De la difficulté d’agir

Même si la situation s’est améliorée depuis les années 50, les eaux du lac contiennent, entre autres, des micropolluants issus de l’activité humaine. Nicole Chuard © UNIL

En 2006, le Parlement européen a mis sur pied la directive REACH, un projet d’évaluation des risques des substances chimiques mises sur le marché. Résultats?

La directive REACH est une réelle avancée dans le domaine de la surveillance de produits potentiellement toxiques (sauf les agents phytosanitaires, les biocides et les médicaments), avec 30000 substances évaluées de 2006 à 2018. Les entreprises suisses sont aussi concernées si elles fabriquent des produits chimiques dans l’UE et si elles les exportent vers l’UE. «Ce projet visait à renverser le fardeau de la preuve: les industriels devaient montrer que leurs substances n’étaient pas problématiques avant de les mettre sur le marché, explique Nathalie Chèvre. En tant que scientifique, je pensais que ce serait un gain énorme de données.» Malheureusement, les résultats ont été décevants. Selon la chercheuse, 50 à 60% des données présentées n’étaient pas correctes et il existe encore des moyens détournés de garder certaines substances interdites sur le marché.

«Pour ces raisons, l’UE a relancé une initiative en 2022, le Pacte vert, dans le but d’aller vers un monde sans substances toxiques, relate l’écotoxicologue. Cet essai de remise en place d’une législation pour diminuer les produits nocifs est importante. Mais il se heurte aux grands lobbys. C’est extrêmement difficile d’aller de l’avant.» En Suisse, des ordonnances sur les produits phytosanitaires ainsi que sur les biocides existent depuis 2005 et permettent de surveiller ce qui sort sur le marché. Quant à la Loi sur les produits thérapeutiques, datant de 2000, elle réglemente, sous le contrôle de Swissmedic, les médicaments mis en vente. Mais nous sommes encore loin de la Suède par exemple, qui pratique l’écopharmacie et affiche les risques environnementaux sur les médicaments. 

Manque de données

«En Suisse, 2000 substances médicamenteuses sont sur le marché et on en cherche 50 dans les eaux, révèle la maître d’enseignement et de recherche. Des centaines de millions de substances chimiques nous entourent, sans que l’on puisse prédire ce qu’il va se passer, car on analyse chaque produit individuellement. On ne s’intéresse jamais aux cocktails engendrés par les mélanges. Pour améliorer la situation, j’estime qu’il est primordial de travailler avec les différents corps de métier (agriculteurs, médecins, industriels, etc.) et de faire de la vulgarisation scientifique auprès de la population pour faire prendre conscience des enjeux environnementaux. Arrêter de jeter n’importe quoi sur les routes peut déjà avoir un impact positif.» /

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