Cela fera un demi-siècle, le 29 octobre prochain, que le petit Gaulois moustachu façonne notre vision du monde celtique. Cinq décennies durant lesquelles les archéologues ont réécrit l’histoire de nos ancêtres et ont progressivement pris leurs distances avec les personnages de la BD. Démêlons le vrai du faux avec les experts de l’UNIL.
Il est tout petit, alors que les guerriers celtes impressionnaient les Romains par leur forte stature. Il ferraille avec une lame miniature, quand les vrais Gaulois combattaient les légionnaires de César avec des épées nettement plus longues que celle des Italiens. Il chasse dans la forêt pour se nourrir, alors que les Celtes de son époque vivaient des produits de l’agriculture, et mangeaient plus de céréales que de viande d’élevage. Et presque jamais de sanglier.
A bien des égards, Astérix ne ressemble plus du tout aux vrais Gaulois que décrivent les archéologues d’aujourd’hui. Et pourtant, depuis près de cinquante ans, ce petit personnage sympathique est devenu l’incarnation du guerrier celte. Nous célébrerons d’ailleurs son jubilé, entre le 22 et le 29 octobre prochain, avec la sortie d’un nouvel album constitué d’histoires brèves, qui viendra rappeler ce jour de 1959 où un petit moustachu, dopé à la potion magique, a distribué ses premières baffes dans le magazine Pilote.
Astérix reste très utile pour expliquer le monde celte
Depuis un demi-siècle, Astérix marque les imaginaires des enfants et contribue à maintenir des clichés vieillis dans les esprits de générations d’élèves davantage influencés par les cases de la célèbre BD que par les plus récentes publications savantes. Et pourtant, les archéologues de l’UNIL ne lui en veulent pas.
«Les albums d’Astérix, surtout ceux de l’époque où Goscinny et Uderzo travaillaient ensemble, sont formidables, même s’il ne faut pas les lire comme un livre d’histoire, apprécie Thierry Luginbühl, professeur à l’UNIL, où il dirige l’Institut d’archéologie et des sciences de l’Antiquité. Nous sommes très reconnaissants aux auteurs d’avoir inventé des personnages aussi attachants, et d’avoir créé des images qui popularisent cet univers. Car ces images nous donnent un bon point de départ pour expliquer ce qu’était vraiment le monde celtique.»
La BD «La serpe d’or» doit beaucoup à Pline
Précision qui a son importance, Goscinny et Uderzo n’ont pas réinventé un univers celte à leur propre sauce. Ils se sont beaucoup documentés, et ont notamment lu les auteurs antiques qui nous parlent des Gaulois. A Jules César, ils ont emprunté l’idée que les Belges étaient les plus courageux des Gaulois. Avec Diodore de Sicile, ils ont appris que les Celtes portaient de longues moustaches qui leur couvraient la bouche. Et Pline leur a fourni le titre d’un album, «La serpe d’or», avec son récit de la cueillette du gui par les druides.
Si les archéologues d’aujourd’hui lisent toujours César, Diodore et Pline, ils ont appris à ne plus prendre ces témoignages au pied de la lettre. «Les recherches archéologiques de ces dernières décennies nous ont montré que les textes antiques proposent un point de vue biaisé sur les Gaulois: celui de classiques, qu’ils soient Grecs ou Romains, qui se considèrent comme civilisés et qui observent des Celtes comme on regarderait des sauvages, en s’étonnant de leurs moeurs qu’ils trouvent étranges et qu’ils ne comprennent souvent pas. Ils véhiculent encore des poncifs, et décrivent parfois des coutumes qui avaient cours quelques siècles plus tôt, mais qui ont disparu à l’époque de César», explique Gilbert Kaenel, directeur du Musée cantonal d’archéologie et d’histoire, et auteur d’une thèse de doctorat à l’UNIL consacrée au monde celte.
Les druides allaient moins en forêt qu’on ne le croit
L’archéologie a fait voler en éclats plusieurs de ces clichés. A commencer par cette idée que les Gaulois habitaient de petits villages dans la forêt. «Comme ils construisaient en bois, les Celtes nous ont laissé des vestiges moins spectaculaires que les Egyptiens, les Grecs et les Romains qui bâtissaient en pierre. Mais ça ne veut pas dire qu’ils habitaient des cabanes dans la forêt. Ils construisaient des maisons, des bâtiments publics et même des villes, précise Gilbert Kaenel. Ils n’étaient pas moins civilisés, ils ont simplement fait des choix différents de ceux des Romains et des Grecs qui nous parlent d’eux», poursuit Gilbert Kaenel.
