des clochers. En dix chapitres, qui sont autant de «leçons de morale sauvage», ce professeur au Département d’écologie et évolution nous raconte tout de cet oiseau nocturne.
Par exemple, comment cette chouette peut-elle chasser la nuit? Notamment grâce à son ouïe – meilleure que sa vue –, à ses oreilles placées de manière asymétrique et à son «masque facial en forme de cœur», qui intensifie le faible son émis par ses proies, comme les campagnols. Écrit à quatre mains avec la professeure Christine Mohr (Institut de psychologie), l’ouvrage donne nombre d’informations sur ce beau rapace discret. Pourquoi son vol est-il silencieux? Comment le mâle, parfois bigame, gère-t-il deux familles en parallèle? Comment les petits, au nid, négocient-ils entre eux pour savoir qui recevra la prochaine livraison de nourriture? Rédigé dans un style aussi détendu que ses auteurs, Ma vie de chouette est alimenté par des décennies d’observation et de recherche, ce qui implique bien des heures passées au sommet d’échelles, dans des granges, ou à dépiauter des milliers de «pelotes», soit les boules régurgitées par les oiseaux.
Au passage, cet ouvrage traite d’autres oiseaux exotiques, les scientifiques. Alexandre Roulin a suivi un parcours atypique. Ce Broyard fan de metal a été entre autres manœuvre sur des chantiers, avant de se lancer dans des études à l’UNIL. Les qualités nécessaires aux chercheurs, comme une obstination en tungstène, beaucoup de créativité et la capacité de s’entourer d’équipes aux compétences complémentaires (la statistique est par exemple «au-dessus des forces» d’Alexandre Roulin) sont ainsi mises en lumière. / DS
Vidéo sur Salamandre TV : youtu.be/SAW9zu_DkRw
Littérature au Moyen Âge
Les histoires de la littérature romande incluent toutes un bref chapitre sur le Moyen Âge. On y retrouve un peu toujours les mêmes noms, dont ceux d’Oton de Grandson, Martin Le Franc et Jacques de Bugnin. Récupération cavalière d’une production qui ne nous appartient pas? s’interroge Alain Corbellari en préambule à son essai. Professeur aux Universités de Neuchâtel et Lausanne, le médiéviste rappelle en effet que le concept de Suisse romande n’est pas pertinent avant le XVe siècle. D’où la précision qu’il abordera «tout simplement – sans discriminations et sans distinctions superflues – l’ensemble des faits littéraires qui ont intéressé, du VIe siècle à la Renaissance, les régions qui font aujourd’hui partie de la Suisse romande». Son parcours conduit de la Reine Berthe à Théodore de Bèze en passant par «le Chat du Lac de Lausanne». Et il se défend bien de rechercher dans ces textes «la préfiguration d’une introuvable essence de la littérature suisse romande». / MD
Notice sur le site Labelettres (Faculté des lettres)
Itinéraire d’un Méditerranéen
Ce livre entrelace événements historiques, récits familiaux et itinéraire intellectuel d’un jeune homme né en Tunisie et devenu Franco-Suisse. Il reflète le raffinement, la culture et la gentillesse de Mondher Kilani, professeur honoraire. La Méditerranée est dépeinte en modèle de «diversité historique, culturelle, religieuse et linguistique», au sein duquel la culture peut «varier à l’infini ses motifs et sa morphologie», ce qu’il nomme le relativisme culturel. Il invite à dépasser les replis identitaires pour entendre «l’écho de l’autre en soi» et reconnaître nos emprunts culturels au lieu de les oublier dans un excès de cannibalisme prédateur. La mer rapproche, surtout les braves gens avec leurs rituels moqués, leurs mythes et leurs savoirs méprisés, leurs efforts matériels et symboliques pour survivre, se consoler ou se rebeller. Mais ce pourtour a aussi été celui de persécutions, envers les Juifs notamment. Il faut désormais lutter contre les pollutions et la surpêche industrielle. / NR