Notre (re)découverte des druides montre également le chemin effectué récemment par les archéologues. Si l’on en croit Goscinny et Uderzo, largement influencés par Pline, les druides comme Panoramix pratiquaient une sorte de culte de la nature, récoltant des plantes et cueillant du gui à la serpe. Quand ils ne partaient pas en pèlerinage dans la forêt des Carnutes pour de grandes cérémonies.
«La découverte de nombreux lieux de culte montre qu’il n’en était rien, corrige Gilbert Kaenel. Comme les autres peuples de l’époque, les Gaulois avaient des sanctuaires dans les villes ou les villages pour abriter leurs cérémonies. Et leur religion était bien moins naturiste qu’on pouvait le croire, il y a encore cinquante ans, même si des lieux sacrés existent aussi dans la nature, à l’instar de la colline du Mormont, près d’Eclépens /La Sarraz (VD), qui est en cours d’exploration.»
Cinquante ans. C’est bien là qu’est le problème. Les aventures d’Astérix nous montrent les Gaulois, tels que les maîtres d’école et les savants les imaginaient en 1959. Autant profiter de cet anniversaire pour découvrir à quoi ressemblaient vraiment nos ancêtres les Gaulois.
Ils n’ont pas exagéré, par Toutatis et par Bélénos!
Nos vrais ancêtres les Gaulois avaient effectivement peur que le ciel leur tombe sur la tête. En matière de religion, les aventures d’Astérix se montrent plutôt fidèles aux sources historiques, confirme le professeur de l’UNIL Thierry Luginbühl.
Ce n’est pas une invention du scénariste d’Astérix : les vrais Gaulois craignaient effectivement que le ciel leur tombe sur la tête. «Une source grecque nous parle en effet d’une ambassade de peuples celtiques qui s’est rendue chez Alexandre le Grand, raconte Thierry Luginbühl. Alors que le roi leur demande s’ils ont peur des Macédoniens, les Gaulois lui répondent qu’ils ne craignaient qu’une seule chose: que le ciel leur tombe sur la tête!»
«Cela peut paraître curieux, voire idiot à notre époque, mais il y a une explication à cette angoisse, précise le professeur à l’UNIL. Les populations celtes, comme plusieurs autres groupes indo-européens, pensaient que la voûte céleste était soutenue par un arbre cosmique. Ils pouvaient donc imaginer qu’il s’effondre et que cela précipite leur fin.»
Des dieux bien connus des archéologues
Le scénariste d’Astérix a été tout aussi bien inspiré en glissant dans son oeuvre d’innombrables prières et invocations à Toutatis et à Bélénos. «On peut en effet imaginer que les Celtes, comme les Grecs et les Romains, prenaient leurs dieux à témoin», poursuit Thierry Luginbühl. Le professeur de l’UNIL observe encore que, à la notable exception, clairement humoristique, d’Amora, la déesse qui monte parfois au nez des Gaulois, tous les dieux cités dans les aventures d’Astérix sont bien attestés par des sources antiques.
Bélénos et Toutatis, notamment, sont bien connus des archéologues. Bélénos, soit «le Brillant», est plus ou moins l’alter ego gaulois d’Apollon, un dieu guérisseur rattaché à la symbolique solaire. Quant à Toutatis, c’est l’équivalent de Mars, le dieu de la guerre, mais aussi le protecteur d’une région ou de la tribu.
Un panthéon sans limite
Le professeur de l’UNIL attribue enfin une dernière couronne de lauriers aux auteurs d’Astérix, qui n’ont pas exagéré, dans «Le Devin», quand ils nous montrent des Gaulois qui s’inquiètent de la discorde que l’orage pourrait semer chez leurs innombrables dieux (lire ci-contre). On connaît en effet plusieurs centaines de noms de divinités gauloises. «Il faut imaginer la religion des Gaulois comme celles des Grecs, des Romains ou des Hindous, précise Thierry Luginbühl. Ce sont des panthéons qui n’ont pas de limite, où l’on rencontre des dieux nationaux, régionaux et locaux. Chaque famille, chaque manifestation, chaque arbre et chaque rivière en avait un. Et il y en avait même pour certains gestes culinaires et artisanaux.
C’est faux: on ne pouvait pas acheter Obélix avec des sesterces!
Eh bien non, par Mercure! Ce ne sont pas les Romains qui ont fait découvrir la monnaie aux Gaulois. Pourtant, cette histoire vous est contée dans «Obélix et compagnie», un épisode où l’on voit l’envoyé de César, Caius Saugrenus, tenter de pacifier l’irréductible village gaulois en achetant des menhirs à grand renfort de sesterces. Ce qui incite les Gaulois à préférer tailler la pierre, plutôt que faire la guerre.
En réalité, les premières monnaies sont arrivées en Gaule plus de deux cent cinquante ans avant l’époque d’Astérix (vers 50 av. J.-C.). Et elles ne provenaient pas de Rome, mais de Macédoine, explique Anne Geiser. «Ces pièces d’or constituaient le salaire des mercenaires celtes qui combattaient pour Philippe II et pour Alexandre le Grand. Elles furent largement imitées en Gaule chevelue, portant peu à peu des images déformées.» Quant aux monnaies romaines, elles ne sont arrivées que bien plus tard dans les villages gaulois, avec la montée en puissance de Rome au sud des Alpes.
Les Celtes imitaient les monnaies grecques et romaines
«Il faut donc imaginer que les Gaulois qui vivaient dans nos contrées avaient plusieurs sortes de pièces dans leur bourse, poursuit l’experte de l’UNIL. Dès la fin du IIe s. av. J.-C., on trouve des bronzes coulés, que l’on Un quinaire à la légende KALETEDU qui provient du Mormont (VD) appelle aussi les potins gaulois à la grosse tête, qui imitent des pièces grecques circulant à Marseille. Il y avait encore des quinaires en argent, qui portaient la légende KALETEDU, et qui imitaient une monnaie romaine.»
Vers 50 av. J.-C., soit à l’époque d’Astérix, se développe un quinaire avec des caractéristiques propres aux Gaulois, comme les pièces aux légendes NINNO/MAVC et VIROS /VATICO dans nos régions, peut-être des noms de princes ou de chefs helvètes.
Si les pièces gauloises sont frappées à l’imitation de monnaies grecques et romaines, elles ont un style propre, facilement reconnaissable. «Les motifs sont à la limite de l’art brut, apprécie Anne Geiser, et les pièces sont ornées de dessins géométriques, de symboles gaulois figurés (torque, fibule, tête coupée, branche d’arbre, carnyx…), ou encore de figures animalières (sanglier, cerf, cheval, loup, serpent).»
A l’époque d’Astérix, il n’y avait pas de sesterce en Gaule
Et les fameux sesterces romains, qui rendent fous les habitants du village dans «Obélix et compagnie»? Et les sesterces que Moralélastix, le chef d’une tribu voisine, confie au village avant de les voler dans «Astérix et le chaudron»? C’est l’un des anachronismes de la BD. Car «le sesterce d’argent ne circule quasiment pas en Gaule à cette époque, poursuit Anne Geiser. Sous la République romaine, la plus petite monnaie d’argent du système romain (elle pèse autour de 1 gramme) n’a été que très peu émise.»
La Gaule n’en contenait donc pas assez, ni pour remplir un chaudron, ni pour payer les menhirs d’Obélix. «Et ce n’est que bien après Jules César, sous le règne de l’empereur Auguste, que le système monétaire romain est réformé et que le sesterce va devenir une grosse pièce de bronze, qui va effectivement se généraliser.»
Qui habitait vraiment dans le village d’Astérix?
Dans la BD, ils sont incontournables. Mais qui, du forgeron, du barde, du druide, du livreur de menhirs, et, bien sûr, du chef du village, vivait effectivement en Gaule, vers 50 av. J.-C.? Les réponses de Gilbert Kaenel, directeur du Musée cantonal d’archéologie et d’histoire, et auteur d’une thèse de doctorat à l’UNIL consacrée au monde celte.
Le forgeron. C’est effectivement une figure importante du monde gaulois, qui exerce un art de haut niveau et diffuse ses produits loin à la ronde. Il façonne des outils (haches, serpes, chaudrons…) et des armes réputées, dont les fameuses épées et leurs fourreaux en métal, uniques à l’époque, confirme Gilbert Kaenel. Mais, si la forge est un domaine de compétence du monde gaulois, on ne connaît pas le statut de ses artisans. On ne sait même pas s’ils étaient des hommes libres. Ils devaient probablement travailler au service de l’aristocratie, des élites gauloises.
Le barde. Oui, comme Assurancetourix, les vrais bardes gaulois jouaient de la musique, et ils aimaient la poésie et la littérature. Ils décernaient des blâmes ou des hommages aux notables, nous disent les auteurs antiques. Sur le champ de bataille, ils jouaient encore un rôle religieux important, parce qu’ils étaient capables de guider les âmes des guerriers morts vers l’Eden. Et s’ils faisaient effectivement peur à quelqu’un en jouant de la musique, ce n’était pas aux habitants de leur village, mais plutôt à leurs ennemis. Car, juste avant le combat, les bardes participaient au fameux «tumulte gaulois» en sonnant la charge avec leur carnyx, une trompe de guerre qu’ils préféraient à la lyre, l’instrument préféré du barde Assurancetourix, qui, dans la case ci-dessus, porte aussi un carnyx sur l’épaule.
Le chef. Ce qui est sûr, c’est que le monde gaulois était beaucoup plus hiérarchisé que le village d’Astérix. Il était majoritairement composé de paysans et d’artisans, qui dépendaient fortement de grands aristocrates, dont ils étaient probablement les clients. Sans parler des esclaves, qui existaient en Gaule comme à Rome, mais qu’on ne voit pas dans Astérix.
Les chefs celtes ont donc bien existé. Les noms de certains d’entre eux, comme Vercingétorix l’Arverne, ou les Helvètes Orgétorix et Divico, sont parvenus jusqu’à nous, observe Gilbert Kaenel. Mais nous n’en savons guère plus. Ce qui est sûr, en revanche, c’est qu’un vrai chef gaulois de l’époque d’Abraracourcix ne paradait pas dans le village juché sur un bouclier rond: si les Celtes de l’époque utilisaient de grandes protections de ce genre, leurs boucliers étaient allongés et ovales.
Le livreur de menhirs. C’est une pure invention des auteurs de la BD. Un immense anachronisme, car ce «métier» a disparu deux à trois millénaires avant qu’Obélix ne tombe dans la potion magique. Les mégalithes, nom scientifique de ces grandes pierres, ont été dressés dans certaines régions d’Europe aux 5e et 4e millénaires, voire au 3e millénaire av. J.-C., rappelle Gilbert Kaenel. Dans nos régions, il y en a notamment eu à Yverdon et à Lutry, et toute une série le long de l’autoroute A5 (Onnens, Bevaix). Ils avaient une signification cultuelle ou calendaire, et ils allaient de pair avec les sociétés agricoles vivant à ces époques reculées. Les menhirs n’ont donc strictement rien à voir avec le monde gaulois. Même si, à l’époque d’Astérix, ces mégalithes étaient connus, et parfois même utilisés.
Le druide. Pour imaginer le personnage de Panoramix, les auteurs d’Astérix ont certainement lu les textes grecs et romains. Jules César leur a appris que le druide jouait un rôle essentiel dans la communauté gauloise. Et Pline leur a fait découvrir la cueillette du gui avec une serpe d’or. La réalité était sensiblement différente. «D’abord, nous n’avons jamais retrouvé de serpe d’or», sourit Gilbert Kaenel, qui lit les textes antiques avec beaucoup de prudence. «Ils nous donnent la vision romaine des Gaulois, celle de «civilisés» véhiculant des clichés sur les «bons sauvages». L’archéologue voit plutôt le druide comme un aristocrate doté d’une autorité naturelle et qui avait suivi une longue formation. C’était une sorte de philosophe, d’historien de son peuple. Ce savant réglait les cas de justice, il présidait aux pratiques rituelles et cultuelles. L’enseignement faisait enfin partie de ses responsabilités. Mais, s’il pouvait connaître les langues étrangères et l’écriture (qu’il utilise de façon marginale), le druide transmettait ses connaissances par oral, en préférant s’appuyer sur la mémoire des hommes que sur des notes rédigées. Ceci explique que nous en sachions finalement peu à leur propos.
Lors des banquets, ils mangeaient Idéfix, plutôt que des sangliers!
A la fin de chaque aventure d’Astérix, le village se retrouve pour festoyer. Là encore, les auteurs de BD n’ont pas exagéré. Même si le menu des vrais Gaulois aurait certainement coupé l’appétit d’Obélix, comme l’explique Gilbert Kaenel.
Une scène de banquet. Elle rassemble tout le village, sauf le barde. Voilà la case qui clôt invariablement un album d’Astérix, avec, sur les tables et dans les verres, des quantités de nourriture et de boissons qui laissent songeur. Et pourtant, sur ce point, les auteurs de la BD Goscinny et Uderzo sont probablement restés en deçà de la réalité. Car les festins gaulois, liés à la religion ou à la politique, réunissaient des centaines, voire des milliers de participants, nous disent les archéologues. Et l’on y consommait des quantités de breuvages et de nourriture tout à fait orgiaques.
Idéfix au menu. S’ils mangeaient peu de viande, les Gaulois n’avaient pas de tabou alimentaire, comme dans nos sociétés actuelles. Le chien pouvait parfaitement figurer au menu d’un banquet. «On a retrouvé des os de canidés avec des traces de découpe, prouvant qu’ils ont été consommés», précise Gilbert Kaenel. Les Gaulois mangeaient aussi du cheval. Il y a des zones où l’hippophagie est largement attestée, surtout dans le nord de la Gaule, mais aussi sur le plateau suisse. Tout près de chez nous, les fouilles du Mormont (VD) montrent notamment qu’on y a mangé du cheval, et aussi un peu de chien.
Pas de sanglier. C’est une surprise pour les fans d’Astérix, et grosse déception pour Obélix: les Gaulois ne mangeaient que très rarement du sanglier. «La viande n’est pas la base de l’alimentation celte, comme on le croit en lisant Astérix, explique Gilbert Kaenel. Et les vrais Gaulois ne se nourrissaient pas en allant chasser dans la forêt. C’étaient des paysans qui cultivaient des céréales et qui mangeaient essentiellement des bouillies et des soupes, à base d’orge et de céréales.»
Quand ils mangeaient de la viande, notamment lors des banquets, c’était d’abord du boeuf, du porc, et aussi du mouton et de la chèvre. Et la chasse? «Les archéozoologues, qui étudient les restes animaliers retrouvés sur les sites celtes, nous disent que la faune chassée (essentiellement le cerf et le sanglier) figure très rarement au menu. Elle ne représente que quelques pour-cent de leur alimentation.»
Du poisson frais et d’importation. Dans «La grande traversée», Ordralfabétix, le marchand de poisson du village d’Astérix, précise avec une fierté comique, qu’il ne vend que du poisson provenant de Lutèce, et fourni par les meilleurs grossistes. Sans le savoir, Goscinny a touché juste. Les archéologues ont en effet retrouvé en Bavière (Allemagne) les vertèbres de sardines méditerranéennes! On ne sait pas si elles ont été transportées en tant que poisson séché, ou si elles faisaient partie de sauces conservées dans des amphores, mais ces reliefs témoignent d’un commerce de poisson à large échelle, explique Gilbert Kaenel. Par ailleurs, on sait que les Gaulois mangeaient aussi du poisson pêché dans les lacs et les rivières: brochet, truite, perche… dont on a retrouvé des os, des vertèbres et parfois des écailles sur les sites archéologiques.
Pas de cervoise, mais du vin. Les Gaulois qui vivaient vers 50 av. J.-C. avaient effectivement un formidable lever de coude. Mais ils ne se remplissaient pas de cervoise tiède (qui était une boisson plus populaire que festive) et préféraient boire du vin. Ce breuvage très prestigieux et si prisé venait d’Italie (de Naples ou de la Campanie) dans des amphores de 25-30 litres. Il se buvait pur, ce qui a beaucoup surpris les Grecs et les Romains qui ont assisté à ces scènes et qui, eux, avaient l’habitude de couper le vin avec de l’eau. Un geste impensable pour les Gaulois, qui considérait ce breuvage comme le symbole de la vie, le sang de la terre. Précisons encore, à la décharge des Celtes, qu’ils ne consommaient pas tout le vin qu’ils importaient. Le contenu de nombreuses amphores était ainsi directement déversé dans le sol, en offrande aux dieux vivant sous terre.
Jocelyn Rochat
Article tres pedagogique,bien fait. Felicitations